mardi 29 novembre 2022

MAMA BÉA TÉKIELSKI par Pat Slade


Mama Béa Tékielski est un sacré personnage, une chanteuse comme on en rencontre plus.




MAMA BÉA ROCKEUSE OU POÈTE ?




On parle surtout des chanteurs rockers-poètes ou à texte mais plus rarement ceux de la gente féminine, pourtant elles aussi ont réussi à se faire une place au soleil même si elles sont un peu plus éclipsées par le succès des hommes. Et pourtant comment oublier des Colette Magny, des Anne Sylvestre, des Catherine Ribeiro, des Brigitte Fontaine, des Juliette, des Sapho ou même des Annabel Buffet que beaucoup de gens connaissent plus comme écrivaine et femme du peintre Bernard Buffet. Puis il y a celles qui se feront un nom mais qui resteront dans l’ombre des autres. Mama Béa, Les quadras s’en souviennent, elle était la  pasionaria des années 70.

Elle est un peu comme Thiéfaine, le succès par le bouche à oreille, elle n'est jamais parvenue à se hisser au panthéon de la chanson française. Pire encore, pour de sombres raisons mercantiles, une grande majorité de sa discographie n'a jamais été rééditée au format numérique. Tekielski…un nom qui ne sonne pas tellement vieux terroir auvergnat, elle est née à Avignon d’une mère fleuriste italienne et d’un père violoniste polonais qui abandonnera sa famille deux ans après la naissance de Mama. Très jeune elle va découvrir la chanson française en écoutant la radio. Mais ce n’est pas «♫♪ S.L.C salut les copains ♪» qu’elle écoute même si nous sommes en pleine période yé-yé, la jeune fille qui chante tout le temps trouve ses références auprès d’Anne Sylvestre, Brel, Brassens, Barbara, Colette Magny, sa préférence pour la chanson à texte est déjà clairement définie.
                                                                       
Mais c’est en découvrant l’œuvre de Léo Ferre qu’elle va se reconnaître. Tous les coups de gueule du chanteur lui serviront de repères, elle deviendra une inconditionnelle, elle aura l’occasion de le rencontrer à plusieurs reprises et de lui rendre hommage à deux occasions, en 1987 grâce à Jean-Louis Foulquier pour «La fête à Léo» au Francofolies et elle enregistrera une interprétation toute personnelle de douze titres de cet artiste dans l'album «Du côté de chez Léo» en 1995 avec une interprétation du titre «Les Anarchistes» où les guitares électriques donnent une autre dimension au morceau .

Elle apparait la première fois à une époque où la télévision émettait en noir et blanc, elle a 19 ans et a abandonné la boutique de fleuriste de sa mère pour monter sur Paris et présenter une chanson qu’elle a écrite. Passons sur le titre «L’idiot du village» et sa prestation mais son interprétation sera un signe que la jeune Avignonnaise a du potentiel. Mama béa, c'est une voix, hors toutes références connues, une voix qui va du rock au blues.

Après un premier album en 1971 «Je cherche un pays…» qui passera inaperçu, la  chanteuse arbore un look à la Julie Driscoll avec des cheveux longs. Elle va  disparaitre des écrans radar pendant cinq ans pour réapparaitre avec l’album «La Folle», l’année suivante c’est «Faudrait rallumer la lumière dans ce foutu compartiment» deux albums mi-live qui créeront la surprise. Elle chante différemment, elle devient une bête de scène moitié rock, moitié blues.  La grande révélation publique se fera en 1978 quand sort son quatrième album «Pour un Bébé Robot» Prix du meilleur disque étranger en Italie, prix de l’association des disquaires de France et surtout le prix de l’académie Charles Cros. 

Léo et Mama Béa
Après un passage remarqué au Printemps de Bourges, elle va assurer sont premier Olympia. S’en suit toute une série d’albums. En 1984 sa voix sera celle  d’Edith Piaf dans le film «Edith et Marcel» de Claude Lelouch.
Le temps de changer de producteur et en 1986 sort «La Différence» avec un titre hallucinant «By’n’By» chanté en duo avec Roberto Piazza plus connu sous le sobriquet de Little Bob. Son dernier enregistrement date de 1998 «Indienne».

A la date d’aujourd’hui, Mama Béa a 74 ans et, je pense, coule une retraite paisible. Dans le journal «Parole et Musique» d’octobre 1984 le journaliste Jean-Pierre Lentin écrira : «Mama Béa c’est Piaf et Janis Joplin dans le même gosier…».

Mama Béa est et reste un auteur à part entière, dont l'univers particulier et inclassable entoure et soutient son propre public.    


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