mardi 4 octobre 2022

Alan STIVELL - E DULENN (1975) - par Pat Slade



Alan Stivell n’a pas fait beaucoup d’album live comme on pourrait le croire et «E Dulenn» est le second.



A. Stivell au pays de la Guinness



E Langonned

Quand on parle d’album live dans la discographie d’Alan Stivell, la première chose qui nous passe par l’esprit c’est «A l’Olympia» en 1972 et pourtant il en enregistrera d’autres, mais pas énormément, très exactement il n’en produira que trois ! Si l’on pense qu’il a enregistré beaucoup d’albums en public, c’est surtout une discographie de collaboration avec divers artistes comme Yves Simon, Kate Bush, Angelo Branduardi et tout le gratin de la musique bretonne comme Glenmor, les sœurs Goadec, Pat O’May ou Nolwenn Leroy. J’avais rédigé une chronique sur son album «Chemin de terre» de 1973 et je voulais en écrire une sur «E Langonned» de 1974, l’album qui sera la fin de l’époque glabre du barde breton et puis par fainéantise, je choisirai la facilité en prenant l’album live a Dublin. Un album très particulier, puisque tout les morceaux qui le composent sont inédits. Beaucoup de musique et très peu de textes. Enregistré deux soir de novembre 1974 au National Stadium de Dublin et mixé au studio Apple à Londres où Alan Stivell sera confronté à la mort de celui qui lui a tout appris, son père Jord Chochevelou.

L’album sort au printemps 1975 et la seule critique que l’on pourra lui faire c’est qu’il est trop court, seulement 34 minutes (L’Olympia en faisait 43 !) mais le temps imparti dans la galette est somptueusement remplis. Le band reste le même, Dan ar Bras, Pascale Stive, Michel Santangeli, René Werneer, Jacky Thomas (On ne change pas une équipe qui gagne !) et le renfort de joueurs d’instruments traditionnels comme Dominique Mollard (Qui joua avec Pat O’May, Gwendal) au bodhràn, Padrig Sicard à la bombarde et au fin whistle et du Bagad Bleimor ou Stivell fit ses première armes.

«Spered Hollvedel» («Esprit universel»)  tout commence par des applaudissements et la basse et l’orgue hammond joue l’intro en fond sonore avant l’arrivée des bombardes et de la guitare de Dan ar Bras. Un thème connu comme le cantique de Sainte Marie de Rostrenen. Le morceau s’enchaine directement sur «Délivrance» écrit pour le concert avec un rythme soutenu et un texte récité en français. Un manifeste que certains verront politique ou nationaliste alors qu’il ne fait que interpeller l’opinion publique pour défendre toutes les cultures opprimées. Même si la plupart des paroles parle de la Bretagne et des pays celtes, le texte reste mondialiste sur le fond. Évidemment, il sera censuré sur les ondes (Giscard d’Estaing ne devait pas aimer la Bretagne !), le fantôme du F.L.B demeurait encore dans toutes les mémoires.  

«Ha kompren't vin erfin?» (« Est-ce qu'on me comprendra enfin ?») La harpe celtique égrène ses arpèges pendant qu’Alan chante un poème traditionnel que l’on pouvait trouver sur l’album «Reflet». «Teñwal eo 'r bed» («Le monde est sombre») Malgré sa musique plutôt joyeuse, cette balade évoque le chômage des jeunes qui souhaitent rester au pays mais avec un happy end évoquant les lendemains où «La liberté fleurira». «Digor eo an hent» («Le chemin est ouvert») un texte de Stivell contre les "bourgeois", l’armée française et Paris, un appel au vent de la révolte. «Debhair an rinceoir / Jig Gwengamp» («Debair le danseur/ Dérobée de Guingamp») une danse irlandaise suivi par un jig breton qui mis le feu dans le public du National Stadium.

Arrivent ensuite deux pachpis (passe-pieds), l’appel à former la ronde avec «Pachpi kozh» («Vieux pachpi») et «Pachpi new’» («pachpi nouveau»). Les cornemuses attaquent le morceau avec le soutien de l’orgue et la flûte irlandaise. Le nouveau pachpi résonne avec des sons plus électriques. «Laridenn ar Frankiz» un traditionnel breton revu et corrigé ou le mot «Frankiz» (liberté) est répété plusieurs fois, suivi juste après par «Mairseal Ó Neil» une danse irlandaise vivement applaudie par le public et scandée au rythme du violon de René Werneer. «Ton-bale Pourled / Haou» un andro traditionnel arrangé en électrique et le second un hanter-dro plus traditionnel. L’andro (en français : la ronde) et l’hanter-dro (en français : demi tour) sont des danses du pays vannetais.  

«Bal ha dañs Plinn» («Bal et danse de Plinn») un morceau très rock avec un gros riff de guitare, une percussion très soutenue et les sonneurs de bombardes qui répondent a ce morceau complètement endiablé. «An droioù» («Les tours») interprété par le Bagad Bleimor accompagné par les spectateurs alors que le barde breton esquissera quelques pas de danse avec quelques jolies rouquines irlandaises comme on peut le voir sur la photo de la pochette.

«E Dulenn» est un très bon album live, pas de «Tri Martolod», de «Suite Sudarmoricaine» et de «An Alarc’h», que de l’inédit et c’est appréciable. L’album sera un succès et restera 43 semaines dans le top albums et atteindra la 5ème position. Il faudra attendre cinq ans pour avoir un nouveau (et dernier) live : «International TourTro Ar Bed».





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