lundi 18 avril 2022

RAVEL – Valses nobles et sentimentales (1911-12) – B. CHAMAYOU (2016) vs E. ANSERMET (1953) – par Claude Toon


- Et bien Claude, tu passes d'un extrême à l'autre… Quelques temps après la thèse sur la cinquième de Mahler, voici une brève avec quelques valses, enfin du Ravel quand même…
- Oui Sonia, Mahler a fait mon malheur… oui, ok, elle est nulle cette blague… j'en suis à la vitamine C limite à piocher dans les amphétamines, donc cette fois-ci, relaxe !
- Il n'a pas composé une autre valse symphonique assez loufoque pour un ballet ? Il y a un rapport avec celle écoutée ce jour ?  
- Exact, un poème chorégraphique daté de 1919, une caricature pour très grand orchestre d'une valse viennoise destinée aux ballets russes de son ami Serge Diaghilev, pour la saison 1920…
- Le pianiste Bertrand Chamayou fait son entrée au Deblocnot. Mais pourquoi Ernest Ansermet, le chef d'orchestre ?
- Ravel a orchestré ses jolies valses, la version d'Ansermet même ancienne est pleine de peps… 


Edouard Degas : Valse à l'opéra

Sonia a raison, avec ses 5500 mots, rédiger la chronique sur la fabuleuse et démesurée 5ème symphonie du compositeur autrichien m'a laissé sur les rotules intellectuelles (bizarre ma morphologie 😊). Ces valses de Ravel ne justifient pas une analyse poussée à l'inverse de la symphonie dont on ne parle pas en dix lignes… Sinon autant proposer un lien vers un commentaire riquiqui sur Amazon ou vers les articles sur Wikipédia pas toujours très travaillés pour cette œuvre (en langue française). Ce qui n'est pas le cas pour cette suite pittoresque de valses pour piano écrites en 1911 et orchestrées en 1912. Na !

Tous les compositeurs ont composé des valses. Et pas uniquement la famille Strauss (Josef, Johann I et II et quelques outsiders). Citons Chopin et Schubert pour le piano seul, celles de Tchaïkovski dans ses ballets, la Valse Triste de Sibelius, etc. Une liste sans fin ; et justement un article de Wikipédia qui nous propose une liste exhaustive (Clic).

Tiens, à propos, dans le scherzo de la 5ème de Mahler, on entend des motifs de valses… Un Scherzo étant quasi systématiquement battu à trois temps, le rythme permet cette fantaisie.

Pourquoi cette fascination pour la valse de la part de nos grands compositeurs ? Je ne sais pas. 


Renoir : Danse à Bougival
Renoir : Danse

Qui ne connaît pas la valse ? J'enfonce quelques portes ouvertes. Cette danse fermée (couple fusionnel, voir très resserré 😊) trouve ses origines vers le XIVème siècle en Allemagne-Autriche. Une danse plutôt populaire à trois temps mais aussi à 5, 8 et 11 temps pour les pros… Jacques Brel imagine une valse à 1000 temps… Au début du siècle des lumières, bourgeoisie et noblesse s'emparent de la valse qui connaîtra ses plus grandes heures de gloire à Vienne pendant le règne de la famille Strauss. Oui le beau Danube bleu est difficile à danser, non pas techniquement mais par sa durée et son tempo très chaotique… Pour la petite histoire, je l'ai dansé (étant un piètre danseur) avec Maggy car je connais par cœur la partition immortalisée par Kubrick dans le film 2001. Hé hé, pour une fois que ma mélomaniaquerie m'est utile ; on susurre dans l'oreille de sa chérie une mesure avant chaque rupture de tempo "plus vite", "moins vite", "à droite", "à gauche". Essayez, c'est un super moment car comme je l'écrivais en 2011, cette valse est un petit poème symphonique génial.

- Dis Claude, on essaye, je danse pas mal, mais je n'ai pas ta mémoire musicale ?
- Oh oui, bonne idée, pousse les chaises, je sors le CD de Kleiber, celui du concert du nouvel an…

Donc la valse est un genre musical assez codifié mais à la fois populaire (valse musette) ou guindé (Valse viennoise), et c'est peut-être cette universalité qui passionnait Ravel. Schubert avait déjà écrit ce genre de valses portant des titres analogues : 34 valses sentimentales D779 et 12 valses nobles D 969, donc plutôt des œuvrettes de fin de carrière à voir les numéros de catalogue. Ravel a-t-il été inspiré par son illustre ancêtre romantique en fusionnant nobles et sentimentales ? Une idée pour une autre chronique estivale… à suivre !

La suite comporte huit valses. Comme la plupart des compositeurs de l'époque, les notations de tempo à l'italienne sont remplacées par des indications plus subjectives. Dans ces pièces charmantes, la fantaisie joute avec la galanterie, après tout la valse séduit autant les danseurs des guinguettes que ceux des salons mondains…

[0:00]

1.   Modéré – très franc

[6:18]

5.   Presque lent – dans un sentiment intime

[1:17]

2.   Assez lent – avec une expression intense

[7:38]

6.   Vif

[3:47]

3.   Modéré

[8:18]

7.   Moins vif

[5:05]

4.   Assez animé

[10:42]

8.   Épilogue : lent

Avec quatre Victoires de la musique Classique, Bertrand Chamayou né en 1981 est l'un de nos plus attachants pianistes virtuoses français. Son répertoire est assez traditionnel mais je réfléchis à un autre article hors de ce billet que je veux vraiment court, pour une fois…

Si l'interprétation d'Ernest Ansermet avec son orchestre de la Suisse Romande porte son âge sur le plan technique, bon sang quelle énergie sonore… La première valse sous sa baguette préfigure le delirium orchestral du ballet de 1920… 



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