mercredi 29 septembre 2021

SCORPIONS "Virgin Killer" (1976), By Virgin Bruno


Pochette de substitution la plus courante
(récupération de la séance photo pour le verso de l'album)


Interdit aux moins de 21 ans !
Attention, cet article a été précédemment censuré.
Avant de poursuivre, vous devez confirmer que vous avez plus de 21 ans, dans le cas contraire,

nous vous prions de ne pas poursuivre la lecture de cette maladroite bafouille
(Si avec ça on n'est pas couvert...)

     Aujourd'hui encore, "Virgin Killer" se distingue par sa pochette polémique, de mauvais goût, maintes fois censurée. Même pour les rééditions. Ainsi que pour les humbles et innocents bloggers qui osent publier la pochette originale. Crime hautement réprimandable et passible de bannissement immédiat de la toile, Ainsi, cet article a été précédemment la cible d'une censure impitoyable dès l'insertion de l'image maudite. Une sentence radicale et sans sommation. Même Wikipedia en avait fait jadis les frais. Va pour que Miley Cyrus chevauche un pénis géant devant un parterre d'adolescents émoustillés, se produise pratiquement nue attifée d'un god de cheval ou se caresse sur scène, mais une pochette de disque présentant une très jeune fille nue, ha ça non. On se s'étendra pas davantage sur les photos pour le moins douteuses de jeunes filles de David Hamilton. C'est de l'art, rétorquait-on à l'époque où l'on encensait son travail.

Autre image choquante

     Le pire c'est que cela a totalement échappé au contrôle du groupe. La chanson éponyme ne parle même pas d'un quelconque serial-killer "tueur de vierge". Tout vient d'un cadre de RCA Allemagne qui, en se basant seulement sur le titre de l'album (proposé par Rudolf Schenker), décide de réaliser une photo provocatrice, afin de créer un controverse dans le but avoué de générer une publicité gratuite. Grossière erreur. Bon nombre de pays refusent de distribuer l'album en l'état - d'où la sortie dans la précipitation de pochettes ridicules et un report de livraison coûteux. Dieter Dierks raconte avoir fait le déplacement aux USA, fier de l'album en poche ; mais à la vue de la dite pochette, le ponte de RCA qui le reçut, se leva et le laissa en plan, lui disant simplement "you make my day". On imagine aussi le désarroi d'Uli Jon Roth, auteur de la chanson. Unanimement, la formation se retourna, mais en vain, contre le label. Pour pallier le mauvais goût de cette photo, plusieurs autre pochettes seront imprimées dans l'urgence, avec un point commun : la banalité et la totale absence d'élan créatif. Parfois, certains pays adoptent un cellophane noire ou une sur-pochette en papier kraft pour cacher la pochette honteuse. (méthode déjà utilisée auparavant et reprise ironiquement par Alice Cooper pour son "Muscle of Love"). La pochette et sa fille prépubère a le mérite d'être souvent classée, sinon mentionnée, dans les pires pochettes de disques. Pourtant, franchement, si effectivement RCA a fait une bévue, il y a bien pire et réprimandable. Dès la décennie suivante, les groupes et labels vont se lâcher, rivalisant pour présenter la pochette d'album la plus choquante. Étonnamment scènes de massacres, de démembrement, de viols, de cannibalisme, de torture, parfois extrêmement sexistes, ne posent par contre aucun problème à la censure.

     Bref.... Après un album magistral, "In Trance", qui leur permet enfin de se produire hors des frontières allemandes, notamment dans la chauvine Angleterre, mais aussi au Japon, les venimeux Teutons se doivent de confirmer. Avec l'aide du producteur Dieter Dierks, ils s'enferment en studio et accouchent d'un nouvel opus. Judicieusement, cette quatrième réalisation a le bon ton de ne pas appliquer les recettes du précédent, tout en affirmant le son singulier du groupe. En dépit de Dierks, qui a tendance à orienter la formation vers des structures plus carrées, plus faciles d'accès, voire dans une certaine mesure, commerciales, ce "Virgin Killer" laisse exploser son versant Heavy-metal. Et si ce "Virgin Killer" n'a pas la prestance de son prédécesseur, il n'en demeure pas moins une nouvelle et franche réussite. L'album a ses (h)ardents défenseurs dont certains le placent sur le podium. Les Scorpions affirment leur facette Heavy-metal et même Roth pond d'incandescents brûlots qui vont profondément marquer tout une génération. Dont une partie va faire les titres de la presse musicale de la décennie suivante, Edward Van Halen y compris.


   Les festivités débutent sur "Pictured Life", morceau carré de Heavy-metal propice aux stades, légèrement tempérés par le lyrisme de Klaus Meine, préfigurant le Metal des années 80. Ou plutôt, largement pompé - sans nécessairement avec réussite -. Un classique de l'"ère Roth", indéboulonnable du répertoire scénique jusqu'au départ du "Hendrix Allemand". "Catch Your Train" déboule sans sommations. Véritable ramponeau, ce titre à la fois abrasif et particulièrement percutant, est une agression sonique faisant passer Black Sabbath pour de placides hippies. Klaus Meine s'y arrache les cordes vocales comme jamais - à croire qu'il avait contracté une angine, à moins que simplement, le tour de chant ait été enregistré après une longue soirée copieusement arrosée 😁 - tandis que le duo rythmique Lenners-Buccholz adopte le monde Panzer blitzkrieg, pied au plancher. Là-dessus, Roth n'est plus Roth. Il est le Silver Surfer. Un Silver Surfer équipé d'une Fender Stratocaster blanche. Soudé à sa planche, trouant orages et tempêtes, esquivant monts enneigés et gratte-ciels, grisé par la vitesse et le défilement des paysages, il transmet l'énergie cosmique à sa Strato blanche. Ainsi chargée et irradiant d'énergie, elle envoie de toutes parts des rafales de notes flamboyantes.

   Après deux salves offensives, la ballade "In Your Park" arrive telle une douche froide. En dépit des aptitudes de Scorpions à composer des slows faisant encore école, celle-ci est loin de se hisser au niveau de celles qui vont largement contribuer à la renommé du groupe - et à leur fortune -. Ou même des précédentes d'ailleurs. Heureusement que "Backstage Queen", ode aux groupies, vient remettre les pendules à l'heure. Un bon morceau d'entrain, Heavy-metal vaguement Rock'n'roll où Roth temporise la rudesse du riff en power-chords par des licks funky et quelques soli lumineux, tandis que Meine imite John Lawton. Un autre classique du répertoire scénique.

Roth au Marquee, London, 1976

     Arrive le fameux "Virgin Killer", véritable dérouillage de Heavy-metôl. Roth mitraille à tour de bras, tel un Pacino-Montana-Capone enfariné et vénère, alors qu'une fois encore, Meine s'écorche les cordes vocales, frôlant l'extinction de voix. A l'origine, Roth avait voulu pasticher le groupe Kiss, ainsi que son chanteur Paul Stanley, avec qui ils avaient tourné aux USA. Cependant, Meine trouva cela suffisamment bon pour l'exploiter et encourager Roth à en faire une version définitive ; bien plus agressive que la musique du quatuor grimé New-yorkais. A savoir que le "virgin killer" est une métaphore sur l'incessant écoulement du temps, ainsi que sur la société qui aveugle les hommes, piétine les âmes. "Pleurez pour vous échapper ; échappez vous, c'est si dur de s'enfuir... Morts à l'écran, magazines sadiques, attention aux suicides journaliers, moyens politiques... Vous ne pouvez pas trouver de nouveaux moyens, mais c'est un tueur de vierges... Des bombes atomiques dans vos rêves. Regardez les requins sur les photos... Essayez de vous en éloigner car c'est un tueur de vierges"

     Ulrich Roth encore, plus que jamais à l'honneur - c'est l'album comportant le plus de titres portant sa seule signature - envoie du lourd avec un "Hell-Cat" tout droit sorti de l'univers de son héros, Jimi Hendrix. (pour ceux qui auraient encore des doutes). Il enfonce le clou avec le somptueux "Polar Nights" qui va prendre toute sa dimension en concert. Ce qu'atteste le faramineux double live "Tokyo Tapes". Du Heavy-funk forgé dans le cœur de quelques volcans colériques. Derrière une rythmique souple, Roth arrache, par de larges coups de vibrato, des larmes acides à sa blanche Stratocaster. La magnificence de son jeu, excuse son chant plutôt passable, anémié et mal assuré.


   Mais auparavant, le duo Schenker-Meine offre un beau moment torturé, aux ambiances fantomatiques et légèrement oniriques. "Crying Days", dernier sursaut aux saveurs purement 70's, débute comme une ballade angoissée avant de prendre son envol sur un robuste Hard-rock, sans se départir d'une sensation navrée et désabusée, attristée. Francis Buccholz développe ici un jeu à la fois puissant et sensible, en décalage par rapport aux guitares qui ne sont alors qu'un décorum. "Beaucoup de choses ne sont que mensonges. Ce monde qu'on aime s'écroule dans la douleur, avec de la haine et des jeux sanglants".

   L'album se termine sur un "Yellow Raven" aux parfums contemplatifs, - tapis d'orient, chichas et encens - où Ulrich Roth reprend ses apparats de hippie vagabond, partant à l'aveuglette à la recherche d'une liberté, voire d'une nouvelle réalité ou vérité. Sa Strato se morfond ; théâtrale, elle glapit comme un animal perdu. 

     C'est probablement l'album des Scorp. le plus marqué par la présence d'Uli Jon Roth. Sa guitare copieusement influencée par Hendrix est judicieusement mise en avant, habillant l'ensemble sans se montrer envahissante. Contrastant franchement avec la flying V de Rudolf Schenker nettement plus carrée et lourde, elle va bien au-delà de la simple enluminure, donnant du sens et de la profondeur aux chansons. En faisant chanter sa guitare, modulant et étirant ses notes par une utilisation savante et maîtrisée du vibrato, il établit des atmosphères que le duo Meine & Schenker ne parviendront pas à retrouver. Ou ne chercherons pas.

     C'est le dernier disque avec Rudy Lenners, le batteur Belge qui avait succédé à Jörgen Rosenthal en 1975 et que certains n'ont pas hésité à longtemps considérer comme le meilleur batteur qu'ait connu le groupe. Malgré un succès croissant, notamment au Japon, à cause de divergence musicale, Lenners préfère quitter les Allemands et retourner au plat pays qui est le sien. Bien que désormais absent de tous médias, il n'abandonne pas la musique. Il joue dans divers groupe, donne des cours de batterie, et aide de jeunes formations à se préparer à affronter les obstacles. Il fera aussi office de manager pour le groupe français Snaked. Jamais plus il n'approchera un succès équivalent à celui de Scorpions (même si à l'époque, en 1976, il était encore modeste).


Side one
No.Titre
durée
1."Pictured Life"K. Meine, U. Roth, R. Schenker3:21
2."Catch Your Train"Meine, Schenker3:32
3."In Your Park"Meine, Schenker3:39
4."Backstage Queen"Meine, Schenker3:10
5."Virgin Killer"U. Roth3:41
Side two
No.Titre
durée
6."Hell-Cat"U. Roth2:54
7."Crying Days"Meine, Schenker4:36
8."Polar Nights"Roth5:04
9."Yellow Raven"Roth4:58



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6 commentaires:

  1. J'ai vu que le blog Heavy Music était désactivé, c'est voulu ? Blogger avait désactivé Ranx il y a quelques semaines et j'avais dû leur faire une demande pour le récupérer. Alors je me demande si c'est ton cas aussi.
    Et sinon, pour Scorpions on est raccord, la période Uli Roth est inégalable. Son Fire Wind en solo (en trio, en fait)) est excellent aussi et Earthquake n'est pas si mal.
    Et je trouve très bien la pochette originale de Virgin Killer.

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    1. Ils m'ont blacklisté, oblitéré, effacé, gommé, sans aucune forme de procès 😁. Et cela, dès que j'ai inclus l'image de la pochette originale. Coupable d'avoir pris une photo sur le net d'un album de 1976... M'enfin ! J'ai continué à taper ma p'tite chronique comme si de rien n'était. Et finalement, l'article a été simplement supprimé ; ça ne rigole pas 😮. Internet, un espace de libre échange et de liberté ?

      Oui, "Fire Wind", quel disque ! Quel dommage qu'Uli Jon Roth s'évertue à chanter.

      Par contre, j'ai toujours trouvé cette pochette déplacée. Scorpions n'avaient pas besoin de faire le buzz pour convaincre. Certes, parfois ça marche mais ça reste une lame à double tranchant. Par contre je pense que la pochette d' "In Trance" a fait son effet et incité les curieux à y prêter une oreille. "In Trance", avec pourtant le même photographe, avait réussi à allier une forme d'érotisme chic avec une petite pointe de provoc sans que cela soit choquant. (la réédition Axe Killer offrait un poster d' "In Trance")
      Et dire que l'année suivante, c'est la pochette de "Taken by Force" qui a été unanimement censurée. Juste parce que deux silhouettes s'affrontent en duel dans un cimetière militaire...

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    2. Le monde rêvé des algorithmes ))) Peut être que tu peux récupérer le blog en faisant une demande auprès de blogger. Quand c'est arrivé à Ranx, j'avais eu cette possibilité et le blog avait été rétabli sitôt après.

      La pochette de Virgin Killer, je pense que les Scorpions ont juste trouvé qu'elle illustrait bien le titre. Ce n'était pas tellement provocateur pour l'époque, la nudité des naïades n'avait pas la même consonnance qu'elle a eu par la suite. Blind Faith avait fait ça avant, le film de Louis Malle, La Petite avec Brooke Shield, a cartonné en faisant ça après. C'était dans l'air du temps.
      Je suis quand même d'accord, la pochette de In Trance est plus belle.
      Celle de Taken By Force, c'est sans doute pour séduire le marché américain qu'elle a été modifiée, ils n'aiment déjà pas trop tout ce qui détourne l'imagerie religieuse, alors quand en plus des jeunes jouent à se tirer dessus au milieu des tombes... Le Vietnam était encore trop présent à l'esprit.

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    3. Ouaip, mais à l'époque l'édition française avait également censuré la pochette de "Taken by Force" (je n'ai d'ailleurs connu l'original que récemment, avec les rééditions DeLuxe). Mais pas "Virgin".
      Par contre, si je conçois la censure de "Virgin", celle de Blind Faith me surprend. Si je n'avais pas lu que l'avion avait une forme trop bien aérodynamique pour que cela soit innocent, je n'aurais peut-être jamais saisi la plausible allusion. Non mais, il faut aller les chercher, non ? Bref, à mon sens, c'est à lier avec les tests de Rorschach 😁 Par sûr que ceux qui voient le mal, le péché partout, soient eux-mêmes innocents. Du moins dans leur tête 😊

      Brooke Shield, la fiancé de Michael ?

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    4. Celle-là même qui dès son plus jeune âge, avant le film de Louis Malle, avait donné dans le sulfureux en posant pour des clichés qui dorénavant s'échangent dans les ventes aux enchères pour des sommes mirobolantes. Pas de bol pour elle, lorsqu'il a fallu redorer son blason peu virginal, d'avoir choisi Michael Jackson )))

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    5. Ne connaissant pas ce film, "La Petite", je suis allé chercher quelques extraits sur Youteubé... 😮
      En fait, un seul m'a suffit ; à mon sens c'est franchement immoral et pervers. Et ça a fait un carton ???

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