mardi 24 août 2021

NIKITA MANDRIKA (1940-2021) RIP - hommage par Pat Slade


La culture potagère est en deuil, celui qui avait mis en avant le légume dans la bande dessinée est parti bouffer les pissenlits par la racine.




Mandrika, l’ami des potes âgés




Encore un monsieur de la BD qui part. Il a rejoint ses potes de l’Écho des Savanes Marcel Gotlib et Claire Bretécher. Comme beaucoup de personnes de ma génération, Mandrika s’est fait connaitre dans les journaux Vaillant et Pif Gadget et surtout avec un personnage emblématique : Le concombre masqué. A croire que le dessinateur ne s’était fait connaitre qu’avec l’histoire d’un légume portant un masque de Zorro. Mandrika était un personnage singulier, il était né en Tunisie d’une famille d'exilés russes et de parents qui ont fui les bolcheviks et c’est alors qu’il est encore enfant en Tunisie française qu’il va réaliser entièrement à la main des fanzines qui seront vendues par son épicier. Une fois installé en France, il fera des études cinématographiques pour finalement se tourner ver la BD.

C’est en 1965 que paraissent ses premières planches dans le journal Vaillant et son successeur Pif gadget sous le pseudonyme de Kalkus. Le concombre masqué est l’œuvre principale de Mandrika, l’histoire d’un légume bavard et philosophe (Pour moi ce sont les poules qui philosophent !) et qui évolue dans un monde plutôt absurde, il habite dans un cactus-blockhaus entouré de personnages qui sortent de l’ordinaire et des sentiers battus. Chourave, son seul ami, des éléphants qui jouent aux cartes, un escargot qui va aussi vite que Speedy Gonzales, la grand-mère du concombre, la seule personne normale et sensée dans l’histoire, et enfin pour compléter le bestiaire : l’ennemi juré du héros, le Grand Patatoseur qui possède un engin infernal capable de transformer en patate tous ceux qui le contestent. Rajouter un dialogue ridicule à la limite du compréhensible et le concombre masqué entrera dans la légende de la bande dessiné.

Après Pif Gadget, Mandrika rentrera en 1967 à Pilote (Mâtin ! Quel Journal !), mais en 1972 René Goscinny va lui refuser un planche «décalé» de la cucurbitacée. N’acceptant pas la censure, il fondera la même année avec Marcel Gotlib et Claire Bretécher L’Écho des Savanes le  premier journal indépendant et underground ou les dessinateurs font ce qu’ils veulent dans une parfaite liberté. Dans la foulée, il va créer les Éditions du Fromage ou des auteurs comme Pétillon, Martin Veyron, Moebius et même les premières BD américaine traduite de Wallace Wood (Sally Forth) et Robert Crumb (Mr.Natural) y seront éditées.

Il ouvrira les portes à beaucoup de jeunes dessinateurs comme Carali ou Francis Masse. Il quittera la rédaction de L’Écho pour prendre celle de Charlie mensuel jusqu’en 1984 avant de retourner chez Pilote en tant que directeur de la rédaction. Dans les années 90 il reprendra les aventures du concombre dans le journal de Spirou. En 1994 il recevra le grand prix de la ville d’Angoulême. 

Dans la nuit du 13 au14 juin 2021, cet homme qui n’avait pas du sang de navet, qui s’occupait que de ses oignons et n’avait jamais fait chou blanc à raconter des salades dans des feuilles de choux pour mettre du beurre dans les épinards en a eu gros sur la patate de sucrer les fraises et, faute de panier à salade, prendra la trottinette à macchabs


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire