C’est dimanche. Sonia rentre de son footing matinal en nage et en retard.
Elle dit à Nema :
- Tu ne devineras jamais ce que j’ai dû faire ce matin !
- Tu as couru pour rattraper le chien Toby de la voisine, qui s’était
sauvé dans le parc ? Et elle ne t’a pas remerciée ?
- Trop forte Nema, juste le chien ne s’appelle pas Toby mais Titan (quel
nom pour un chihuahua entre nous…)
- Ton footing au parc Sonia, ça m’a fait penser à un très beau roman
policier que j’ai lu il y peu de temps et il y avait un chien Toby dans
l’histoire. Le héros n’arrête pas de faire du footing…
Eduardo Mendoza |
Mademoiselle Baxter
n’est pas l’héroïne du roman. Le héros, si on peut dire, c’est celui qui
raconte et qu’on va appeler
JE (il n’a pas de nom). Héros ou
plus exactement celui qui, à travers moult péripéties, tente de se sortir
d’un pétrin incroyable dans lequel il est tombé, il ne sait même pas
comment. JE a l’air d’un petit
gars paumé mais il a quand même un talent de détective, ça on peut le dire.
Et une opiniâtreté digne d’un
Nestor Burma.
Sauf que lui, c’est Barcelone qu’il connait comme sa poche et pas Paris.
JE
est livreur de plats pour un restaurant chinois. On commence comme ça, mais
en fait il y a deux temps dans cette histoire : un temps avant, années 80,
pendant lequel
Mademoiselle Baxter sera
assassinée, et un temps après (environ 30 ans plus tard) où on finira par
comprendre qu’en fait on n’avait rien compris aux évènements : ni
JE, ni nous les lecteurs. Donc au début, la rencontre avec un chien replonge
JE très vite dans le passé.
Quand il était jeune, JE a eu
affaire à l’horrible
commissaire Flores, mais sans que l’on sache trop pourquoi, il lui aurait semble-t-il rendu
services. Or il se trouve qu’il doive encore rendre un service, sous peine
d’emprisonnement : retrouver un certain
chien Toby, appartenant à une famille extrêmement fortunée. Bon.
JE retrouve le chien et le
rapporte mais en fait tout le monde s’en fout du
chien Toby. Mince, c’est quoi ce sac de nœuds ? D’autant que les flics l’attendent à
la sortie de la maison du
chien Toby. Et voilà, JE se trouve
informé du meurtre d’un mannequin,
Mademoiselle Olga Baxter, meurtre qu’il aurait commis. Lui ? Le
commissaire Flores en semble
persuadé, le lieutenant Asmarats, un peu moins. Non mais ça va pas ? Pour
JE, le commissaire Flores n’est
pas le plus intègre des policiers de la ville, loin de là.
JE se sauve et sa course à la
vérité sur ce meurtre commence car il veut se disculper de tout soupçon.
Téléphérique de Barcelone |
On quitte les quartiers chics pour une zone nettement moins reluisante.
JE a une sœur
Candida, myope comme une taupe et pas très futée, mais serviable et qui vit avec
une extravagante
Mademoiselle Westinghouse, un militaire devenue travestie. Et
Mlle Westinghouse décide d’aider
JE à comprendre qui a bien pu
tuer cette pauvre apprentie mannequin. Il y aura planque devant l’immeuble
où habitait Olga Baxter, rencontre avec le concierge (sous prétexte
de préparer un reportage pour la TV…), découverte de quelques habitudes un
peu bizarres de ladite Olga… Et puis il faudra aller au restaurant Casa
Cecilia, spécialités de la Rioja. Je vous préviens, malgré un nom alléchant,
cher lecteur vous n’aurez guère faim après la description de l’établissement
et de ce qui se passe en cuisine. Bien qu’il se prétende grand chef de
cuisine là où il habite (c’est un voisin de feu
Mademoiselle Baxter), Monsieur Larramendi qui
travaille pour Cecilia, n’a que très peu de compétences et son activité dans la cuisine est des
plus basiques (lavage de calamars). Mais c’est un personnage clé dans toute
cette affaire.
JE
investigue, avec en plus de la chère
Mlle Westinghouse, sa bande de copines. Très utile pour arriver finalement à lire un message
mystérieux écrit à l’encre invisible. Très utile aussi le concours du patron
de la boutique de corsets Munoz (spécialiste des grandes tailles), car il est
en quelque sorte la mémoire de ce que peuvent cacher certaines grandes
familles de Barcelone qui se regroupent en associations secrètes…
Mais contrairement à toute attente, quelqu’un fait une déclaration à la
police : «
C’est moi l’assassin
(je ne vous dis pas qui bien sûr)
car je l’aimais et j’étais jaloux
». Bref le baratin habituel. Bon. Cela paraît un peu bizarre à
JE mais au moins il n’est plus
poursuivi. En gros fin de la première période.
Trente ans plus tard. Bizarres coïncidences, un chien passe par là. On
repart à travers la ville. Un peu moins vite et surtout en transports en
commun. JE livre donc des plats
pour le restaurant chinois qui l’emploie. Il retourne voir
Candida, puis il fait un tour à la Casa Cecilia.
JE retrouve
Mademoiselle Westinghouse, devenu colonel en retraite. Et à force de courir pour livrer ses fameux
plats (je ne vous conseillerai pas d’en manger) il va tomber par hasard
sur…
Ah oui quand même ! Surprenant dénouement de ce récit échevelé où la vérité
n’est donc pas là où on la croyait. Très, très pétillant, farfelu, haut en
couleur… Ibérique non ?
Eduardo Mendoza
est né en 1943 à Barcelone. Ecrivain important et promoteur de Barcelone, il
a reçu en
2016 le prix Cervantès pour
l’ensemble de son œuvre, prix attribué par le Ministre espagnol de la
culture pour un auteur de langue espagnole.
Bonne lecture !
Editions du Seuil, Roman
281 pages
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