On ne le dira jamais assez, mais les sixties sont au rock moderne ce que le big bang est à la terre, un moment fondateur. Nous sommes à la veille du Zénith de ce grand déferlement, en 1963, dernière année où un groupe de doo woop comme Danny and the Memories peut prétendre à la gloire. Le style est déjà loin de son âge d’or, et il sera balayé par la british invasion dans quelques mois, laissant ses derniers représentants en rade.
Là, le groupe cherche sa voie dans de longues improvisations, laissant ainsi l’air du temps prendre possession de ses instruments. Au fil des improvisations, un folk rock puissant et planant se met en place. Après quelques mois de silence, cette nouvelle personnalité est immortalisée sur un album. Le groupe a encore changé de nom pour The Rocket. Le disque qu’ils sortent ne se vend qu’à 5000 exemplaires, mais Neil Young fait partie de ces 5000 auditeurs. L’homme est déjà un demi-dieu, le Buffalo Springfield ayant atteint une notoriété comparable à celle des Byrds. D’ailleurs, une rumeur annonce déjà que le Loner s’apprête à former un supergroupe avec David Crosby et Graham Nash.
Pour l’heure, Neil Young cherche surtout à faire décoller une carrière solo mal entamée. Enregistré à la va vite, son premier disque souffre d’une production catastrophique, malgré la beauté de ses mélodies. Il rejoint donc The Rocket, et trouve son nouveau souffle en improvisant avec ces amoureux d’une nouvelle simplicité folk. Le résultat sera « Everybody know this is nowhere », sorti sous le nom « Neil Young and Crazy Horse ». Le Loner a offert au groupe son nom définitif, et lui a offert le classique qui lui permet d’entrer dans l’histoire. Mais le canadien est aussi versatile que les tendances de son époque, et sa collaboration avec le Crazy Horse est un projet qu’il ressuscite au gré de ses envies.
La formation enregistre, en 1970, ce « Crazy Horse » une perle lumineuse que le temps a malheureusement oublié. « Gone Dead train » creuse le sillon du country rock popularisé par The Band. D’abord vue comme la musique d’une Amérique raciste, la country devient le nouveau jouet d’une génération de musiciens qui est revenue de ses voyages acides.
« Gone Dead train » rejoint les rangs d’une série de « beauté américaine », comme l’avait nommé le Grateful Dead sur son album du même nom. Puis vient la somptuosité cachée derrière l’apparente simplicité d’un folk pas si basique. Les chœurs s’envolent alors sur des bluettes qui volent vers les mêmes sommets que les homélies hippies de Crosby Still and Nash. Une force rythmique vient tout de même affirmer la vraie grandeur de ce groupe, c’est la guitare binaire de Danny Whitten. Ses riffs dansent sur la mélodie, marquant des rythmes nourris aux mamelles du rock et de la country. Sur « Crow Jane Lady », il développe une beauté poussiéreuse que l’on croyait réservée à Brian Robbertson.
Crazy Horse est avant tout
un groupe de rock, accroché à ses rythmes, qui sont autant de solides racines à
partir desquelles sa splendeur croît. A l’origine de son apparente simplicité,
ses rythmes lui permettent de transformer « Dowtown » en hymne binaire.
« Crazy Horse » sort en 1970 et obtient un succès d’estime aux Etats Unis. Le groupe voit enfin le bout du tunnel, mais Danny Whitten est rongé par sa dépendance à l’héroïne. Alors que le groupe est en tournée avec Neil Young, en 1972, le guitariste utilise le cachet de son dernier concert pour se procurer la dose qui lui sera fatal.
Le Loner sort « Tonight the night » pour lui rendre hommage. Mais le véritable chant du cygne de ce grand guitariste se trouve ici, sur ce disque aussi varié que direct.
💬 à demain, avec le dernier film d'Albert Dupontel
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