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Exemple
ici avec la bicoque de Panama, « quatre planches, une porte au milieu et un
toit au-dessus ». C’est un bar, un rade, un
honkytonk, qui se dresse dans un endroit improbable, au bout de la jetée du port
du Havre, une bicoque imaginée par le décorateur Alexandre Trauner qui
représente un ilot de liberté pour ceux qui y pénètrent. Quand Marcel Carné la
filme de loin, c’est comme une apparition dans le brouillard, un rêve, un truc hors
du temps, qui ne peut pas réellement exister. Poétique. Son gérant, Panama, costard
et chapeau blanc, en vend la beauté en montrant le baromètre au mur dont l’aiguille
est clouée sur beau temps : « Ici, y’a pas de brouillard ».
La
baraque me fait toujours penser à celle qu’habite Chaplin dans LES TEMPS
MODERNES (1936). Jean a ce côté vagabond, anar, qui vit hors système. Si vous
rajoutez le chien qui le suit tout le film, que Jean finit par adopter, ce même
cleps aux poils blancs et noirs vu dans UNE VIE DE CHIEN (1918), le compte y est.
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La
séquence chez Panama est très longue, presque 25 minutes, mais cristallise tous
les enjeux, et tous les protagonistes vont s’y croiser. Il y a Michel Krauss
(Robert Le Vigan, acteur génial) un peintre désabusé qui pense au suicide. « Je
peins les choses cachées derrière les choses, pour moi un nageur est déjà un
noyé » dira-t-il. C’est gai. On entend aussi « nature morte », « peinture
au couteau »… Les dialogues sont de Jacques Prévert, et ça pétarade de
répliques cultes.
Et puis l’apparition presque irréelle de Nelly (Michèle Morgan) avec son béret et son imper mastic. Lauren Baccall avant l’heure. Film Noir toujours… La scène est géniale, elle debout, prostrée, inquiète, mélancolique à sa fenêtre devant un horizon bouché par la nuit, la brume, les nuages. Le pessimisme de l’époque. Et Jean assis à table à manger du saucisson. Gabin bouffe toujours dans ses films, découpant au canif un bout de lard, une miche de pain. On le regarderait pendant des heures. Plus tard on les retrouvera assis dans le port du Havre, promenade bucolique dans un décor de fin du monde. C’est gai.
Et puis l’apparition presque irréelle de Nelly (Michèle Morgan) avec son béret et son imper mastic. Lauren Baccall avant l’heure. Film Noir toujours… La scène est géniale, elle debout, prostrée, inquiète, mélancolique à sa fenêtre devant un horizon bouché par la nuit, la brume, les nuages. Le pessimisme de l’époque. Et Jean assis à table à manger du saucisson. Gabin bouffe toujours dans ses films, découpant au canif un bout de lard, une miche de pain. On le regarderait pendant des heures. Plus tard on les retrouvera assis dans le port du Havre, promenade bucolique dans un décor de fin du monde. C’est gai.
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Donc
résumons. Lucien veut tuer Zabel qu’il soupçonne avoir tué Maurice, un gars de
sa bande, amoureux de Nelly. Zabel, commerçant en apparence honnête, garde
sous sa coupe Nelly. Qui pense s’en
sortir avec l’aide de Jean. Jean est amoureux mais déserteur, donc souhaite
quitter au plus vite le pays. Lucien, humilié par Jean, cherche à se venger. C’est
gai.
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Et
si on causait cinéma ? Marcel Carné faisait le découpage technique de ses films. C’est
même inscrit au générique, ce qui est rare. Parmi les très beaux plans, l’entrée
de Lucien et ses sbires dans la boutique de Zabel, un travelling arrière
rapide, à travers la vitre de la porte, et recadrage en panoramique une fois
les personnages rentrés. Ou ce plan génial, dans le troquet Au rendez-vous de la Marine : la
caméra cadre au bar un clochard, puis est emportée par le mouvement d’un
serveur vers la salle adjacente où est attablé Jean. Petite étude de cas :
le plan ne coupe pas, le travelling relie les deux hommes. Pourquoi ? Jean
a pris l’identité d’un autre et le clochard est le seul susceptible de le
savoir. Relier les deux personnages en temps réel crée la tension, le suspens, car il
suffirait que le clochard voie Jean pour qu’il soit démasqué. Puis le
travelling repart en sens inverse, en suivant un client qui sort, revenant au
bar.
Les
dernières scènes dans la boutique de Zabel sont elles aussi millimétrées. Ce
plan de Nelly remontant de la cave, filmée en contre-plongée à travers les
escaliers. Un point de vue étrange. Sauf que justement, Nelly voit au travers des
lattes de l’escalier la preuve que Zabel a tué Maurice. La caméra épouse donc le
point de vue de l’indice, des boutons de manchettes. Génial ! La
composition des cadres et l’invention des mouvements de caméra est souvent
remarquable chez Marcel Carné. D'après Prévert, Carné ne savait pas écrire une histoire mais savait comment la filmer. Voir LES ENFANTS DU PARADIS, où on décèle quelques
fulgurances de mise en scène.
Le
dernier plan est superbe. Destin contrarié, la rade du port filmée de loin,
le cargo qui part vers l’Amérique du sud, reste à savoir qui est à bord… LE QUAI
DES BRUMES est un classique rangé dans l’armoire avec des boules
de naphtaline, le patrimoine bal bla bla… Mais ce qu’on sait moins, c’est que c’est
un putain de bon film !
**
Le film devait être tourné dans le port d’Hambourg, en Allemagne, mais le
gouvernement nazi n’a pas validé le scénario. Le Havre permettait de profiter
des premiers manèges d’auto-tamponneuses, inexistants pas à Paris à l’époque.
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La semaine prochaine :
- un huis-clos d'époque très contemporain
- un film féminin, mais vraiment
- l'actrice, certains ne peuvent pas la voir en peinture
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La semaine prochaine :
- un huis-clos d'époque très contemporain
- un film féminin, mais vraiment
- l'actrice, certains ne peuvent pas la voir en peinture
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noir et blanc - 1h30 - format 1:1.37
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
RépondreSupprimerPortrait de la jeune fille en feu ?
RépondreSupprimerSi oui, attention à ce que tu vas écrire, l'actrice principale est pour le moins susceptible ... je fais partie des gens qui peuvent pas la voir, même en peinture ...