- Allo…. Allo
Claude… Allo-allo-allo…
- Scritch allo
scatchischratschi Oui je entends Sonia… Là c'est mieux… Utilise Facebook, ça
marche pas trop mal ce matin…
…
- En effet… Dit,
c'est normal qu'il n'y ait pas de pochette de disque en tête d'article cette
semaine Claude ?
- Oui, à un disque
antique, même de qualité, j'ai préféré ce beau concert récent avec des
virtuoses de notre temps, Anne-Sophie Mutter n'est pas non plus une débutante !
- Il parait
que ce concerto n'est pas le meilleur de Brahms ; une partition pour faire
plaisir à des potes…
- Houlà, dans
le catalogue de la maturité de Brahms, on oscille entre le génial, le 2ème
concerto pour piano, et l'excellent même si divertissant comme ce double
concerto…
- On le
trouve souvent couplé avec le triple concerto de Beethoven, on peut dire que
dans les deux cas, des œuvres marquantes pour des virtuoses…
- Oui, il y a
de cela… La musique classique peut offrir de bons moments en faisant fi de
métaphysique ; et le plaisir bordel pour parodier un titre de film…
Brahms a
composé quatre
concertos dont deux pour piano. Le 1er en
début de carrière, il a 26 ans, un concerto de grande ambition mal compris par
le public de l'an 1859 dérouté par la puissance symphonique qui fait jeu égal
avec le soliste. Clara Schumann le jouera
dans les années suivantes pour assurer la promotion de ce chef-d'œuvre olympien…
Plus de vingt ans plus tard, en 1881,
le second concerto,
encore plus ambitieux, en quatre mouvements tels ceux d'une symphonie classique,
rencontre d'emblée un vif succès. Les deux concertos ont été commentés ces années
passées (Index).
Le célèbre concerto
pour violon a été composé peu de temps avant le second pour
piano, en 1878. Quel violoniste ne
l'a pas interprété ? Un ouvrage populaire avec son final aux accents tziganes,
une discographie plus que pléthorique… Bien entendu, un billet a été consacré à
ce concerto romantique, poétique et survolté, dans l'interprétation d'Hilary Hahn avec Neville
Marriner (Clic), un disque qui concurrence les
meilleures gravures historiques. Ce concerto était dédicacé au célèbre virtuose
Joseph Joachim.
En 1887, Brahms est l'un des monstres sacrés du
monde musical à Vienne. Le double concerto sera sa dernière
composition symphonique avec le N° d'opus 102. Il lui reste dix ans à vivre,
mais comme souvent commenté dans ces pages, il achèvera sa carrière en se
consacrant essentiellement à la musique de chambre dont des œuvres pour
clarinettes, modèles du genre. La genèse du concerto est pittoresque.
Initialement, Brahms
pense écrire un concerto
pour violoncelle pour son ami Robert
Haussmann (1852-1909). Mais par ailleurs, il s'était brouillé un
temps avec Joseph Joachim. En un mot et
pour Rockin : Brahms avait pris fait et
cause pour Amalie Schneeweiss,
cantatrice et épouse de Joachim
alors que le couple était en cours de divorce, Monsieur reprochant les infidélités
de Madame, Brahms la pensait
"innocente". L'affaire close et les esprits calmés, Brahms souhaite renouer avec son ex-ami,
il propose d'écrire aussi son concerto pour le violon. Joachim accepte, et le concerto pour
violon et violoncelle pourra voir le jour. Non JL, je n'ai pas
trouvé les infos dans Gala ou Closer, les dentistes sont fermés en cette période
de pandémie.
Le concerto est rapidement composé et
créé le 18 octobre 1887. Brahms dirige l'Orchestre
du Gürzenich de Cologne. Joseph Joachim
et Robert Haussmann jouant bien entendu les
parties solistes… Lla forme concerto pour plusieurs instruments est passée de mode au XIXème, hormis le triple concerto de Beethoven, on n'en trouve peu qui soient
restés marquants. L'époque classique est plus féconde : des brandebourgeois
de Bach à la symphonie
concertante de Mozart… Curieusement, l'accueil est plutôt froid.
Clara Schumann le trouve tristounet, et le
critique Richard Specht (1870-1932)
déplore la forme passéiste indigne du talent de Brahms…
Ce dernier, vexé, détruira le manuscrit de l'ébauche d'un second concerto pour
le même duo de cordes… Dommage ! Pourtant, plus tard, d'autres critiques
sauveront ce concerto de la relégation comme œuvre mineure, ainsi, Donald Tovey (1875-1940) écrira à son
propos : "grande
œuvre pleine d'humour".
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Voici donc un live de l'orchestre
de la radiodiffusion bavaroise donné en 2015 à la Herkulessaal
de Munich sous la direction de Mariss Jansons
que je ne présente plus dans ce blog ; pour rappel le chef letton nous a
quittés le 30 novembre dernier à seulement 73 ans (Clic). Au cas où, rendez-vous à
l'article consacré à un concert en live et disponible en DVD pour plus ample
connaissance du maestro (Clic).
Anne-Sophie Mutter fait son
entrée au "panthéon" du Deblocnot (n'ayons pas peur des mots). Pardon Luc ? Il
n'y a plus de place… Une forte personnalité et une artiste de grand
talent. Le temps passe, je m'aperçois qu'Anne-Sophie est
née en 1963 en Allemagne. C'est une
gamine surdouée qui apprend sans difficulté le piano et le violon. À 13 ans,
elle est remarquée par Herbert von
Karajan qui aimait se mêler incognito au public des concerts, en
chasse de jeunes talents (une fausse barbe ? Karajan
incognito, dans les années 70…). Le maestro l'invite dans la foulée à jouer
avec la Philharmonie de Berlin… La
même année et la suivante, elle participe au festival
de Salzbourg et est invitée à se produire à Londres par Daniel Barenboïm.
Vue sa précocité, Anne-Sophie
a plus de quarante ans de carrière à son actif dans un répertoire qui s'étend du
baroque à Penderecki décédé la semaine passée à 87 ans (pas du COVID-19). Très
impliquée dans la vie musicale contemporaine, on lui doit de nombreuses créations
dont le concerto pour violon du chef, pianiste et compositeur André Previn qui fût son
second mari (séparés en 2006). Anne-Sophie
a été mariée à Detlef Wunderlich, un
avocat (1955-1995) qui lui a donné deux enfants.
Quelques anecdotes : en 1985, la jeune femme a 22 ans, elle doit jouer à Munich le
difficile concerto de Sibelius. Sergiu
Celibidache qui a déjà éconduit Dieu des lieux la vire, estimant
qu'elle n'a pas le niveau !!! Sacré Sergiu
! Pour le cent cinquantenaire du compositeur, elle l'interprétera à Amsterdam
avec Andris Nelsons entendu il y a deux
semaines.
Autre histoire
piquante : en 2019, la virtuose
exécute le concerto de Beethoven avec l'orchestre
de Cincinnati quand elle voit une spectatrice la filmer avec son
portable ! Elle stoppe net et menace de quitter la scène et se crêpe le chignon
avec cette femme qui sera exfiltrée par la sécurité, le public applaudit cette évacuation.
Anne-Sophie s'expliquera à propos de ce
qui semble un caprice de star ; en quelques mots : elle vit très mal ce qui lui
semble une trahison de la partition de Beethoven,
de ses quarante ans de travail avec son stradivarius pour donner le meilleur de
l'œuvre et des ingénieurs du son qui, en studio, règlent les micros au mm près.
Elle ne peut supporter de voir le résultat circuler sur le web avec un son
pourri, une musique brouillonne et sans timbre. Les critiques, les mélomanes et
moi-même en personne partageons parfaitement cette opinion. Quid de la vie du
concert ? Une opinion valable pour tous les genres de musique.
La discographie de la violoniste est immense. Elle a enregistré
avec brio les grands concertos
du répertoire avec Karajan, des disques toujours
au catalogue, dont le double concerto
de Brahms avec le violoncelliste António Meneses.
Pour ce concert, la partie de violoncelle est tenue
par un jeune soliste allemand, Maximilian
Hornung, né en 1986.
Moins de trente ans en 2015. En 2009, il est nommé violoncelliste solo
de l'orchestre de la radiodiffusion bavaroise.
Parallèlement, il commence une carrière soliste, propulsé au premier rang par Bernard Haitink et Daniel
Harding. Sa discographie déjà étoffée comporte une gravure de Don Quichotte
de Richard Strauss et aussi un enregistrement
du quintette la truite de Schubert avec au violon… Anne-Sophie Mutter.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
L'orchestration est identique à celle d'une symphonie
de Beethoven : 2/2/2/2, 4 cors, 2 trompettes, timbales, cordes. (Partition)
Robert Haussmann |
1- Allegro : [1:15]
Dans son second concerto pour piano, Brahms avait abandonné le principe d'une
vaste introduction symphonique précédant l'entrée du soliste. Certes l'idée
n'était pas nouvelle puisque Beethoven l'avait eue dès le début du romantisme avec son 4ème
concerto pour piano.
Adepte d'un classicisme Brahms
? Oui mais très "néo", amateur de fantaisies. La très brève
introduction du double concerto en témoigne : 4 mesures ! Deux pour lancer la cavalerie
orchestrale par la répétition d'une vigoureuse cellule scandée et en tutti,
puis deux autres mesures ébauchant un motif ascendant et arpégé et bien rythmé par quatre triolets aux flûtes et aux violons… Un début un peu fou, en do
majeur, brillant en un mot. [1:24] Le violoncelle aura l'honneur du premier
solo, fort long (21 mesures si mes yeux ne me trahissent pas face à une partition
bien jaunie J) Et oui,
le violoncelle est à l'honneur, n'oublions pas que ce concerto devait lui être
dédié… Brahms avait-il déjà en tête
où sur un manuscrit ébauché cette idée à une époque où le violon reste le
prince parmi les cordes. Une thématique alternant vaillance et arpège préfigure
la vitalité bonhomme du concerto. Maximilian
Hornung fait chanter la ligne mélodique si brahmsienne par son
élégance : quelques traits épiques, un soupçon d'élégie et un passage en
pizzicati pour épicer le propos. [2:41] La clarinette puis un petit choral de bois
énonce un nouveau motif repris par le violon solo qui doit se contenter de
briller pendant cinq mesures seulement ! Un arpège descendant invite le violoncelle
à le rejoindre pour un duel qui gagne en combativité, mais avec amabilité. On
savoure le timbre chaleureux et viril du stradivarius d'Anne-Sophie
Mutter et le jeu sans aucune préciosité ni
de vibrato dissimulant une justesse approximative chez les violonistes qui
n'ont pas la virtuosité de cette grande dame…
[3:48] À partir du motif des cellules introductives,
l'orchestre s'élance dans un premier développement aux accents chevaleresques. [5:49]
Le retour des deux solistes signe la fin de la présentation des matériaux qui
vont parcourir le très vaste allegro. Moins élaboré et saisissant que le second concerto pour piano, certes, le
double concerto développe dans son allegro initial une forme sonate classique
quoique facétieuse. Un allegro offrant le beau rôle au violoncelle, le violon
ayant pour rôle principal de rejouer dans des couleurs plus légères la ligne
mélodique, on ne peut le nier ; le petit point faible de l'œuvre qui brille
pourtant par sa verve romanesque. [17:44] On notera de-ci delà des citations
plus nostalgiques.
2 – Andante : [18:52]
Le mouvement lent est annoncé par deux accords aux deux cors en ré, accords
repris par la petite harmonie. Pas de préséance cette fois-ci, les voix du violoncelle
et du violon se conjuguent pour jouer le thème principal à l'unisson.
L'orchestre ne s'oppose pas à ce beau duo nostalgique mais l'accompagne
doucement, sans gravité, bénéficiant pour cela de sa noble tonalité de ré
majeur. [20:06] l'harmonie énonce une seconde idée. Il règne une poésie nocturne
dans cet andante. On a rarement entendu la musique de Brahms
aussi heureuse, sans ombre… [23:18] Le développement central apporte une très
brève évasion empreinte de pathétisme.
3 - Vivace
non troppo : [26:44] Le final commence par un solo vif-argent et
saccadé du violoncelle (en principe accompagné des deux bassons, hélas on ne
les entend guère). Le violon donne la réplique en rejouant ce thème joyeux puis
l'orchestre fera de même. Brahms
a choisi une forme rondo soit une structure sonate de construction assez libre
qui nous fait penser à une suite de variations guillerettes et énergisantes. Pas
une imagination folle mais une chevauchée débridée émaillée de dialogues
enjoués entre les solistes et l'orchestre, la quintessence de la forme concertante.
Un concert de grande classe assurément.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
La discographie de ce concerto stupéfie !
Elle ferait concurrence à celle des quatre saisons de Vivaldi ou aux musts de Beethoven…
L'un des plus anciens enregistrements date de 1929
et réunissait Jacques Thibault et Pablo Casals qui dirigait l'orchestre. Quant
aux virtuoses de l'archet, ils ont tous abordé l'œuvre, certains plusieurs
fois, trois fois pour les violonistes Isaac Stern
ou David Oïstrakh, autant pour les violoncellistes
Mstsislav Rostropovitch et Paul Tortelier. Les associations se
faisant ou se défaisant sur presque un siècle d'enregistrement. Avec l'arrivée
du CD, le couplage triple
concerto de Beethoven
et double concerto
de Brahms est très favorisé (euphémisme). On
a un choix dément pour une œuvre très populaire. (Liste non exhaustive)
Je suggère trois CD qui ne déçoivent jamais, il y en
d'autres surement
En 1961 (Beethoven) et 1962 (Brahms) Ferenc
Fricsay, grand maestro hongrois trop tôt disparu enregistre les
deux concertos et réunit Wolfgang Schneiderhan au violon, János Starker au violoncelle, Geza Anda sera leur complice au piano. Il
dirige l'Orchestre de la Radio-Symphonique Berlin (DG – 5/6)
En novembre 2019,
je vous ai parlé des péripéties cocasses entourant la captation de 1969 du triple concerto pour EMI,
Oïstrakh, Rostropovitch,
Richter et la Philharmonie
de Berlin dirigée par Karajan.
On peut supposer que le double concerto a été enregistré avec
le même casting dans la foulée… Et Non ! On retrouve Oïstrakh
et Rostropovitch mais ici accompagné par George Szell et l'orchestre
de Cleveland. Le chef hongrois naturalisé américain n'essaye pas, contrairement à son
collègue autrichien, de viser la première place du podium et du coup l'intérêt
du disque repose plutôt sur le complément que l'enregistrement phare (EMI – 5/6).
Aller, on ne peut pas bouder le très logique trio qui
rassemble Karajan avec sa protégée Anne-Sophie Mutter
et Antônio Meneses, au violoncelle. Un atout
pour ce disque, et de taille : le concerto pour violon de Brahms olympien sous les doigts de la
jeune virtuose, gravure numérique. (DG
– 6/6)
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