Qui aurait cru que les Outlaws de Tampa sortiraient de leur zone de confort pour graver dans la cire un nouvel effort studio ? Huit ans après un précédent - et déjà inespéré - "It's About Pride", assez bien accueilli.
D'autant que les quelques rares rescapés de la grande époque du Southern-rock se contentent dorénavant de faire de la représentation, comme Lynyrd Skynyrd. Tandis que Blackfoot n'est plus qu'un ersatz sans aucun membre original, ou que Molly Hatchet, dirigé par un Bobby Ingram aux méthodes d'escroc (1), a perdu depuis longtemps toute inspiration (un album de reprises en 2012 et aujourd'hui un live).
The Outlaws, ex-second couteaux du Rock sudiste, ce quintet qui gagna le cœur d'une bonne partie des Etats-Unis grâce à des concerts épiques, chauffés par une guitar army rivalisant avec Lynyrd Skynyrd, et un ensemble de chanteurs qui lui représentait un penchant plus rock que les Eagles. Une formation également considérée, au temps de son acmé au crépuscule des années 70, comme l'une des rares à avoir su trouver un juste équilibre entre la Country et le penchant Heavy-rock. Un équilibre précaire bien plus stable sur ses deux premiers efforts et en concert, comme en témoigne le fameux live "Bring It Back Alive" (1978). Une double galette toujours considérée comme l'une des plus réussies du genre.
La mouture actuelle comporte, ô miracle, encore deux membres originaux : Monte Yoho aux baguettes et Henry Paul au chant et à la guitare rythmique. Le guitariste Steve Grisham avait intégré une première fois le groupe en 1983 ; pour le quitter en 1986 avant de le rejoindre en 2013.
Si la voix de Paul accuse forcément le poids des ans, trahissant parfois une nouvelle vulnérabilité, elle a su garder bien suffisamment d'agrément et de personnalité. Elle a préservée cette tessiture à la saveur des grandes étendues de l'Ouest américain (finalement bien moins Floride que Colorado ou Arizona), et ces intonations de vieux cow-boy fourbu par de longs périples en solitaire.
Hélas, lorsqu'il laisse occasionnellement sa place on le regrette amèrement. Ainsi, "Dark Horse Run", déjà à la base pénalisé à la base par un Southern édulcoré et policé, est carrément coulé par la voix maniérée et des intonations fébriles d'un comparse (Dave Robbins ?). Les chœurs un brin décalés ne font que l'enterrer encore plus. Ça écorche les esgourdes.
Par contre, et heureusement pour sa mémoire, elle passe mieux sur "Windy City's Blues", une vieille composition de Frank "Rock" O'Keefe (2), reprise en hommage. En fait, pour cette chanson, pour pallier la déficience de la voix , le chant est soutenu soit par des chœurs soit par une guitare à l'unisson.
Sinon, il n'y a pas à tortiller du fessier, The Outlaws a réussi son coup. Si l'on excepte "Southern Rock Will Never Die" qui, à l'image de son titre, est assez consensuel, et le limite indigeste "Dark Horse Run", la troupe redonne ses lettres de noblesse à un Southern-rock d'antan. Sans tomber dans la caricature. De là à considérer qu'il s'agit de l'album le plus authentique du genre depuis des mois, des ans, il n'y a qu'un pas. Toutefois, ce nouvel Outlaws fusionne celui des origines à des couleurs plus modernes et mélodiques du "Soldiers of Fortune" de 1986.
Evidemment, la troupe ayant souffert lors de sa longue existence des départs, défections et décès, il ne faut pas compter retrouver l'essence des premiers disques.
A ce titre, en dépit de la qualité indéniable de cet inattendu album, on regrette la richesse que créaient la communion et l'interaction des chants de Billy Jones, Hughie "the Flame" Thomasson et Paul. Preuve en est avec "Heavenly Blues" dont la première version, nettement plus Country, est sur "Hurry Sundown" (1977).
Pour enchaîner avec les reprises, "Dixie Highway" est une chanson de Brothers Of The Southland - super-groupe sudiste regroupant Henry Paul, Jimmy Hall, Bo Dice, Steve Gorman et Steve Grisham -. Cette chanson a également été durcie pour l'occasion.
En aparté, alors que Henry Paul - qui avait commencé par se produire en tant qu'artiste Folk - était le compositeur le plus prolixe en matière de Country-rock, cet élément n'est plus qu'un souvenir, réveillé le temps d'un "Over Night from Athens".
Autrement, on peut considérer que "Endless Ride" et "Macon Memories" exsudent encore une forme de Country de la même manière que le faisait Lynyrd Skynyrd avant sa quasi radicalisation.
2020 |
"Macon Memories" est probablement l'une des chansons les plus réussies de l'album. Elle pose un regard nostalgique et ému sur les premières prestations de formations emblématiques dans cette ville symbolique pour la genèse du Southern-rock. En l'occurrence, celles des Allman Brothers, Wet Willie, Charlie Daniels Band et Marshall Trucker Band. (des prestations vécues ou fantasmées ?)
Pour mémoire, Capricorn Records, la maison de disque dédiée au Southern Rock, était implanté à Macon.
Final en miroir avec l'ouverture. En effet, "Southern Rock Will Never Die", lui, rend hommage aux hérauts musiciens, et aux amis disparus. Notamment à Steve et Ronnie, à Toy et Tommy, à Gregg, Berry et Duane, à Billy, Rock et Flame, et à T.C. et Taz.
La syntaxe propre au Rock sudiste avec notamment ses guitares à la tierce, en duels ou à l'unisson est bien là. L'instrumental "Showdown" démontre d'ailleurs que les bretteurs en ont sous la semelle, qu'ils se gardent bien d'en faire des tonnes, qu'ils cherchent à rester collés à l'harmonie même lorsqu'ils lâchent, un instant, les freins. Il ne manque que de la pertinence et le feu de Hughie "the Flame" Thomasson (décédé le 9 septembre 2007). Dommage que le jeu des deux batteurs ne soit pas mis en valeur (on dirait qu'il n'y en a qu'un seul).
Si cela devait être le dernier essai, (Henry Paul approchant tout de même les 71 piges), les Outlaws clôtureraient leur carrière de fort belle manière, sinon avec panache.
(1) Alors qu'il n'a intégré le groupe qu'en 1986, il gère le groupe comme un commerce, les musiciens n'étant plus que des employés sous contrat. Y compris lorsque des membres fondateurs ont réintégré le groupe. Aujourd'hui, étant le seul guitariste, pour la scène il emploie des bandes préenregistrées de guitare. Un comble.
(2) "Windy City's Blues" n'existait jusqu'alors que sous forme de démo. Aucun rapport avec la chanson du Marshall Trucker Band sortie en 1976. Frank O'Keefe est décédé en 1995.
(3) "Soldiers of Fortune" est un album sorti en 1986 sous le label Pasha, produit par Spencer Proffer (forcément). Il représente une résurrection réussie. En dépit d'une production plus policée et efFMinée, il a su maintenir une ambiance sudiste.
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Bon maintenant que Philou m'a réveillé ......Grand fan d'Outlaws je me suis précipité sur ce disque et j'avoue que je ne suis pas déçu , loin de là . C'est le digne successeur de "It's about pride" . Outlaws sont les derniers représentants du southern rock "old school" depuis la fin de l'Allman Brothers Band (le plus énorme groupe de la planète dois je le rappeler ! ) et la retraite récente de Lynyrd Skynyrd . "Dixie highway" est un pur régal pour tout aficionado de Southern Rock.
RépondreSupprimerLe précedent disque , le "Live Legacy" revient aussi régulièrement sur ma platine , je le préfère au premier live officiel " Bring it back alive" pourtant de la grande époque ! mais je le trouve brouillon et approximatif.....