- Sonia, vous
vous rappelez l'article sur la mémoire et la mer de Léo Ferré…
- À ça oui
Claude ! On avait épluché, dictionnaire en main, la versification de ce texte
merveilleux mais surréaliste dans sa rédaction, oui, oui, et pourquoi cette
question ?
- J'ai
cherché sur You Tube si d'autres chanteurs avaient fait des reprises de cette
chanson, il y avait Bernard Lavilliers, sincère mais décevant, Hubert-Félix
Thiéfaine plus habité, d'autres que je ne cite pas, je n'ai pas accroché, et
j'ai découvert Ian Dayeur…
- Je ne le connais
pas, mais je crois que ça va changer, et ça donnait quoi sa prestation à ce
monsieur ?
- Ben j'avais
été interloqué par le style un peu "rock" de son adaptation, mais j'avais
applaudi sa prise de risque face à une chanson culte… J'avais mis un petit
commentaire en ce sens…
- Houlà ! Un
peu irrité le gars du coup de ce jugement même nuancé ?
- Ben
justement pas du tout, on a échangé sur le web et par téléphone, et comme en
plus d'apporter une seconde vie à Ferrat notamment, il compose et chante de
très bons textes, a publié plusieurs albums ; l'idée a donc germé d'une
interview pour ce billet…
- Ah c'est
cool…
Contrairement à Mozart, Beethoven, Mahler qui n'ont pas daigné
répondre à mes sollicitations d'interview (BêcheursJ), Ian Dayeur a accepté de jouer le jeu. Qui
mieux que lui peut nous faire découvrir ses passions, le pourquoi du comment de
son admiration pour des chanteurs (dont le génie se fait rare) comme Léo Ferré
et Jean
Ferrat. Et bien entendu nous parler de lui comme auteur compositeur
interprète, ses disques, spectacles et projets.
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1 - Salut
Ian, personne ne te connait parmi les déblocnoteurs qui ne sont pourtant pas
tous câblés "classique"… De là à en déduire que tu ne fais pas la une
des canapés de Drucker ou équivalents, il n'y a qu'un pas… Donc, allons direct
au but : quel parcours de la petite école à la parution de ton dernier album ?
"Bonjour Claude, non je n’ai pas la
chance de m’asseoir sur ce canapé qui a l’air fort confortable d’ailleurs… De
la petite école à mon dernier album ? J’ai eu l’impression de vivre plusieurs
vies, notamment artistiques. J’ai été élevé par mes grands-parents, mon enfance
a été plutôt douce. Ado je fabriquai de fausses guitares pour imiter Santana,
Dire Straits etc, et je chantais, je chantais beaucoup. Mes origines Italiennes
peut-être qui s’exprimaient… Puis je me suis enfermé dans ma chambre pour
apprendre la guitare, je m’enfermais et je pouvais jouer 8h sans interruption.
A 18 ans j’ai rejoint l’équipe de Mama Béa Tekielsky pour une tournée, c’était
le départ de l’aventure. En parallèle j’avais écrit une dizaine de titres que
j’avais maquettés sur Avignon, des chansons assez expérimentales on va dire. Je
me souviens d’un saxophoniste renommé dans la région qui avait joué dessus, qui
m’a dit « C’est bon ce que tu fais, t’en vendras pas un ! » A côté de ça en
tant que guitariste j’étais dans plein de projets qui m’emmenèrent dans toute
la France et à l’étranger. Vers mes 30 ans, j’ai monté un groupe « Les maux de
Zoé ». On gagna un concours sur Paris. Le groupe Ange nous avait sélectionné
pour un concert au Zèbre de Belleville. Le groupe a duré cinq années. Je jouais
dans un orchestre à cet époque, on accompagnait les stars du moment ou celles
sur le retour. Je sentais qu’il fallait que j’arrête, je voulais revenir à ma
première idée, celle pour laquelle j’avais appris la guitare : écrire des
chansons… J’ai sorti mon premier album solo « ID » avec le titre « Belle France
» qui eut un petit écho sur le net, un public se forma autour de ce que je
faisais, du coup j’ai continué à écrire et à sortir des disques jusqu’à
maintenant."
Festival Jean Ferrat |
On n’oublie pas les personnes qu’on a aimées…
Je ne sais pas si un Bashung ou même un Brassens aurait eu autant de succès s'ils
devaient commencer maintenant. J’ai du mal à imaginer Léo Ferré connaitre la
gloire en diffusant « les amants tristes » sur Facebook… Le problème n’est pas
les artistes mais ceux qui les mettent en lumière. Maintenant il faut paraitre
avant que d’être. Les informations défilent sous nos yeux à une vitesse folle.
C’est souvent le plus flashy, le plus pétillant qu’on aperçoit. J’ai toujours
préféré la cuisine traditionnelle au fast food… La chanson engagée peut trouver
un public en raison de l’actualité de notre société mais on la muselle
fortement. Le festival Ferrat m’a permis de m’exprimer plus librement avec mes
chansons.
3 – Sur ton
site, je compte cinq albums sans prendre en compte le Ferrat… Comment
choisis-tu tes thématiques et ton style rédactionnel en fonction de ces dits
thèmes…
J’écris quand je ne peux plus faire
autrement, quand les émotions sont trop fortes, quand le spleen de la
mélancolie m’empêche de parler. On a deux sujets véritables, la vie et la mort,
le reste n’est que littérature ou agencement. Les questions sociétales
actuelles me touchent beaucoup, être artiste c’est accepter la précarité, les
hauts et les bas, en ce moment on sent que le socle est instable. Mon autre
sujet de prédilection c’est l’amour et son éventail de sentiments. Je me laisse
guider par le vent qui m’habite.
4- On parle
de toi dans ton site comme un groupe à toi tout seul. Tu travailles avec un
groupe de musiciens officiel ou en réunissant des fidèles suivant les
opportunités, les divers types d'arrangements de tes titres ?
J’enregistre beaucoup seul. Je joue les
guitares, les basses, les batteries, les pianos, etc. Et quand j’ai un pote qui
est dispo il vient poser son instrument. Mais je travaille essentiellement
seul. Je travaille toujours en urgence ; quand une chanson est finie, je
l’enregistre, il peut être 4h du matin. N'étant pas très patient, j'ai pris
l’habitude de tout enregistrer dès que la chanson est là.
Portrait par Idea-Di-Benedetto |
La vie d’artiste n’a pas changé, c’est
la même que celle chantée par le grand Léo. La vie d’artiste c’est ne pas
comprendre ce qui se passe autour de nous, c’est souffrir pour exprimer le
beau, c’est le luxe de prendre son temps pour tenter de coucher ses états
d’âmes, c’est vivre avec un truc qui bouillonne au fond des tripes. La vie
d’artiste ne changera pas, elle nait dans la souffrance. Je ne connais aucun
artiste qui sort d’un cocon de soie. Si tu n’as pas de déchirures, qu’as-tu à
exprimer ? Rien. Comme les artistes que tu nommes dans ta question.
6 – Tes projets
pour les années à venir ? Pour terminer ce papier, j'aimerais parler d'un album
particulier… Lequel est ton chouchou ? Si c'est le cas…
Mes projets sont de jouer mes chansons
sur scène. De partir sur la route avec les gens que j’aime. D’enregistrer des
chansons, d’essayer de m’améliorer dans l’écriture. Puis surtout mon projet,
c’est de vivre ! De tout prendre en pleine face comme le vent. En ce moment
j’écoute beaucoup Léo Ferré, je crois même que c’est le seul que j’écoute tous
les jours. Je suis un inconditionnel de Brassens et j’écoute aussi beaucoup de
classique, notamment Brahms. Dans un autre style il y a Chet Baker qui me
retourne la tête. Je n'ai pas d’album chouchou en particulier. Il y en a un que
j’écoute beaucoup par la force des choses en ce moment, c’est mon dernier album
que je suis en train de finir « Paradis d’enfer ».
Merci Ian,
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Pour consulter le site de Ian [www.iandayeur.com] – Un grand
choix de titres extraits de ses albums sont à écouter. [Albums]
Je propose : Encore une
fois de l'album Ornithologie, puis La
valse noire de l'album Les maux de Zoé. Puis Que
serais-je sans toi sur un texte de Louis Aragon, une chanson de Jean Ferrat de 1965. Ça ne me rajeunit pas, Sonia ! La chanson
ne vieillit pas… elle.
Bravo Ian tu es toujours au top et tu sais bien que je suis ta fan depuis tes débuts. Je trouve que tu devrais être mieux reconnu. Les gens ne savent ce qu'ils perdent en ne l'écoutant pas. Je t'adore et je te fais des gros bisous à bientôt Jacotte Bosloup
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