Je
ne sais pas ce que vaut un prix Goncourt, je sais juste que c’est parfois le
seul bouquin que certains lisent dans l’année, et que beaucoup offrent en
cadeau à Noël ! J’en ai lus quelques-uns, formidables, comme LES BIENVEILLANTES
(Jonathan Littell, 2006) AU REVOIR LA-HAUT (Pierre Lemaitre, 2013, sans doute
un des plus populaires) ou L’ORDRE DU JOUR (2017, Eric Vuillard).
Thetford Mines (oui, ça existe) |
Cette
année c’est le tour de Jean Paul Dubois d’être couronné. Je n’avais jamais lu
cet auteur, qui se vend bien, et cumule les adaptations au cinéma : KENNEDY
ET MOI, LA NOUVELLE VIE DE PAUL SNEIJDER, LE FILS DE JEAN… Vous rajoutez un
prix Fémina pour UNE VIE FRANCAISE (2004) gros succès de librairie, à 69 ans
Jean Paul Dubois a correctement œuvré comme écrivain.
Déjà,
j’adore le titre : TOUS LES HOMMES N’HABITENT PAS LE MONDE DE LA MÊME FAÇON. Le gars écrit bien et conclut en 250 pages. Deux bons arguments. Et c’est
drôle. Enfin pas tout le temps, mais comme on dit, y’a de l’esprit. Le
narrateur s’appelle Paul Hansen, on fait sa connaissance en prison, au Canada,
ou il partage sa cellule avec Horton, un Hell’s Angel dingue de Harley comme
il se doit. Quel crime a commis Paul Hansen pour en arriver là ? C’est ce
que lui-même va nous raconter, par flash-back. Paul est le fils
de Johanes Hansen, pasteur danois, et d’Anna Margerit, décrite comme la plus
jolie des femmes. La famille vit à Toulouse, la mère gère un cinéma de
quartier, on suit la programmation d’années en années, jusqu’au jour de 1972,
où Anna reçoit les bobines de GORGE PROFONDE. Vous imaginez la réaction de son
pasteur d’époux !
Séparation,
divorce, Johanes s’expatrie au Québec où, comme pour faire pénitence, il reprend
l’église de Thetford Mines, bled dévasté par les mines d’amiante à ciel ouvert.
Il est rejoint par son fils, qui végète, travaille dans une petite entreprise où il
apprendra à réparer tout et n’importe quoi, ce qui sera très utile pour son dernier
boulot : concierge et homme à-tout-faire de l’Excelsior, résidence de luxe pour retraités.
Le Beaver, avion tout-terrain... |
On
pourra tout de même objecter sur le profil des personnages, limite caricaturaux.
Le rigide pasteur (qui écoute aussi bien Bach que Led Zep), la féministe
maman soixante-huitarde, ce gros balourd d’Horton qui menace de « couper
en deux » tous les cons, mais philosophe de basse-cours au grand cœur,
Winona la pilote d’avion (on apprendra tout sur les Beaver, sur les orgues Hammond B3 dont Dubois nous décrit scientifiquement le fonctionnement, comme les vidanges de piscines) d’origine indienne donc
forcément en communication avec la nature et qui deviendra dans des
circonstances assez réjouissantes la compagne de Paul, ou Kerian Read le gentil
voisin à l’oreille attentive, Sedgwick le délégué élu des résidents, connard
hautain adepte des règlements intérieurs.
Des
personnages sans doute trop facilement dépeints, dont on attend d’eux qu’ils
soient… et ils le sont. Hormis cette réserve, ce bouquin se lit très bien,
Jean Paul Dubois sait y faire pour mener son récit, les personnages sont
attachants. Une lecture très
agréable, on a envie d’y revenir dès qu’on ferme le bouquin entre deux chapitres,
ça fourmille de mille petites choses parsemées au fil des pages.
J'aime bien cet auteur dont je lis systématiquement les livres , mais ce roman est loin d'être son meilleur ! C'est heureux pour Dubois qu'il ait décroché le Goncourt il le mérite. Je l'ai découvert avec "Une vie française" qui m'avait emballé , sans doute parce que j'y avais retrouvé une grande partie de ma jeunesse ( j'ai sensiblement le même age que Dubois.....) , "Vous plaisantez Mr Tanner" est également excellent. D'accord avec toi au sujet des trois Goncourt que tu cite au début de ton post , trois romans formidables et le dernier volet de la trilogie de Lemaitre ne fait que confirmer tout l'immense talent de cet auteur.
RépondreSupprimerIl semblerait (semblerait...) que le Goncourt lui a été refilé pour "l'ensemble de son oeuvre" ce qui confirmerait que ce roman-là ne soit pas son meilleur, mais qu'à presque 70 ans le gars avait besoin de reconnaissance... Pas lu encore le dernier Lemaitre, le second tome de sa trilogie était de bonne facture, mais tout de même en dessous de "Au revoir là-haut" beaucoup plus foisonnant.
RépondreSupprimer