- Coucou
M'sieur Claude, je passe à Paris entre deux séances de bronzage… Mais ? On a
déjà commenté ce disque il y a quelques mois !!! Vous devenez gâteux ?!
- Pas
d'impertinence Sonia ! Nous avions écouté les deux œuvres de Borodine sur ce
disque vraiment original, du coup un petit complément avec Rimski-Korsakov…
- Ah oui, l'ouverture de la Grande Pâque Russe… Connu ça ! Mais vous n'aviez pas d'autres
choix que de proposer de nouveau le maestro belge ?
- Si et cette
interprétation toute en finesse ne plaira sans doute pas à tout le monde… Du
coup j'ai ajouté une version bien énergique de Evgeny Svetlanov…
- On n'en a
jamais parlé de ce chef russe très connu… Une volonté de votre part ?
- Ô non, pas
du tout mais, soit les vidéos YouTube disparaissent en permanence, soit ses
disques ne sont pas réédités, je ne suis pas marchand de disques mais quand
même…
Evgeny Svetlanov (1928-2002) |
C'est amusant de constater que les deux
interprétations sont passionnantes. Il faut dire que l'orchestre d'État d'URSS en 1984 est au mieux de sa forme sous la direction de son chef Evgeny Svetlanov peu
enclin à insuffler de la métaphysique là où il n'y en a pas. Un maestro que j'avais
sans doute évoqué dans des discographies alternatives, un grand serviteur de la
musique russe et fan de Mahler,
mais pour trouver de bons disques sur le plan technique, quelle galère !
Quant aux vidéos You Tube, dur ! Elles disparaissent bien vite…
Retour de Jos van Immerseel, quelques mois après
l'écoute des deux petits ouvrages de Borodine présents sur ce disque et trois
ans après un article consacré au Trio "des esprits" de Beethoven,
gravure pour laquelle il tient la partie de piano. Musique baroque, classique,
de chambre et même romantique, voilà un musicien belge pour le moins éclectique…
(Clic)
J'aime beaucoup la transparence de l'interprétation de cette ouverture à
l'orchestration éloquente de Rimski-Korsakov
même si je trouve que l'espace stéréophonique du disque n'est pas assez large…
- Pfff !
Jamais content de rien !!
- Ô M'enfin
Sonia, juste un petit regret sur la technique sonore….
Saint-Basile-le-Bienheureux de Moscou |
Hyperactif, le chef dirigera 33 ans (de 1965 à 1998) l'orchestre d'État de l'URSS (futur
Orchestre symphonique de la fédération de Russie après
la chute du bloc de l'Est). Il sera l'un des rares artistes soviétiques à
occuper des postes à temps complet à l'Ouest, auprès de trois phalanges
anglaises de haut vol : Le Philharmonia,
Le symphonique de Londres et l'orchestre de la BBC. Pour compléter le CV,
de 1992 à 2000, il est chef principal de l'Orchestre
de la Résidence la Haye. Il sera écarté de son poste à Moscou
malgré 35 ans de travail durant lequel il a hissé à très haut niveau l'orchestre
d'État, ses absences et son trop grand nombre de casquettes ayant fini par agacer
le ministère de la culture (des intrigues politiques, comme partout).
Svetlanov a beaucoup
enregistré, prioritairement de la musique russe. Il faut avoir entendu la
fougue de sa battue dans le poème de l'extase de Scriabine (une référence dionysiaque) ou Manfred
de Tchaïkovski. Il y a quelques années,
plusieurs dizaines de CDs avaient été réédités dans une copieuse anthologie
"collector" consacrée au maestro. Temporairement hélas. Pour Manfred,
un commentateur Amazon notait "Survolté, puissant, insurpassable", je
n'aurais pas dit mieux pour ce CD disponible sur le marché pour collectionneurs…
Svetlanov conduisait
de manière athlétique, dégageant une force granitique des ouvrages abordés, un
engagement sans doute épuisant car le chef est décédé assez tôt en 2002 à 74 ans.
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L'œuvre du jour est une Ouverture de Concert écrite
par Rimski-Korsakov contemporaine de la
création de son chef-d'œuvre : Schéhérazade, orientalisant et coloré poème
symphonique mais organisé en quatre mouvements comme une symphonie traditionelle (Clic).
Dédiée in memoriam à Moussorgski
(+1881)
et à Borodine (+1887, un an avant), elle s'inspire grandement de la liturgie
orthodoxe, l'édition originale portant la mention "Ouverture
sur des thèmes liturgiques d'après le psaume 68 et l'Évangile selon Saint Marc,
chapitre XVI." Créée fin 1888
par le compositeur lui-même, elle mêle avec ferveur des références aux textes
sacrés de la fête de la résurrection mais également à des chants laïcs populaires
en Russie. Comme souvent chez ce composteur l'écriture est rigoureuse et
l'orchestration luxuriante :
3 flûtes, la 3ème jouant le piccolo, 2
hautbois, 2 clarinettes (en ut), 2 bassons, 4 cors, 2 trompettes (en la et en
si bémol), 3 trombones, tuba, 3 timbales, cloches tubulaires, grosse caisse,
caisse claire, tam-tam, cymbales, triangle, harpe et cordes.
Rimski-Korsakov aborde
son sujet comme une œuvre de circonstance, avec ferveur certes, mais n'évite pas
quelques faiblesses de composition comme la répétition tout de même insistante
du thème principal.
La partition enchaîne quatre parties sans interruption,
le compositeur proposait des commentaires à propos des textes religieux qui
l'avaient inspiré ; je les mentionne par copier/coller :
1 - Lento
mystico – Maestoso : [0:00] Lento
mystico [1:26] Maestoso : Le thème principal est énoncé sous forme d'un choral
des bois sur les premières mesures à 5/2. Un beau motif des cordes conclu par
un accord de cuivres est suivi par un solo du violon… Le maestoso s'élance par
une noble reprise du thème initial par les trombones. En quelques mesures Rimski-Korsakov démontre son talent
d'orchestrateur bien mis en relief par les deux chefs, intimiste chez Jos van
Imerseel, plus passionné chez Svetlanov…
Je ne détaillerai pas plus, cette musique se suit très
bien, richement colorée et rythmée. La grandeur mystique est évidente. Le travail
sur la polyphonie est varié avec des moments de grâce comme le solo de violon à
[8:21]. Méditation et joie populaire s'opposeront farouchement en ce jour de
liesse. Voici en italique les commentaires de la main du compositeur :
"L’assez longue et lente introduction à La Grande Pâque
russe sur le thème Dieu ressuscitera, évoquait pour moi la prophétie d’Isaïe
sur la résurrection du Christ."
2 - Andante
lugubre [3:00] : "Les sombres couleurs de l’andante lugubre semblent
représenter le Saint Sépulcre s’illuminant au moment de la résurrection…
"
3 - Allegro agitato [4:02] : "Le commencement
de l’Allegro, extrait du psaume Ceux qui le haïssent fuiront de devant sa face,
est bien en harmonie avec la joie qui caractérise la cérémonie orthodoxe : la
trompette solennelle de l’Archange alterne avec le son joyeux et presque dansant
des cloches, coupé tantôt par la lecture rapide du diacre, tantôt par le chant
du prêtre lisant dans le Livre saint la Bonne Nouvelle."
4 - Maestoso alla breve [11:48]
: "Le
thème Christ est ressuscité, constituant en quelque sorte le thème secondaire de
l’œuvre, apparaissait entre l’appel des trompettes et le son des cloches, et
formait également une coda solennelle."
La discographie est pléthorique pour cette œuvre populaire
qui constitue fréquemment un complément de programme sur les CDs.
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