lundi 29 juillet 2019

LES SALES BLAGUES DE PHILIPPE VUILLEMIN (BD) - par Pat Slade





Vuillemin le sale gosse de la BD





Éloignez les enfants... Car comme dirait Claude Toon qui a des lettres, le dessinateur est un auteur, disons... controversé !

Dans les années 80, les adolescents que nous étions lisaient des revues qui étaient vues par nos parents comme licencieuses, tendancieuses et pornographiques. Pourtant, Charlie Hebdo et Hara-Kiri existaient depuis longtemps, mais Métal-Hurlant et L’écho des Savanes enfonçaient les portes d’une bande dessinée pour adultes qui commençait à sombrer dans un profond coma, qui était même éthylique du coté de la rédaction de Charlie Hebdo.

De nouvelles parutions comme Mormoil, Ah ! Nana, Le Petit Psikopat illustré, fluide Glacial, Viper et autre Virus apparaissent et débauchent les dessinateurs de Pilotes et de Charlie pour créer un genre underground. Mais de nouveaux petits jeunes cherchent leurs places et apposent leurs «Pattes». Binet, Edika, Loup, Willem, Boucq, Goossens pour ne citer que ceux-la feront leurs trous dans leur domaine, mais l'un d'entre eux sera plus «trash» que les autres.

Philippe Vuillemin voit le jour à Marseille en 1958 le même jour où les Schtroumpfs font leur apparition dans le journal de Spirou. Un signe du destin ? Ce n’est qu’à l’âge de 19 ans qu’il fera ses premier crobards pour L’Echo des Savanes, Charlie Mensuel et Hara-Kiri. Son style ? Un trait gras, tortueux, écorché et sombre, un peu comme Reiser mais avec un sens du non correct bien plus incrusté.

C’est avec l’album «Saine ardeur» aux éditions du fromage en 1980 que je découvre l’univers de Vuillemin même si j’avais déjà aperçu ses dessins dans Hara-Kiri sans jamais vraiment m'y arrêter. Des histoires un peut malsaines ou la guerre, des banlieues futuristes glauques, des rockers déchus, des journalistes malchanceux ou en manque d’information, se côtoient dans des histoires courtes, brèves et concises de 4 pages maximums. Avec son album suivant «Sueurs d’homme», il reprend la même recette que précédemment. 10 histoires en 61 pages ou le sordide, le morbide, la violence, le sexe sont présents parmi la débauche d’encre de chine de ses dessins. En 1983 sort «Frisson de bonheur» avec le même genre d’histoire où le crade, le politiquement incorrect, l’homosexualité et le racisme de l’Amérique profonde des années 50 sera le chant du cygne d’une période que personnellement j’appelle la trilogie noir et blanc.

En 1984, il s’associe ave Jacky Berroyer et ensemble ils créent le personnage de Raoul Teigneux où l’univers des banlieues dortoirs des années 80 est son défouloir, un personnage qui serait les maux de la société à lui tous seul. Raoul Teigneux sera l’anti-Lucien de Franck Margerin. L’album «Raoul Teigneux contre les druzes», de l’humour féroce et sans tabou.

L’année suivante avec «Tragiques destins», Vuillemin achètera des feutres de couleurs et son coup de crayon s’affinera.  La couleur apportera beaucoup à ses histoires et donnera une certaine bouffée de fraicheur à la différence de l’univers étouffant de ses précédents albums.   

Il va aussi s’associer avec l’homme des «Brèves de comptoir», Jean-Marie Gourio, et en 1986 ils vont sortir un album qui ce verra interdit de publication dans plusieurs pays en Europe : «Hitler = SS». Un album qui traite des camps d’extermination. Il sera jugé raciste et tendancieux aux yeux de la justice alors que les deux compères voulaient réaliser un pamphlet contre la bêtise humaine aussi monstrueuse soit-elle. Ce sera toujours avec Gourio qu’il reprendra le relais de Reiser au décès de celui-ci avec «Les Sales Blagues de l’Echo» qui compte à ce jour 17 albums.


Mais Philippe Vuillemin a plus d’une corde à son arc, il fera du cinéma et apparaitra dans 6 films avec des réalisateurs comme Claude Confortès ou Benoît Delépine et Gustave Kervern, connus pour leur très large participation à Groland. Il à été aussi guitariste et bassiste du groupe Dennis Twist  avec ses potes dessinateurs, Denis Sire, Franck Margerin, Dodo et Jean-Claude Denis.

Tous en continuant à sortir des albums comme «Plaisir D’offrir» ou «Y’a pas que le sexe dans la vie» et de travailler pour d’autres publications comme Zoulou, L’Hebdo ou Zéro, il dessinera en 1989 les «Versets Sataniques de l’évangile» sur des textes du professeur Choron, une représentation de la bible à faire dresser les cheveux sur la tête de tous les catholiques et qui aurait amené leurs auteurs sur le bûcher à l’époque de l’inquisition. En  1993, il participera à la renaissance de Hara-Kiri.

Il décroche la timbale en 1995 et reçoit le Grand Prix du Festival d’Angoulême ce qui ne va pas plaire à Morris le père de Lucky Luke qui claquera la porte du festival lors de son élection.

36 albums originaux, 3 anthologies, il investira de septembre à octobre 2015 la galerie «Huberty-Breyne  Paris» dans une exposition avec pour titre «Vuillemin, c’est pas de la merde», qui retracera les trente années de carrière de l’héritier de Reiser            


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