- Tiens
Sonia, des perles de coco pour notre goûter.
- Miam,
j’adore. Et c’est en quel honneur ?
- Nouvelle
chronique sur une jolie histoire au parfum d'Extrême-Orient. Belle plongée dans
le 13ème arrondissement de Paris, quartier des Olympiades, l’un des quartiers
chinois de Paris, avec ses grandes tours mais aussi ses constructions aux toits
relevés dans les coins qui rappellent les temples chinois, sur la fameuse Dalle
des Olympiades. Très intéressant sur le plan architectural, mais de gros
problèmes de béton pour certaines tours, du fait de la porosité et …
- STOP ! Pas
de cours sur les structures béton ! On dirait M'sieur Toon, le roi de la
digression…
Sonia a raison.
Ne nous égarons pas. Ce quartier, construit dans les années 70 est certes très
atypique par le projet d’urbanisme ambitieux et novateur qu’il représente (rues
souterraines pour les voitures, piétons sur la dalle, tours aux noms de villes
Olympiques : Mexico, Helsinki, Sapporo…), mais il
est également un délice de dépaysement aux couleurs et aux saveurs de l’Extrême
Orient. Et avec ce joli premier roman, Grace Ly nous fait entrer dans l’intimité
d’une famille Chinoise (d’origine Cambodgienne) implantée dans cet univers
sino-parisien.
L’héroïne, la jeune fille modèle (enfin, pas si modèle
que ça) se nomme Chi Chi. Chi Chi Chan. Et c’est elle qui nous raconte
une partie de sa vie d’adolescente, envoyée par sa mère, Ama, au lycée international afin
de devenir médecin, ingénieur ou toute autre profession qui fait rêver Ama.
Ama
est une cuisinière hors pair mais la tenue d’un restaurant est un travail
énorme, usant, et ses mains dont la peau est toute crevassée en est
l’illustration la plus visible. La Grand-Mère est là aussi, digne, un peu rude
avec Chi Chi
qui ne sait pas plier correctement les serviettes en fleur de lotus, mais
pilier indispensable d’une famille venue se recomposer en France pour fuir la
guerre civile du régime des Khmers rouges, la folie de Pol Pot. On retrouve
ainsi au fil des pages les membres de cette famille poussée à quitter son pays
par les horreurs de la guerre. Oncle Deux, frère d’Ama, est devenu un chauffeur
de taxi très serviable : il explique à Chi Chi qu’il faut travailler dur et surtout
ne pas se faire remarquer. Sa femme Tata Meng tient une rôtisserie et soigne à
grand renfort d’eau de javel le carrelage blanc de son pavillon de grande
banlieue. Tata
Brigitte est un peu à part : elle a abandonné son prénom cambodgien
pour se faire appeler Brigitte, comme Brigitte
Bardot son idole, et s’active dans son salon de coiffure.
Les Olympiades (Paris 13) |
Ce roman chemine doucement entre la vie quotidienne de
la lycéenne et les péripéties du restaurant. Avec quelques moments festifs,
comme le Nouvel An chinois, ses cortèges et ses rituels. Pas simple pour nos
ados bien impliqués dans le maintien de traditions asiatiques de faire le
dragon dans les rues du 13ème.
Personnellement, la première fois que j’ai pris connaissance des
cérémonies de Nouvel An chinois, il y a déjà longtemps, j’habitais dans ce
quartier (très exactement tour Cortina, Cortina d’Ampezzo ville
italienne où ont eu lieu les JO d’hiver 1956…) : je ne savais pas du tout ce
que c’était et j’ai été très surprise d’être réveillée un matin par la musique
avec le gros tambour et les petites cymbales. Depuis les cérémonies sont
devenues plus spectaculaires et amènent dans le quartier de nombreux badauds.
Nouvel an chinois |
Quel stress ce restaurant ! Quelle angoisse quand il y
a un contrôle sanitaire ! Que de senteurs et de bruits dans la cuisine, comme
le crépitement des bouts d’ail qui dorent dans la poêle ! Puis Ama
malheureusement tombe malade et est hospitalisée. Le restaurant est fermé quelques temps. Chi Chi,
la Grand-Mère,
Oncle Deux,
les Tatas,
tout le monde ne veut pas croire, ne peut pas croire qu’Ama ne revienne pas parmi eux.
Et après avoir notamment expérimenté un remède traditionnel, la vie reprend, la
fête recommence. Cette fois-ci on est à la veille de l’année du Tigre, et c’est
dans la joie et l’allégresse que toute la famille se retrouve pour un repas
pantagruélique… Chi Chi
finira par avoir des réponses à ses questions sur ses origines. Tout est bien
qui finit bien.
En prime dans ce récit très asiatique, une jolie
parenthèse multiculturelle, avec Nabil le copain de Chi Chi, dont la mère El Khiatia,
femme de ménage à l’intérieur « nickel », cuisine divinement… le couscous.
Grace Ly est née
à Grenoble. Elle est arrivée dans le 13ème à l’âge de 6 ans. Grace Ly
est devenue avocate et s’est notamment engagée contre le racisme anti-asiatique
en France.
Bonne lecture
avec ce dépaysement au cœur du 13ème arrondissement de Paris.
Fayard - 250 pages
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