vendredi 26 avril 2019

BUTCH CASSIDY ET LE KID de George Roy Hill (1969) par Luc B. comme Butch



le vrai Butch
C’est l’anti LA HORDE SAUVAGE par excellence. Pourtant, que de points communs. Les deux films sortent la même année. Le nom de la vraie bande de Butch Cassidy s’appelait Wild Bunch, et le titre original de LA HORDE est... THE WILD BUNCH. Les histoires sont quasi les mêmes, des pilleurs de banque poursuivis par des mercenaires dans tout le pays, marqués à la culotte (de cheval) et qui vont finir en Amérique Latine criblés de balles par des centaines de gus. Y’a même une scène de train - fameuse - dans les deux films. Mais la comparaison s’arrête-là, évidemment, car autant LA HORDE n’est pas franchement un spectacle familial, autant BUTCH CASSIDY ET LE KID, oui.

La thématique de fond est aussi la même, mais propre aux westerns de la fin des 60’s, la fin d’un monde, insouciant, et l’avènement d’un nouveau, dans lequel les héros ne se retrouvent plus. C’est aussi le thème d’IL ETAIT UNE FOIS DANS L’OUEST de Sergio Leone, par certains aspects aussi de JEREMIAH JOHNSON (les deux avec Robert Redford). L’aspect nostalgique du film est traduit par la photographie surannée, ce générique sépia, les photos des héros en vadrouille à New York (la scène du manège forain, comme dans les 400 COUPS ?!). On retiendra cette réplique de Butch jetant son vélo dans un ruisseau en lui lançant « Va ! Bicyclette ! Le futur est à toi ! » avant que l'image se fige en sépia.  BUTCH CASSIDY est une grosse production, à la fois marquée par le Nouvel Hollywood, et un certain académisme westernien. Les acteurs Jack Lemmon et Steve McQueen avaient été d'abord retenus, Paul Newman devant incarner Sundance Kid. Il jouera finalement Butch Cassidy, et Robert Redford héritera de l'autre rôle. Le film a bénéficié d’un beau budget, d’un long délai de préparation et de repérages, deux mois et demi de tournage, un court métrage a même été réalisé sur les coulisses, préfigurant les making-of. Au final, un énorme succès public, critique, auréolé de quatre oscars.


On n'a pas mis trop de dynamite ? (z'était payé combien les cascadeurs ?)
L’histoire s’inspire de personnages réels, Butch s’appelait de son vrai nom Robert Leroy Parker, et sa sœur a même été conviée sur le tournage du film, 60 ans après la mort de son frère ! L’épilogue (réelle) en Bolivie n’est pas très claire, d’ailleurs la sœur pensait à l’époque que son frère était toujours vivant, sans doute à faire des partie de poker avec Jim Morrison quelques part dans les montagnes ! Avant cette fin tragique, Butch Cassidy et son compagnon de braquage Sundance Kid (flingueur émérite, voir la scène où un type le défie en duel avant d'apprendre à qui il a affaire, et de faire dans son froc) sont les pilleurs de banques les plus célèbres de l’Ouest, et ils réalisent un sacré coup : une double attaque de train. Scène célèbre, Butch Cassidy prévient gentiment l’employé de la compagnie de l’Union Pacific qu’ils vont faire sauter la porte du wagon, lui laissant une chance d’ouvrir avant. Le gars est pétrifié de peur, mais refuse : c’est son boulot de protéger le magot. Soit. On fait sauter la porte, mais la charge de dynamique est si énorme, que c’est tout le wagon qui explose, et les billets pleuvent à cent mètres à la ronde ! Et en c'temps-là, mes louloutes, les artificiers faisaient vraiment tout sauter, sans trucage ! Voir le petit gif, très impressionnant. Rigolo mais assez chiantes ces images qui bougent, pour rester concentré sur la lecture du texte, hein ?! Bref, l’employé s’en sort indemne. Car dans ce western, les bandits sont des gars bien, des gentils, pas les tueurs sans scrupules de Sam Peckinpah.  

Et idée de génie : la bande va attaquer une deuxième fois le train, sur le trajet de retour ! Fallait oser. Ce que l’Union Pacific n’apprécie pas. Les exploits des deux compères sont partout célébrés (comme pouvaient l’être ceux de Bonnie and Clyde, héros populaires et des gazettes à l’époque), alors on leur lancent aux fesses les mecs de la célèbre agence de détectives Pinkerton. L’idée ingénieuse de la mise en scène est de laisser constamment les poursuivants loin au fond de l’image, on ne voit qu’un nuage de poussière, ou leurs torches, de nuit. Ils ne sont jamais personifiés, ce qui les rend plus dangereux, opaques, symbolisant le destin funeste des héros, et qui fait dire à Butch régulièrement : « Mais c’est qui ces gars ? ».

Le film est à la fois un western, avec ce qu’il faut d’action, de coups de feu, de bagarres, d’aventures (la fameuse séquence dans les montagnes du Colorado, le saut  dans le ravin, Sundance avouant qu’il ne sait pas nager) et une comédie. Voir l'arrivée à la gare en Bolivie, une ruine peuplée de lamas, ou l'entrainement à l'espagnol, ne serait-ce que pour pouvoir dire « Les mains en l'air, c'est un hold-up ! ». On retrouvera ce mélange des genres dans SILVERADO (Lawrence Kasdan, 1985) ou dans MAVERICK (Richard Donner, 1994). La séquence la plus célèbre du film est celle où Butch fait le mariole à vélo, sa copine assise sur le guidon, sur la chanson de Burt Bacharach « Raindrops keep fallin’ on my head » (« Toute la pluie tombe sur moi » version Sacha Distel, et parfois la musique de Bacharah se teinte d’accent à la Michel Legrand). Une parenthèse bucolique, campagnarde, qui contraste avec la tuerie finale. L’époque change, et Butch, Sundance et Etta sont pris malgré eux dans la tourmente.

this is (bientôt) the end...
Car on a affaire à un trio. Il y a aussi Etta Place, l’institutrice, qui entre dans l’équation. Les deux hommes sont aimés de la même femme, qui l’aiment en retour, mais la relation entre les deux gangsters est aussi ambiguë. Quels sont réellement les sentiments de Sundance pour Butch ? Il y a un côté trip hippie dans ce trio, qui recherche une vie tranquille, retour à la nature, aux joies simples, une vie en marge des conventions (sentimentales, sociales et économiques), des mœurs libres, aspect marqué d’autant plus que la réalisation nous assène les tics de l’époque, les zooms, les focales longues.

Lassés d’être poursuivis, acculés et sans le sou, le trio déménage en Bolivie (comme les hippies partaient pour Katmandou !) où ils alignent les attaques de banques. Triste ironie, c'est lorsqu'ils veulent rentrer dans le rang, se trouver un vrai boulot, qu'ils seront contraints de tuer. Si Sundance avait avoué ne pas savoir nager, Butch avoue lui ne jamais avoir tué quelqu'un...

Évidemment, il n’y aura pas de suite au film, quoique, L’ARNAQUE (1974) du même George Roy Hill, (avec LE MONDE SELON GARP ses trois faits d'armes notables) avec encore Newman et Redford (la classe incarnée) a certains points communs avec BUTCH CASSIDY ET LE KID. Le rythme n’est pas intrépide, Roy Hill prend le temps de filmer comme ses protagonistes prennent celui de vivre, de profiter, c’est ce qui fait la spécificité de ce western atypique, divertissant, solidement réalisé. Et tout son charme vient du duo d’acteurs, Paul Newman et Robert Redford (qui a baptisé son festival de cinéma indépendant Sundance), méga stars à l’époque, comédiens engagés, exigeants, à jamais indissociables, comme Burt Lancaster et Kirk Douglas la décennie précédente. Ne pas oublier Katharine Ross, découverte dans LE LAURÉAT (Mike Nichols, 1967) au côté de Dustin Hoffman.

Du très grand cinéma américain, divertissant mais pas que, plus subtile, nostalgique et noir dans son propos. A le revoir on sent que le temps a passé, une patine un peu vieillotte, mais tout à fait raccord au thème du film, devenu un classique, qu’on peut (qu'on doit !) faire découvrir à des gamins… si y’en a encore qui aiment les films de cowboys ?

couleur  -  1h50  -  scope 1:2.35


Qualité vidéo un peu dégueulasse (c'est ça du Full Hd ?!!) mais la vraie bande annonce...

1 commentaire:

  1. Big Bad Pete13/5/23 16:23

    Vouiiiiiiiiiiiiiii !!! Une petite merveille, ce flim !
    Et ce dernier plan, avec l'image figée qui passe au noir et blanc vieilli : les deux rebelles entrent dans la légende !

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