Elisabeth Lamb (Rosario Dawson) Est-elle un agneau ? |
Je vous confiais il y a peu une certaine aversion pour
les films de zombies. À l'inverse je raffole des films étiquetés
"incompréhensibles", comprendre labyrinthiques, jouant à grand renfort
de fausses pistes sur notre capacité de déduction pour comprendre qui est qui,
ou encore : voyageons-nous dans la réalité ou le rêve et que déduire de l'ultime
information énigmatique envoyée en guise de provocation avant le générique de
fin ? En résumé le film à voir x fois, parfois en vain 😠.
Quelques exemples de mes chouchous dans le domaine : 2001 Odyssée de l'Espace de Stanley
Kubrick
qui entrecroise l'espace, le temps, la psyché cosmique… Inception
de Christopher Nolan ou un plongeon dans l’entrelacs des
rêves imbriqués sans certitude d'en être sorti. Du même auteur, le splendide Interstellar qui mêle space opéra avec les
théories sur les trous noirs, les trous de vers, et autres déformations
spatiotemporelles et particularités quantiques (avec la bénédiction du Prix
Nobel Kip Thorne – pour ses travaux
sur les ondes gravitationnelles - scientifique aux théories géniales mais très
contestées par la communauté des physiciens) et, cerise sur le gâteau : Mulholland Drive de David Lynch avec une belle brune
et une jolie blonde, un duo qui ne constitue peut-être qu'un personnage unique
balloté dans un univers onirique inquiétant, à chacun de tirer ses conclusions
(musique magnifique de Angelo
Badalamenti – Clic).
Et aujourd'hui, coup de projecteur sur un thriller
policier et psychologique pour ne pas dire occultiste sur fond de manipulation
sous hypnose. Je veux parler de Trance,
un film de 2013 ou Vincent Cassel
et sa bande de canailles affronte Rosario Dawson, une psy spécialiste de
ladite hypnose et toute aussi canaille. À moins que ce ne soit l'inverse. Le dernier
plan fournira une réponse totalement ambiguë sur le quoi sans vraiment répondre
sur le mystère du comment et sur l'existence même des faits et des protagonistes.
Simon se creuse la tête |
Bienvenue à Londres chez Christie's ou Sotheby's, ces
salles de vente londoniennes où il est imprudent de lever le bras pour se
gratter la tête, geste qui pourrait être indûment interprété comme une enchère
pour l'achat d'un tableau tarifé à 25 000 000 $ ou £…
Simon (James McAvoy), est un
trentenaire commissaire-priseur d'art. On l'a formé à sauver un tableau en deux
temps trois mouvements en cas d'attaque terroriste picturale ; protocole :
saisir le chef-d'œuvre (enfin si c'est les noces de
Cana de Véronèse – 10m x 7m environ, contacter Vin Diesel), le ranger dans une housse high-tech
puis le "poster" vite fait dans une "boîte à tableau" blindée en
attendant les flics. Précautions utiles car trop de tableaux ont disparu à
jamais tel Tempête sur la mer de Galilée de
Rembrandt.
(J'en profite pour illustrer mon papier de quelques-unes des œuvres haut de gamme présentées
dans le film.)
Simon est chargé
de la vente du Vol des sorcières de Goya,
pas immense mais hors de prix. Mince, un groupe hyper violent a réussi à
envahir la salle, a balancé des fumigènes. Il faut sauver le soldat Goya.
Simon embarque la toile, on suppose
qu'il emballe l'objet, puis arrive face à la "boîte postale"
salvatrice… Trop tard, le chef du gang, Franck (Vincent Cassel) l'attend, fusil
mitrailleur à la main. Gargle ! Simon
essaye de le "taser",
en vain. Il se prend un coup de crosse sur le crâne… Franck rejoint ses complices, fonce en bagnole dans une planque,
ouvre la housse et sort le magnifique et couteux… cadre totalement vide !!!
Franck le ténébreux et ses guignols... |
Après cette intro assez classique, le film s'égare fébrilement dans la douce folie (dans tous les sens du mot). Franck et ses pieds nickelés essayent les bonnes vieilles méthodes
de l'inquisition pour rafraîchir les neurones de Simon : les baffes, quelques ongles arrachés. Rien n'y fait,
l'amnésie est confirmée. La poisse et un Goya introuvable. Ah, un espoir : le neurologue
suggère une psychothérapie par hypnose, on ne sait jamais. Simon choisit sur internet, sur un critère plus lié à la séduction
qu'au hasard, une jolie métisse hypnothérapeute prénommée Elisabeth (Rosario Dawson).
Premier rendez-vous pour Simon (pour retrouver ses clés de bagnole à titre de test). Étrange, la belle
psy se statufie et porte la main à son cou en le voyant arriver ! Bizarre ça… Cela dit on retrouvera
les clés !? Séance suivante, la chasse au Goya commence. Les scènes de
voyage astral dans les rêves et les souvenirs alterneront en continu dans le
film avec celles plus narratives d'une enquête classique. Et nous, on ne sait
plus trop, Danny
Boyle nous ballade entre réalité supposée et illusion. Un imprévu et
de taille, Elisabeth lit le journal et découvre le pot au rose. Elle n'est pas une quiche pour patients friqués hauts en couleur et bien azimutés
par leurs fantasmes. Elle voudra sa part du gâteau…
Blague de mecs à part, Danny Boyle oscarisé pour Slumdog Millionaire réussit presque un sans-faute
à travers ce dédale à suspens allié à une action intense : réalité ou imaginaire ; avant, maintenant, plus
tard ; hallucinations survoltées ? Un réjouissant puzzle psychique qui échappe cependant à une logique
rigoureuse lors du montage. La scène gore où Franck continue de bavasser sans le haut du crâne suite à une
tuerie digne de Réservoir Dog affiche trop explicitement
la nature des illusions manipulées par Elisabeth,
le réalisateur nous volant ainsi notre liberté d'échafauder nos hypothèses.
Cela dit on peut s'y perdre avec gourmandise jusqu'au coup de théâtre final. La
question : Simon ne fait-il qu'un
avec Franck. Ben heu… Ah peut-être,
non le revoilà, mais… Noooon pas le générique de fin… Grrr ! A noter un petit soupçon de féminisme en prime.
Belle photographie d'Anthony Dod Mantle. Ni du Kubrick,
ni du Nolan
ou du Lynch,
mais réjouissant pour un amateur de récit tordu. Sonia n'a pas aimé, elle préfère
les scénarios sans chausse-trappes…
Format :
couleur - 35 mm - 2,35:1 – 101 minutes
La tempête sur la mer de Galilée de Rembrandt (1633, volé en 1990) ; La maja (vénus) nue de Goya de 1800 et le vol des sorcières de Goya de 1798 qui appartient désormais à…
A mon humble avis, ça vaudrait bien un 5/6.
RépondreSupprimerDe mémoire, l'accueil a été mitigé ; certains n'hésitant par à le décrire comme un essai moyen car inutilement alambiqué, alourdi par des scènes inutiles, alors que d'autres ont crié au génie.
Au moins, Danny Boyle, comme bien souvent, essaye de sortir des standards.
Ma foi, à bien y repenser, je suis d'accord. C'est un coup de cœur... donc je ne devrais pas essayer de noter "objectivement"...
SupprimerLa scène avec Vincent Cassel transformé en œuf à la coque est un peu excessive, mais tout compte fait confirme que nous sommes depuis longtemps sous l'emprise des délires insufflés par la belle Rosario :o)