Sonia et Nema
sont dans le métro. Une annonce de la RATP signale qu’en raison d’un paquet
suspect à la station Barbès Rochechouart, le trafic est interrompu sur la ligne
4.
- Rochechouart comme la Montespan ? demande Sonia passionnée d’histoire de
France, plutôt version people.
- Oui sans doute, mais Barbès lui n’a rien à voir avec Rochechouart.
C’était un homme politique du XIXème siècle je crois, répond Nema.
- Ah, la Montespan… Cette beauté incomparable, blonde au tain laiteux,
piquante…. Et quel destin !
- Sonia tu te calmes, ce n’était qu’une dévergondée et son histoire n’a pas
particulièrement bien fini, riposte Nema.
Jean Teulé |
Madame et Monsieur le marquis se sont
mariés un peu par hasard à la suite d’une rencontre fortuite dans un lieu de
justice. Le jeune Gascon est, dès qu’il la voit, subjugué par tant de beauté et
de grâce : une belle blonde appétissante avec les rondeurs fraiches de la
jeunesse, une voix claire et un à propos charmeur. Bref, le coup de foudre.
Elle vient d’apprendre que finalement, elle ne pourra pas épouser le sieur de Noirmoutier à qui elle était
destinée. Mais bon, après tout, ce joli grand gaillard venu de Guyenne à Paris
est très attirant avec sa spontanéité et pas vilain du tout. Alors ils se
marièrent en janvier 1663. Le mariage démarre avec des rires et de bruyants
jeux amoureux dans leur petit logement de la rue Taranne, au-dessus de la
boutique du perruquier Joseph Abraham,
propriétaire de la maison.
Mademoiselle Françoise de Rochechouart
de Mortemart est issue d’une grande noblesse, ce qui n’est pas le
cas de Louis-Henri de Pardaillan, marquis de Montespan dont le château de
Bonnefont n’est ni très grand ni très luxueux et dont les terres ne rapportent
pas beaucoup. Pas bien riche la famille de Montespan et en plus,
malheureusement, Françoise et Louis-Henri sont très joueurs : ils sortent
énormément, perdent de l’argent et s’endettent.
LE marquis de Montespan |
Françoise-Athénaïs de Montespan |
Alors notre gaillard de marquis ne se laisse pas
faire, il veut montrer qu’il est le mari et que tout cocu qu’il soit devenu, il
reste l’amour unique et légitime (et de son point de vue le seul) de sa Françoise-Athénaïs. Non, il ne sera pas le
mari que le Roi achète pour avoir la
paix et profiter tout à loisir de sa favorite. Le Roi
est un voleur, un sale séducteur ! C’est horrible l’hypocrisie qui habite cette
noblesse de cour qui ne fait qu’applaudir tout ce que le Roi
dit ou décide. Ah l’infâme Lully
avec ses bas de soie rose ! Seul l’oncle de Louis-Henri,
Henri Grondin archevêque
de Sens, défend ce pauvre marquis bafoué. Mais cela n’aura qu’un
temps. A noter un passage rigolo, enfin si on veut, le moment où Montespan va à la cour de
Saint-Germain-en-Laye avec son carrosse complètement transformé, peint en noir
et avec de grandes ramures de cerf aux quatre coins. Quel attelage et quelle
audace ! Cette façon d’affronter le Roi, cela lui coutera cher à ce pauvre
marquis. Après de nombreuses péripéties et désagréments, il est contraint de
revenir dans les terres de sa famille, dans ce château délabré de Bonnefont. Il
croira encore pendant des années à un retour possible de sa belle (qui pendant
ce temps-là fabrique des bâtards débiles…). Et finalement, le temps passe, la
favorite n’est plus favorite… Et chut ! Je ne vous dirai rien de la fin de
cette longue histoire.
Dans ce récit très coloré, on croise des nobles qui se
battent en duel, un Lauzun énigmatique, des
paysans frustres mais finalement humains, des gens en partance pour les
Amériques (pas vraiment de leur plein grès), toute une foule riche ou pauvre,
maquillée pour cacher la misère d’une époque où on ne se lavait pas ou
simplement sale de la crasse du travail dur de la ville ou des campagnes. On y
sent des parfums de fleurs délicates, mais aussi l’âcre odeur des ordures dans
les rues ou la piquante senteur des chandelles de suif de mouton. On y entend
bons mots et propos des plus grossiers, musique de cour et fausses notes de
cloches fêlées. Quelle atmosphère !
Roman de cape et d’épée aux rebondissements nombreux. Jean Teulé nous offre un beau portrait
d’homme de conviction et d’amour, un peu naïf et très têtu, c’est le moins que
l’on puisse dire, mais attachant.
Pour ce roman, Jean
Teulé a reçu le prix Maison de
la Presse et le Grand prix
Palatine du roman historique.
Bonne lecture !
Editeur Julliard, POCKET
307 pages
Extrait du film Le roi s'amuse avec une musique de Lully. Un tableau de 1669 de Adam Frans van der Meulen représentant la construction du palais de Versailles et pour finir : un documentaire sur les guéguerre entre courtisanes à la cour du Roi Soleil...
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