lundi 28 janvier 2019

RENAISSANCES de Tarsem Singh (2015) – par Claude Toon




Richissime, le luxe mais seul et un pied dans la tombe (Ben Kingsley)
XXXXX
Les manipulations génétiques, le clonage (humain*), la course au vieillissement en pleine forme voire même à l'immortalité, sont des sujets qui nourrissent l'imaginaire des cinéastes pour le meilleur ou pour le pire. Le mythe du Frankenstein de Mary Shelley a engendré une filmographie pléthorique. Comme souvent, j'ai regardé Renaissances par hasard sur le câble, sans a priori, en espérant au minimum passer une bonne soirée… Ce fut le cas, même si nous ne sommes pas face à un chef d'œuvre très fouillé dans les implications bioéthiques et philosophiques de l'histoire qui flirte avec le fantastique. Cela dit, face aux méthodes de biogenèse de plus en plus sophistiquées qui posent question (comme la PMA ou la GPA actuellement), un thriller bien ficelé peut aider au débat pour un large public qui n'est pas bardé de doctorats de généticien.
* Je ne suis pas un adepte des conspirationnistes, mais quid des labos bien cachés des gouvernements totalitaires ?

Damian Hale (Ben Kingsley) se meurt. Architecte et promoteur richissime, arrogant et sans pitié, il attend la grande faucheuse. La faute à un cancer que sa fortune ne fera pas fuir… Un seul regret : la brouille consommée avec sa fille Claire (Michelle Dockery) qui, plutôt que la course au fric, a choisi de créer une ONG caritative pour contredire papa.
Damian a un ami proche avec qui il a construit son empire, Martin O'Neill (Victor Garber). Un véritable ami qui glisse dans la poche de Damian une carte au nom de la firme PhoenixPhoenix : l'oiseau mythologique qui renaît éternellement de ses cendres. L'activité de Phoenix est un peu indéfinie : la santé à long terme par une technique nommée "la mue". Damian, intrigué, prend contact avec le boss, le professeur Albright (Matthew Goode), beau gosse en pleine santé qui a repris à son compte les travaux du Dr Jensen qui professait l'imminence de l'immortalité grâce à la science, uniquement pour les soi-disant "grands hommes" utiles à l'humanité. Drôle de toubib déjà mort, victime lui-même d'une grave maladie neurodégénérative.
Damian et le Dr Albright, excellent commerçant...
Dans le plus grand secret, Albright propose en échange de plusieurs centaines de millions de $ de transférer l'esprit de Damian (conscience, souvenirs, âme – le grand jeu) dans le corps d'un homme jeune tout neuf. Un corps créé par génie génétique et au cerveau vierge de la moindre donnée, des pièces détachées assemblées, pas de père ni de mère, en un mot : la méthode Frankenstein en moins artisanale. Damian accepte sachant qu'il devra donc passer pour mort, être "effacé" sans l'aide Schwarzi, changer de nom… La scène du transfert rappelle étrangement par la disposition de deux scanners en parallèle celle de l'échange des consciences à la fin de Frankenstein Junior entre la créature et le baron vivisecteur, un film commenté par Luc fin 2018…
Le nouveau Damian (Ryan Reynolds) doit apprendre à maîtriser ce nouveau corps robuste et séduisant, l'apprentissage est rude. Requinqué, il profite à fond de la liberté retrouvée dans la "très" chaude Nouvelle-Orléans où doit se trouver planqué ce laboratoire issu d'un épisode de X-Files ; les conquêtes féminines à tour de bras, la grande vie sans aucune moralité. Damian est bien resté tel qu'en lui-même.
Juste un petit effet secondaire visuel : des flashs, des souvenirs parasites qu'il faut contrôler à coup de pilules rouges offertes avec parcimonie par Albright. Des scènes oniriques et syncopées mais récurrentes : une jeune femme latino et sa fille de cinq ans que Damian n'a jamais connues et puis ce château d'eau en forme de citrouille que Damian trop curieux identifie sur le net comme étant situé à Saint-Louis où il n'a jamais mis les pieds.
Albright lui suggère (impose) un break à Hawaï. Damian désobéit et part se rancarder sur les citrouilles perchées à Saint-Louis et farfouiller dans les environs. Grave erreur, sa vie bascule en enfer…

On fera les présentations plus tard
Très rapidement le film s'oriente vers le thriller… Qui est réellement Albright et comment "fabrique-t-il" ses clones ? Quelle puissance occulte protège ses activités illégales réservées aux milliardaires en quête de jeunesse éternelle ? Damian NG (Nouvelle Génération) n'aurait pas dû se poser la question. Avoir tenté de lever le voile le transformera en gibier, le gêneur à éliminer pour protéger Phoenix. Qui est cette femme latino (Natalie Martinez) qui envahit sa psyché ? Virtuelle ou réelle, si oui quel lien a-t-elle avec le cerveau neuf de Damian ?

Un autre film, The Island de Michael Bay avec Scarlett Johanson et Ewan McGregor de 2005 posait déjà la question du dévoiement de la génétique. Un savant cupide dupliquait des clones de gens friqués qui disposaient ainsi d'un "réservoir" d'organes, de greffons de rechange en cas de maladie grave. Un certain parallèle avec notre film où on propose des corps neufs à une élite, l’idée étant de maintenir en vie le plus longtemps possible une élite de privilégiés (les Einstein du moment, les grands managers, etc.) au bénéfice de l'humanité. Hypocrisie, mensonge et totalitarisme en réalité, on l'apprendra dans le film, une entreprise monstrueuse uniquement destinée à satisfaire l'orgueil de Albright et de rincer des milliardaires terrorisés par le grand saut. Dans Time-out de Andrew Niccol en 2011, l'humanité avait instauré la spéculation et le trafic de l'espérance de vie (une heure de travail = 2h de vie et le petit noir à 2 minutes, la mort quand le compte est à sec).

"Sympa ton plan pourri de résurrection Martin"
Point commun à tous ces films, dénoncer, peut-être mollement, mais dénoncer quand même à travers un divertissement, la mise aux enchères de la santé et de l'espérance de vie. Tout cela flirte avec le style polar mais a le mérite de poser le problème. Le trafic d'organes existe bel et bien avec son lot d'horreurs comme l'achat du sang à des miséreux du tiers monde. Il y a quelques années, on avait retrouvé une fillette de dix ans errant hagarde dans une ville d'Amérique centrale. Dans sa poche quelques billets de 100 $ mais ses yeux avaient été énucléés à des fins de greffes de cornée, sans doute aux USA. Véridique, l'abjection ultime ! Ce sujet est d'ailleurs également au centre du film mais… chut !

Si Ben Kingsley disparaît rapidement mais épice le casting, donc la promotion du film, Ryan Reynolds campe un personnage crédible avec son gabarit d'athlète, ses prouesses de commando (ce qui intrigue le Damian originel peu porté sur les arts martiaux), son look de séducteur. Matthew Goode incarne une tête à claque de toute beauté. Les seconds rôles dont je ne peux pas parler sans spolier le film sont excellents. Plutôt bien filmé, un tantinet envahi par des courses de bagnoles et des séances de baston héritées des exploits d'un Jason Bourne ou Jason Statham, on ne chôme pas. Pas génial mais palpitant et pas de montage trop hystérique…
Je joins comme de coutume la Bande-annonce qui à mon goût donne trop d'indices, mais bon…

Format : couleur - 35 mm - 2,35:1 – 116 minutes.




1 commentaire:

  1. Ce que j'aime beaucoup chez Ryan Reynolds, mais vraiment beaucoup c'est... sa femme (Blake Lively...)

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