Gus qui charme... |
Gus qui flingue... |
Phoenix, Arizona. Blakelock (William
Prince), le chef de la police locale confie à Ben Shockley (Clint Eastwood) une mission suicide :
escorter depuis Las Vegas un témoin "suicidaire" qui permettra de faire tomber un
parrain de la mafia. Ben Shockley : alcoolo, désabusé, célibataire, ronchon, la réplique
gaillarde… un clone de l'inspecteur Harry. On comprend d'emblée que Blakelock n'a pas
choisi Ben par hasard, c'est le seul flic intègre du coin, ce qui n'est pas son
cas, et son émissaire va devenir la cible tout autant que le témoin. En fait
tous ses services sont corrompus. On a deux camps, scénario simple : que des
méchants ! Sauf trois : Ben Shockley, son collègue et ami Josephson (Pat Hingle) un peu naïf et
qui attend la retraite et… le, ou plutôt, LA témoin Gus Mally (Sondra Locke)
petite blondinette craquante, sexy, mais qui vocifère comme
une poissarde. Ben comprendra mieux l'écart entre le look et les diatribes volcaniques
de la dame quand il apprendra que Gus vit de
ses charmes. Parlant le même langage de charretier, Ben et Gus vont devoir coopérer car ils ont une trèèèèès longue route à faire.
Le principe du film est simple : prises de bec piquantes
dans le duo improbable, et embûches pour qu'il n'arrive pas vivant à Phoenix. Enfin, en termes
d'embûches, des guets-apens ourdis par Blakelock, des fusillades qui iront
crescendo jusqu'à l'absurde, la bataille de Stalingrad revue par Tex Avery. Dans l'ordre : une maison,
une bagnole de flic, la moto taxée à un biker, un train (fourgon à bestiaux),
et un bus… L'Arizona : un terroir de barbares.
Ces fusillades délirantes et humoristiques successives assurent à leur
manière l'originalité de la mise en scène plutôt nerveuse. On peut trouver
cela parfaitement vain et idiot, mais l'outrance, le nombre de projectiles exponentiel
me fait toujours marrer (je suis un grand gamin ?). Quand je parlais de surréalisme,
je faisais dans l'euphémisme. Le clou du film sera la traversée de Phoenix sur
1 ou 2 km par un bus mitraillé par une armée de flics. Quand je dis une armée,
les keufs surarmés sont au coude à coude, ont envahi les trottoirs et les toits des
immeubles. On croirait qu'à Phoenix, le seul bassin d'emploi existant recrute des flics
bons tireurs. Pour paraphraser les critiques d'Hernani, ça n'a ni queue ni tête,
mais c'est le charme déjanté de ce final apocalyptique. Ah je les entends déjà les
rationalistes : même si Ben a improvisé à grand renfort de tôle épaisse et de
chalumeau un blindage autour du poste de conduite, rien pour protéger le moteur
ni les pneus (qui finiront par exploser). Quant aux tireurs placés des deux
côtés des rues, un miracle qu'ils ne s'entretuent pas entre eux et que les
boutiques tiennent encore debout à la fin de ce remake de la bataille de Karkov… Blakelock avait
pourtant suggéré l'emploi d'un bazooka pour limiter les frais en personnel… On
n'écoute jamais assez la hiérarchie de nos jours.
Côté dialogue, là on ne parle plus de Hugo. Ben reprend
la phraséologie de l'inspecteur Harry : grossière mais bien à propos. Le film est rythmé,
l'action classique mais imaginative, la photographie correcte. Le personnage de
Gus évolue au rythme de cette folie pétaradante. Au départ
plutôt encline à prendre la tangente pour ne pas avoir à témoigner, l'héroïsme
borné de Ben la contaminera, un petit bout de femme qui ne
s'en laissera pas compter. Eastwood peaufine le personnage sadomasochiste que l'on retrouvera dans ses westerns géniaux et crépusculaires. Il a déjà tourné L'Homme des Hautes Plaines en 1973.
C'est amusant, j'ai lu que l'on avait pensé au départ à
d'autres castings, notamment : Steve McQueen
et Barbra Streisand, et la réalisation aurait
dû être confiée à Sam Peckinpah
ou Walter Hill. Sam
Peckinpah tournera Le convoi, autre film pour le moins mouvementé
et violent et, lui aussi, de style road movie. Des projets qui montrent que le
scénario n'était pas destiné à un nanar, ce que L'épreuve
de force n'est pas. Je l'ai revu sur le câble avant de pondre ce
billet. Je suis persuadé que la vente des passoires a dû faire un bond financier
lors de la sortie 😀.
Désolé, la bande annonce en VF n'existe pas et celle
en VO n'est pas top.
Je l'aime bien ce film. C'est sympa, pour rire (quoique la scène du viol dans le train...) se détendre et remplir les caisse du Clint producteur aussi ! Et ça préfigure ce que sera le cinéma d'action musclé des années 80/90, Schwarzy, Willis, Gibson, à côté duquel celui-ci passe pour Bambi. Il y a de très bonnes scènes, et il faut avouer que la chevauchée héroïque du bus, est énormissime !
RépondreSupprimerEt une affiche non moins célèbre (presque) réalisée par l'immense Frank Frazetta.
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