7eme escale en Australie de cet été pour y (re)découvrir les groupes qui ont fait l'histoire du rock de l'ile-continent, et parfois l'histoire du rock tout court. Ce qui est le cas du combo dont nous allons parler aujourd'hui qui reste un des précurseurs d'un mouvement qui fit exploser les codes musicaux (et sociaux) à la fin des années 70 : le mouvement punk. Si quand on pense punk on pense d'abord aux groupes anglais (Clash, Sex Pistols, Damned) ou yankees (Ramones) il ne faut pas oublier leurs homologues australiens des Saints; à mon humble avis le plus doué de tous (avec les Clash).
Tout commence pour eux à Brisbane en 1973 quand 3 camarades de collège Chris Bailey (de parents irlandais, il a grandi à Belfast - chant, songwriting, il se mettra à la guitare plus tard) ), Ed Kuepper (d'origine allemande- guitare, songwriting) et Ivor Hay (drums) forment un groupe : Kid Galahad & the Eternals (référence au film de 1962 Kid Galahad, film musical avec en vedette Elvis Presley) . Leurs influences sont le rock de Little Richard ou Elvis, le garage rock de leurs compatriotes les Missing Links ou les furieux MC ou Stooges, bref, ils ne font pas dans la dentelle mais dans le rock'n'roll survitaminé. L'année suivante ils se renomment the Saints , la compo a un peu changé entre temps avec l'arrivée de Kym Bradshaw (basse , il sera remplacé après le premier album par Alasdair Ward) et ils se font connaitre par des shows torrides (trop parfois, certains dégénèrent et sont interrompus par la police..).
Un soir en attendant le dernier bus, Kuepper écrit les paroles de "I'm Stranded" (je suis échoué(ou paumé)) , bientôt mis en musique sur un vieux riff d'Eddie Cochran retravaillé , aucune maison de disques n'en veut, ils produisent donc le 45 tours dans l'indifférence généralisée des médias qui n'ont pas compris qu'ils tenaient là un grand titre, porteur de toute la rage d'une jeunesse énervée. Sauf un, un journaliste australien expatrié en Angleterre et qui écrit pour le magazine Sounds, qui décèle le potentiel du single et l'érige "disque de la semaine ...et de toutes les autres" .
EMI qui vient de virer les Pistols demande à sa filière australienne de signer ces Saints jusqu'alors totalement inconnus, ils dépêchent à Brisbane un directeur artistique avec un contrat et une valise de billets, et l'album est mis en boite en 2 jours, dans l'urgence, un album monstrueux, une déflagration sonique digne des Stooges d'Iggy mais pas que car ces bougres, contrairement à d'autres gangs catalogués punk, savent jouer, capables de balancer un mid tempo bluesy et poisseux ("Messin with the kid"), une reprise d'Elvis ("Kissin cousins") , un truc inspiré des Beatles ("Eurotic neurotic") ou l'explosif "Nights in Venice" qui ferait passer le MC 5 pour les petits chanteurs à la croix de bois...
Les Saints sont alors au top, tournent en première partie d'AC/DC et de Radio Birdman, puis en Angleterre où ils ouvrent pour les Ramones. Mais ça ne se passe pas très bien , comme pour Radio Birdman d'ailleurs, également jeté en Angleterre, différence de culture sans doute. De plus ils refusent les conseils de la maison de disque de se relooker en punk, cheveux rasés et épingle à nourrice dans les naseaux. Une incompréhension car on assimile alors tout ce qui est jeune, en révolte et joue vite à du punk, alors que nos Saints ne sont pas un groupe punk pur et dur à la Sex Pistols ou premiers Clash.
Ils le prouvent avec le second album "Eternally yours" (78) qui inclue des éléments rythm'n' blues et encore plus avec le troisième "Prehistoric sounds" (78), leur meilleur (pour moi) ou cohabitent influences jazzy, blues, pop, parfois des cuivres, un piano, ou un harmo déchaîné comme chez Dr Feelgood; un grand album qui par bien des aspects se rapproche du "London calling" des Clash. L'alchimie est alors parfaite entre a voix magique de Bailey, les riffs distordus de Kuepper et une rythmique nerveuse .
Mais les relations entre Bailey et Kuepper se dégradent, pour des divergences artistiques notamment.
Ce sera la fin de la première mouture du groupe, qui continuera avec de nouveaux musiciens autour de Bailey et sortira une dizaine d'albums -dont 2 pour le regretté label français New Rose- , le dernier en date est paru en 2012 ("King of the sun"). Bailey mène parallèlement une carrière solo et produira 7 albums sous son nom . Kuepper mènera aussi de front carrière solo et différents groupes (Laughing clowns, the Aints) , Ward jouera avec les Damned, Hay avec les Hitmen puis il rejoindra Bailey pour une mouture des Saints.
Je n'ai pas écouté les derniers albums des Saints mais j'ai pu lire qu'ils étaient plutôt bons mais inégaux , si un lecteur fan pouvait nous donner son avis ce serait sympa...
Ce qui est certain c'est que "I'm stranded" et "Prehistoric sounds" sont indispensables à toute discothèque rock -ils rentrent d'ailleurs tous les 2 dans les "100 best australian albums"- , très bon bouquin (en anglais) sur le rock australien et qu'ils sont inspiré des générations d’apprentis rockers.
(un coffret regroupant les 3 premiers albums + un bon live est facilement trouvable pour une poignée d'euros : "all times trough paradise")
ROCKIN-JL
jeudi 30 août 2018
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