mardi 26 juin 2018

TEN CC - "ORIGINAL SOUNDTRACK" (1975) - par Pat Slade



Rarement je pousse un petit coup de gueule, mais aujourd’hui je ne vais pas me priver !



TEN CC et sa cage dorée 





Ten cc restera prisonnier d’un titre et d’un album, comme Michèle Mercier dans le rôle d’ «Angélique Marquise des Anges». Pourtant le combo originaire de Manchester va au cours de ses 23 années d’existence sortir 17 albums (11 en studios et 6 lives). Et un seul va rester, le troisième : «Original Soundtrack». Beaucoup de groupes sont restés coincés par un titre et pas seulement Ten cc, «A Horse With No Name» dans le premier album du groupe América sera aussi un véritable frein à leur carrière. Qui pourrait citer un autre titre du band de Gerry Beckley pourtant riche de 17 albums studio ? Ou encore The Turtles avec «Happy Together» et Herman’s Hermits et «No Milk Today». C’est comme si Procol Harum n’avait construit leurs succès qu’avec «A Whiter Shade Of Pale» et Les Moody Blues et son slow qui tue : «Night In White Satin». Voila pourquoi je m’énerverai contre une grande majorité d’imbéciles qui usera les sillons d’un album sur uniquement un titre et fera l’impasse sur le reste de la discographie et après ne s’intéressera plus à l’histoire d’un groupe et passera à autre chose. Et Ten cc fait partie de cette catégorie de groupes prisonnier d’un titre, pourtant sa musique pop est agréable à écouter et la richesse de ses créations et de sa diversité musicale demanderaient à ce que l’on s'y penche plus sur le sujet. Ne pouvant pas faire une énumération de tous leurs albums, je parlerai de celui qui a fait leur célébrité «Original Soundtrack».   

Ten CC : un drôle de nom pour un groupe et comme on me l’avait demandé pour Barclay James Harvest, quelle est la signification de leur nom ?  Ils seront nommés ainsi par leur producteur Jonathan King en référence au volume de l’éjaculation moyenne qui est de neuf centimètre cube. Comme ils prétendaient être justes au dessus de la moyenne masculine, ils ont arrondi à 10. Ten cc est un des rares groupes ou tout les musiciens sont polyvalents, chaque membre compose, écrit, chante, produit et tous sont multi-instrumentistes.  Ce sont quatre potes, Eric Stewart et Lol Creme issus du même quartier ainsi que Kevin Godley et Graham Gouldman qui fréquentaient la même école. Creme et Gouldman vont dès 1964 créer un groupe The Wirlwinds. Ils commencent à composer plusieurs titres et les producteurs sont attirés par leurs potentiels artistiques. En parallèle, Eric Stewart joue avec Wayne Fontana and the Mindbenders et ils feront un tabac avec le titre «The Game Of Love» (Si, si, vous connaissez !), au départ de Fontana, Stewart passera chanteur soliste et Gouldman les rejoindra comme bassiste, mais en 1968 le groupe se sépare.

Les quatre musiciens rejoignent le Strawberry Studios à Stockport et se mettent à collaborer avec plusieurs producteurs. Après plusieurs changements de nom et en quête d’une maison de disque en vain, ils décident de contacter un ancien producteur de Strawberry qui leur permettra de signer chez UK Records et ce sera aussi lui qui trouvera le nom définitif au groupe. En 1972 leur premier single «Donna» arrivera second dans les charts au Royaume –Uni. Il faudra attendre l’année suivante pour qu’ils arrachent la première place avec «Rubber Bullets». Les trois titres suivant se classeront tous et ils sortiront leur premier album éponyme qui contient une dizaine de titres. 1974, nouvelle album «Sheet music» qui contient le titre «The Wall Street Shuffle».

Le groupe va signer un juteux contrat avec Mercury Records qui leurs permettra de sortir le fameux «Original Soundtrack». Une Bande Original autonome, il n’y a pas de film qui va avec. Les dirigeants de la maison de disque mettront uniquement des billes dans l’affaire avec le titre «I’m Not In Love», pourtant le premier single qui sortira sera «Life Is a Minestrone» qui se classera n°7 dans le top 10 en Angleterre. Un album très hétéroclite et déconcertant, le premier titre «A Night In Paris» sera le titre déclencheur qui servira de source d’inspiration à Queen pour créer «Bohémian Rhapsodie». Une image d’un Paris désuet et vieillissant, klaxons de bicyclettes, des bruits de pas et de bouteilles qui s’entrechoquent, une fresque en trois parties longue de neuf minutes, un dialogue où s’entrecroisent plusieurs personnes, une image des vieux films noirs des années 50. On passe directement au tube de l’album «I’m Not In Love», écrit à l’origine sur un rythme de bossa nova. Le groupe détesta tout de suite cette version et revint à une version plus angélique avec que des voix et il fera tout le backing track avec une chorale massive créée par eux-même avec des bandes magnétiques qui simuleront un chœur de 624 voix, presque le même travail que Queen fera plus tard en studio. Le morceau doit son succès à son chœur suspendu et à son atmosphère feutrée, n°1 en Angleterre, n°2 aux Etats-Unis, «I’m Not In Love» sera le déclencheur qui leurs permettra de percer dans le monde. The Pretenders reprendront le titre pour la BO du film «Proposition Indécente» en 1993.

Les deux morceaux suivants, très entraînants, «Blackmail» et «The Second Sitting For The Last Super» très bien construit, présenteront de belles parties de guitare. «Brand New Day» Encore un moment calme et nostalgique avec une belle partie de piano accompagnée par des chœurs et une belle mélodie. «Flying Junk» Encore une orchestration très riche et un titre (Comme tout les autres) construit en plusieurs parties. «Life Is A Minestrone» Le deuxième hit de l’album, une chanson complètement stupide (Il suffit de traduire le titre) qui réduit la condition humaine au contenu d’un garde-manger, mais la musique est entraînante et ne manque pas de charme. Et pour finir l’album avec cette ambiance de vieux film noir, «The Film Of My Love» rien de pop ni de Rock dans ce morceau, plutôt comme si Kurt Weill avait fait un voyage de Berlin à Paris.

The End ! Avec une pochette illustrée par Hipgnosis (Créateurs des pochettes de Pink Floyd), le concept a bien fonctionné.

Mais Ten cc ne sera pas le groupe d’un unique album, l’année suivante, les gars vont récidiver avec «How Dare You». Deux hits, «I'm Mandy Fly Me» et «Art for Arts Sake» se classeront dans les charts Anglais, mais pour le reste du monde, le groupe va doucement disparaitre comme s'il n’avait jamais existé. «I’m Not In Love» aura été le fil déclencheur et le frein à une carrière internationale pour Ten cc. Après un dernier album en 1995, le groupe va éclater, le seul restant Graham Gouldman était avec Ten cc et aux dernières nouvelles, toujours en tournée.

Alors quand vous entendrez un groupe avec un morceau qui vous touchera, quelque soit le genre, ne vous arrêtez pas uniquement sur ce seul titre, intéressez-vous au groupe, à ce qu’il a fait et à ce qu’il fera ! 

2 commentaires:

  1. Il ne faut pas oublier les maisons de disques qui poussent les groupes à sortir un « hit », justement pour booster les ventes d’un album (le 45 tours sortait parfois bien avant pour aiguiser l’intérêt). Cette politique commerciale « tête de gondole » a perduré pendant des décennies (aujourd’hui, on télécharge juste des singles, rarement des albums entier). Et on sait qu’après un succès, on en cherche un deuxième, dans la même veine si possible…

    Prétendre que seul le public imbécile est responsable, c’est un peu vache ! Les gens vont où ils aiment, où ils veulent. Tout le monde ne peut pas sortir un « Sticky Fingers » 100% sans déchet. Même un disque comme « Hotel california » (et le groupe qui va avec) est vampirisé par sa chanson-titre, alors que le reste est aussi bion, voire meilleur !

    Mais tu as raison, la liste de groupes connus pour une seule chanson est longue ! Je pense à Steppen Wolf aussi…

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  2. A un moment, je voulais faire un truc sur Ram Jam avec "Black Betty", un groupe qui fut fabriqué de toutes pièces par les majors et qui ne fit qu'un album !...Enfin de compte, je vais surement faire une chronique la dessus, y a de quoi dire ! ;)

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