Je ne sais pas
si la photo de la pochette fera le succès du disque, mais le contenu j'espère.
Bon, cette photo… Il faut rappeler que Melody Gardot a frisé la mort lors d’un
accident (de vélo) en 2003, démolie de partout, façon puzzle, des années d’hosto, de rééducation,
et aujourd’hui une patte folle, la canne sur laquelle elle s’appuie parfois n’est
pas un accessoire snobinard, comme les verres fumés qui protègent ses yeux
rendus très sensibles à la lumières des plateaux. Alors cette photo, c’est sans
doute pour dire aussi : je suis vivante, et la reconstruction ne s’est pas
si mal passée…
Ce disque est
un recueil de titres joués à travers l’Europe entre 2012 et 2016. Melody Gardot
en est l’auteur et compositeur. C’est sur son lit d’hôpital qu’elle s’est mise
à la musique, fallait bien passer le temps, mais on parle de musi-thérapie. Bien lui en a pris. Les titres souvent
longs prennent le temps de poser les ambiances (la longue intro aérienne de « The
rain », le chant ne commence qu’après 4 minutes) la chanteuse
guitariste-pianiste laisse beaucoup de liberté à ses musiciens, à savoir Chuck Staab
à la batterie, Stephen Braun au violoncelle, Irwin Hall au sax et flûte, Sam
Minaie à la basse. D’autres interviennent au grès des morceaux.
Le « Our
love is easy » qui entame le disque est juste superbe, le poil sur les avant bras qui se dresse, la voix est
fragile, sensuelle, ornée de violoncelle, comme le « Baby
I’m a fool » qui suit. On est dans la ballade douce-amère, stylée. « The rain »
(11 mn) est davantage en rupture, intro aérienne, puis le swing déboule avec le walk de basse, le jeu de piano de Gardot est
assez free, comme ses parties de scat. On reste dans le registre de l’intime
(la prise de son impeccable capte le moindre souffle de voix), on imagine
mal Gardot remplir un Stade de France, l’écrin des petites salles sied davantage
à cette musique (les titres parisiens sont enregistrés à l’Olympia). « So
long » donne dans la bossa nova subtile, dans laquelle flûte et
violoncelle s’entrecroisent, comme « Lisboa » (enregistré où ça ?
à Lisbonne) qui convoquent davantage de musiciens, chœurs, orgue, trompette. « Over
the rainbow » est la seule reprise du disque, un saucisson mille fois
interprété, mais ici juste voix / violoncelle (joué à la manière d'une guitare !), un groove latin et tempo relevé.
Le second cd commence par un dialogue avec le public, puis le « Baby I’m a fool » déjà entendu sur le premier cd, arrangement à deux guitares. On vire au jazz tendance manouche avec « Les étoiles », chantée en français, la p’tite trompette bouchée et le sax qui vont bien… Retour au piano (forte) pour « Goodbye » (dédié, dit-elle à son ex boy friend !) plus musclé, gospel, cabaret, on pense un peu à Tom Waits, avec moins de clope dans le gosier tout de même ! Gardot reste au piano pour la suite (trois titres issus du même concert à Utrecht en avril 2016) un long et quasi instrumental « March for Mingus » (à savoir Charlie Mingus, immense contrebassiste et compositeur). Sam Minaie à la basse est donc à l’honneur, avant que tout ça ne s’emballe façon fanfare (traduisez : gros bordel !) Irwin Hall fait le coup de jouer avec deux saxophones en bouche (alto et ténor), figure de style toujours impressionnante. Ca vire au vieux blues rugueux, on entend d’ailleurs des bribes de « Nobody’s fault but mine » sur la fin, enchaînement de circonstance avec « Bad news », un presque blues, donc, où la chanteuse repasse à la guitare. « Who will comfort » est plus funky, une tournerie afrobeat qui aurait plu à Fela Kuti, avec (court) solo de batterie.
Le second cd commence par un dialogue avec le public, puis le « Baby I’m a fool » déjà entendu sur le premier cd, arrangement à deux guitares. On vire au jazz tendance manouche avec « Les étoiles », chantée en français, la p’tite trompette bouchée et le sax qui vont bien… Retour au piano (forte) pour « Goodbye » (dédié, dit-elle à son ex boy friend !) plus musclé, gospel, cabaret, on pense un peu à Tom Waits, avec moins de clope dans le gosier tout de même ! Gardot reste au piano pour la suite (trois titres issus du même concert à Utrecht en avril 2016) un long et quasi instrumental « March for Mingus » (à savoir Charlie Mingus, immense contrebassiste et compositeur). Sam Minaie à la basse est donc à l’honneur, avant que tout ça ne s’emballe façon fanfare (traduisez : gros bordel !) Irwin Hall fait le coup de jouer avec deux saxophones en bouche (alto et ténor), figure de style toujours impressionnante. Ca vire au vieux blues rugueux, on entend d’ailleurs des bribes de « Nobody’s fault but mine » sur la fin, enchaînement de circonstance avec « Bad news », un presque blues, donc, où la chanteuse repasse à la guitare. « Who will comfort » est plus funky, une tournerie afrobeat qui aurait plu à Fela Kuti, avec (court) solo de batterie.
On avait
commencé à Paris, on y retourne pour le dernier titre, les 12 minutes de « Morning
sun », orchestre étoffé, un registre jazzy plus pop, tiens, je pense un
peu au live de Van Morisson « It’s too late to stop now », y’a de ça,
qui se termine comme une longue transe instrumentale.
Fut un temps
où les live étaient des compilations de titres sur une tournée, puis est venue
la mode du concert unique (avec ou sans retouche). Melody Gardot a opté pour la
première solution, des titres issus même de plusieurs tournées, avec des
formations différentes. Elle déclare avoir réécouté 300 de ses concerts pour
sélectionner les meilleures prises ! Pourtant tout est parfaitement
cohérent, dans le son, l’ambiance, le disque est construit, les alcôves intimes
du départ laissent place à des morceaux plus développés, aux arrangements
plus complexes.
Ce disque est
tout simplement superbe. Pas facile à la première écoute, il faut s’y
replonger, en cerner les contours. Capable de susurrer des mots doux au micro
juste soutenue par sa guitare, ou invoquer les foudres sonores et tonitruantes de
son jazz band (les mecs savent jouer !) celle qui aurait pu être classée
vite fait en beau brushing à voix de velours (d'autant qu'elle pousse la sophistication de ses coiffures et vêtements très loin, ce qui peut en agacer certains)
s’avère une musicienne accomplie, une chanteuse sensible doublée d’une
redoutable compositrice.
De 20 ans son
ainée, Diana Krall me faisait chavirer à ses débuts, mais ça, c’était avant.
Comme Norah Jones, que j’ai un peu perdue de vue, ou la p’tite Kathy Mulea dont
les débuts étaient prometteurs (et qui fait quoi maintenant ?). Gageons,
et espérons, que Melody Gardot garde cette même exigence musicale.
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