C’est
la rencontre de JR (pour Jean René, pas l’ainé des Ewing), artiste et
photographe, adepte du collage, et d’Agnès Varda, cinéaste. Qui en matière de
documentaire n’en est pas à son premier coup d’essai. On se souvient de
DAGUERREOTYPES (1975) où elle filmait les habitants de la rue Daguerre, à Paris,
MURS MURS (1981) sur les peintures murales de Los Angeles, LES GLANEURS ET LA
GLANEUSE (2000), ou LES PLAGES D’AGNES (2008). Finalement, Varda aura tourné
davantage de documentaires que de fictions.

Chaque
rencontre est un petit moment de vie, et les installations peuvent aller de la
plus simple à la plus technique. Comme avec ces trois femmes de dockers, dont
les photos géantes sont collées sur une pile de containers. Il y a quelques
moyens derrière ce film (financement participatif) une logistique, des
échafaudages, des grues. Mais l’aspect humain prend toujours de dessus.
Il
y a aussi des photos d’Agnès Varda, comme celle du photographe Guy Bourdin, qu’elle
souhaite utiliser. Mais où ? Elle sera finalement collée sur un blockhaus,
comme tombé d’une falaise, enfoncé sur une plage. Problème : la marée. L’installation
doit aller vite, et le lendemain, une fois la mer redescendue, la photo s’est
décollée… C’est aussi ça, ce film, réflexion
sur le passé et l’éphémère, les télescopages du hasard. Réflexion sur la
vieillesse aussi, Agnès Varda a 89 ans, et se fait régulièrement charriée par
JR, sur sa petite taille aussi. Varda a des problèmes de vue. Ce qui donne l’idée
à JR de photographier son œil (et ses orteils) qui seront collés sur des wagons
de marchandises ! Une belle manière de voyager !

Arrivés
chez lui, ils trouvent un message au feutre, sur une vitre « Du côté
de la côte » du nom du premier documentaire d’Agnès Varda (1958). L’émotion
submerge la réalisatrice, renvoyée à ses jeunes années, à Jacques Demy (son
mari), elle vacille sur ses jambes. JR demande si Godard a voulu « saboter »
la fin de leur film, par facéties, ou si c’est de la méchanceté gratuite. Varda
conclut par : « C’est une peau de vache, mais je l’aime bien. Mais c’est
une peau d’vache… ». Un incroyable moment.
Sur
une belle musique de Mathieu Chédid, le film est très rapide, ludique. Les images
sont superbes, très composées, pensées, étudiées (on n’en attendait pas moins
de ces deux-là), mais rien d’ostentatoire, ou d’intellectuel. On pense parfois aux
films bricolés de Michel Gondry, et bien sûr à Raymond Depardon qui a tant de
fois sillonné la France avec sa caméra, ses appareils photo. JR et Varda
échangent beaucoup, et certains dialogues semblent rejoués en post
synchronisation. C’est la seule limite, car le ton de JR n’est pas très
naturel, parfois (à vrai dire, sa voix est agaçante !). Un procédé tout
droit venu de la Nouvelle Vague, justement, dont Agnès Varda est sans doute la dernière
représentante, avec l’ermite suisse…
Couleur - 1h30 - format 1,1:85
Elle dit pas "c'est une peau de vache " mais "peau de chien" au sujet de JLG. merci pour l'article .
RépondreSupprimer