Il
y a des disques qui sont le fruit d'un projet mûrement
réfléchi. Dont la première graine a été planté des années bien avant la première note enregistrée. Et d'autres, plus rares et
parfois miraculeux, qui sont nettement plus spontanés. Pratiquement
le fruit d'un heureux hasard.
Ce
« Lost in Paris Blues Band » fait parti de la seconde
catégorie.
Tout part d'un imprévu. Au début de l'année 2015, alors que Paul Personne participe à la tournée « Autour
de la Guitare », un problème survient. L'organisateur
Jean-Félix Lalanne est contraint d'annuler quelques dates parce qu'il n'y avait pas assez eu de billets vendus pour remplir le Zénih de Paris sur le nombre total de dates prévues initialement. Résultat : une quinzaine de jours en chômage
technique pour la caravane cosmopolite. Pas un trop gros problème
pour les Français, puisqu'ils peuvent rentrer à la maison, à
défaut d'autres choses. Mais pour les Américains, repartir et se
taper dix heures de vols plus le temps passé à poireauter dans les
aéroports et devoir remettre le couvert peu de temps après, c'est
moyen. Surtout qu'ils n'avaient pas de plan
B.
Probablement qu'ils en profitent pour goûter à la vie parisienne
(sans
être pour autant nécessairement forcés de l'apprécier).
Mais
le Paulo trouve cela plutôt triste : ces musiciens à la
carrure internationale, ici, à Paris, à se tourner les pouces. C'est du gâchis. C'est alors que sa compagne, Gloria, lui
conseille de profiter de cet intermède impromptu pour les contacter
et taper le bœuf avec eux. C'est l'occasion ou jamais. Par
l'intermédiaire du management et du label (Verycords) quelques gars disponibles sont invités à
une table, à casser la croûte pendant que Paulo exprime son
souhait. Ce à quoi les intéressés répondent sans hésitations favorablement.
Ainsi,
Paul se retrouvent en studio avec Robben Ford, John Jorgenson et Ron
Thal pour jammer sur des Blues et quelques classiques pas très éloignés de cet idiome. Dans une ambiance
totalement détendue, joyeuse et bon enfant, les belligérants
s'enferment pendant trois jours dans le studio Ferber. Trois jours !
En seulement trois jours, ces gaillards ont réussi à poser sur
bandes douze morceaux aboutis. Plus un treizième où seul Paul
officie. Un labs de temps extrêmement court, notamment pour un groupe improvisé, constitué de musiciens qui n'avaient jamais joué ensemble. Alors forcément, ça respire la prise live et si l'on avait
rajouté en overdub l'ambiance bruyante d'un club bien rempli, avec approbations et
ovations du public, on y aurait vu que du feu.
Ça
respire, ça vibre, ça pulse, ça s'ébroue, bref, c'est vivant. Et
essentiellement, c'est Blues.
Si
la présence de Robben Ford semble absolument logique (de mémoire, il me semble
même que c'était déjà un vieux souhait), on sera légitimement
surpris par celle de Ron Thal, chantre d'un Heavy-Metal acrobatique,
pyro-technique, fusion et frappa-dingue. Un gars surdoué, capable de
jouer le « Fantaisie impromptue » de Chopin tout en
tapping. Le chevelu qui s'était illustré avec une vieille Ibanez
Blazer « gruyère » (la « Swiss Cheer Guitar «
(1) ) avant d'adopter une guitare en forme de pied, équipées
d'ailes d'insectes rétractables (!), offerte par Vigier. La
« Bumblefoot » (2), du nom d'un de ses instrumentaux. Un
musicien à la technique époustouflante, issu du milieu Heavy-Metal,
et qui a obtenu une médiatisation internationale en accompagnant Axl
Rose pour son Guns'n'Roses, et en participant au « Chinese
Democracy ». Aujourd'hui, il a laissé sa place à
Slash (revenu au bercail ?) et ce concentre sur le
collectif Art of Anarchy qui vient de sortir un nouvel album avec
Scott Stapp, l'ancien chanteur de Creed (sur le précédent et
premier disque, la place était occupée par Scott Weiland). Donc,
rien de bien vraiment Blues. C'est rien de le dire.
C'est le premier musicien étranger de la tournée "Autour de la Guitare" que Paul ait rencontré ; tout simplement parce que Ron Thal est venu de lui-même, humblement et naturellement se présenter. D'ailleurs il traîne depuis ses débuts la réputation d'un être accessible, aimable et disponible.
Dans un autre genre, le choix de John Jorgenson peut aussi paraître surprenant car ce dernier est connu pour son incroyable dextérité au service d'un jazz manouche qu'il a contribué à populariser aux USA (premier disque en 1984). Mais c'était aussi un des trois lascars des Hellecasters. Trois pistoleros fervents adeptes de matériel Fender délivrant leur Country-rock, souvent échevelé, à divers sauces (Jazz, Boogie, Blues, Rock'n'Roll), proche d'un Danny Gatton et d'un Roy Buchanan.
Jorgenson c'est également le gars qui avait été recruté par Elton John pour l'accompagner sur une longue tournée internationale de 18 mois. Finalement, il restera six ans avec lui ( ... en qualité de musicien, exclusivement). C'est que ce Californien a plus d'une corde à son arc : guitariste talentueux reconnu, il maîtrise aussi les claviers, le saxophone, la pedal-steel et le chant. Une exposition qui lui permet désormais de travailler pour des célébrités (Billy Joel, Patty Loveless, Michael Nesmith, Sting, Bob Seger, Johnny Cash, Bonnie Raitt, Willie Nelson, Hank William Jr, et même ... Pavarotti).
Ce qui est intéressant dans ce projet, c'est que, loin de tous ces trop nombreux disques où une foule d'invités n'est là que pour jouer sur un mouvement sans vraiment s'investir, tout le monde ici est impliqué et concerné. Il ne s'agit nullement d'une affiche racoleuse, un coup de marketing reposant sur quelques noms célèbres, qui ne sont en fait venus que pour jouer un petit solo (parfois deux ...).
Si Paul Personne est bien le capitaine du vaisseau, il s'agit bien d'une rencontre entre musiciens, qui se sont accordés sur des affinités musicales communes. Et qui, ensemble, dans une réelle ambiance démocratique, avec un leader, un chef d'équipe non seulement à l'écoute, mais qui n'a de cesse de connaître l'opinion, la perception de ses collègues temporaires. Pour s'enrichir et pour faire avancer dans le bon sens, et en étant certain que tous y trouve son compte, y prennent du plaisir.
Chacun apportant sa contribution, son feeling, sa touche particulière, dans un milieu où, pour certains, on les attendait pas.
Alors certes, il y a deux plans de Ron Thal qui peuvent décontenancer, voire même irriter quand il ne refrène plus sa facette shredder. Mais cela fait aussi parti du charme (contestable), et puis c'est rapidement rattrapé par l'intervention d'un collègue.
Toutefois, tous ont l'intelligence d'être respectueux les uns envers les autres ; à aucun moment cela ne dérive vers la compétition, le déballage de plans démonstratifs. Ça reste toujours au service de la musique. A l'exception de deux courts dérapages de Ron Thal - un réflexe -, tous les soli sont absolument intégrés au morceau, bien dans le rythme et la mélodie. Du grand art.
Une entreprise en droite ligne des rencontres au sommet de certaines réalisations des années 60 et 70, et donc non - ouais, je sais, j'insiste lourdement - dans l'esprit commerciale de ce siècle.
Je soupçonne d'ailleurs l'instigateur d'avoir été inspiré par le "Super Session" de Bloomfield, Kooper et Stills. Une fascination nostalgique qui l'aurait entraîné à tenter de retrouver ces moments sacrés et fragiles, de graver la magie de l'éphémère, un instant rare et fugace dont on a l'outrecuidance d'immortaliser.
Rien que pour ça, ce disque est attachant et passionnant.
Surtout que toutes les versions proposées sont bien différentes des originaux. Même la scie "Little Red Rooster" (tellement de fois reprise qu'elle en devient répulsive), bien que par essence basique, fini par sortir des rails. L'irrévérencieux Ron Thal y contribuant considérablement avec son solo toxique, un rien atonal. Avec le "It's All Over Now" en mode Rolling Stones (évidemment), et le "One Good Man" de Joplin, ce sont les titres les plus facilement identifiables dès les premières mesures.
Le fameux "I Don't Need No Doctor" aussi, son chant chaloupé étant si identifiable ; cependant, l'orchestration se pare d'un groove funky qui l'amène autre part. Où ça ? A la Nouvelle-Orléans, pardi ! Du moins, jusqu'à ce que le riff de Steve Marriott retentisse ; signal de départ d'un festoiement où l'on s'arme d'une overdrive et d'un solide Marshall. Les guitares se répondent, se taquinent, et on remarque que malgré leur tempérament différent, elles s'entendent comme larrons en foire.
Une des meilleurs interprétations qu'il m'ait été donné d'écouter (plus goûteuse que celle de Mayer et plus classe que celle de WASP)
En se basant sur du matériel assez connu (quoi que, de nos jours ...), le collectif propose une relecture festive, gorgée d'envie et de spontanéité. Nombreux sont ceux, bien moins scrupuleux, et sous prétexte de modifications notables, n'auraient eu aucun complexe à les rebaptiser pour se les réapproprier.
Afin d'apporter un peu de féminité à ce banquet de Blues virils, Paul a sollicité à l'improviste Beverly Jo Scott, lui enjoignant de se pointer au studio toutes affaires cessantes. Elle se précipite à la gare prendre le premier train, et quitte sa Belgique d'adoption pour se rendre à Paris aussi vite que possible. C'est aussi ça c'est les amis.
On la retrouve bien sûr sur le succulent "One Good Man" (avec une courte intro en clin d’œil à Canned Heat), et sur le "Evil Gal Blues" immortalisé par Dinah Washington et ensuite par l'impératrice Aretha Franklin avec une version Soul. Ici, Paul, John et Beverly la présentent en mode slow-blues, avec une approche veloutée et féline. Toujours Beverly Jo sur le "Fire Down Below" de Bob Seger, en trio avec John et Paulo.
Personnellement, j'ai actuellement un peu de mal avec les albums de reprises ; il y en a trop eu ; des disques qui se ressemblent, et parfois sans âme.Cependant là, c'est d'un niveau nettement supérieur. Les reprises ne sont essentiellement là que pour servir de terreau de base, de terrain de jeu à des musiciens réunis avant tout pour passer un bon moment. Une base solide sur lequel on peut s'exprimer librement. Quelque chose de sain, de fondamental et de spontané. Quelque chose qui a tendance à se perdre mais que beaucoup de musiciens ont encore en eux. Il suffit juste d'une étincelle. Comme ici. C'est d'ailleurs assez incroyable que ces musiciens, sans être rodés à jouer ensemble, soient parvenus dans un laps de temps aussi court, à réaliser un disque de plus d'une heure de d'une indéniable qualité.
Étonnement, on peut être un peu déçu en comparaison des productions précédentes de Paul Personne (en comparaison même de la plupart de ses skeuds depuis "Comme à la Maison"). Certainement en raison du registre qui sonne bien généralement plus classique, mais aussi parce que la Gibson crémeuse et onctueuse de Doudou laisse du champ libre aux compères d'un temps. Et que donc, par conséquent, on réalise que son jeu expressif n'a rien à envier à celui de ces stars américaines. Peut-être pas aussi technique, mais pas moins éloquent. Sinon plus ? (à l'exception de Robben Ford). On dirait même qu'il tient sa Les Paul en laisse, l'empêchant d'enflammer le ciel dans un feu d'artifice sonique ; par pudeur, par respect ou par humilité (ou tout ça à la fois).
Et puis, progressivement, on découvre ce "Lost in Paris Blues Band", et on apprend à en savourer toute sa richesse.
Si seulement le fruit de cette rencontre pouvait ouvrir des portes à Paulo. Qu'un manager d'un des trois invités lui propose une première partie sur le continent nord-américain. Ou que la présence de ces yankees en vadrouilles éveille la curiosité de quelques américains, assez pour souhaiter voir en live ce surprenant frenchy dont la guitare sonne aussi bien, et même mieux que pas mal de leurs compatriotes. Certes, les américains sont chauvins, mais il y a eu déjà dans le passé des français qui sont parvenus à s'y produire. Alors, pourquoi pas. Ce ne serait que justice.
Néanmoins, un gros regret. En DVD, plutôt que le "making off", cela aurait été nettement plus sympa d'avoir un petit concert. Un témoignage filmé du collectif en live, pour une prestation impromptue dans un club. Hélas, les planning des belligérants sont chargés. D'ailleurs Ron Thal avait dû s'absenter pour une master-class.
Laissons les musiciens s'exprimer : tout est dit.
C'est le premier musicien étranger de la tournée "Autour de la Guitare" que Paul ait rencontré ; tout simplement parce que Ron Thal est venu de lui-même, humblement et naturellement se présenter. D'ailleurs il traîne depuis ses débuts la réputation d'un être accessible, aimable et disponible.
John Jorgenson et sa Fret-King Black Label "JJ" |
Dans un autre genre, le choix de John Jorgenson peut aussi paraître surprenant car ce dernier est connu pour son incroyable dextérité au service d'un jazz manouche qu'il a contribué à populariser aux USA (premier disque en 1984). Mais c'était aussi un des trois lascars des Hellecasters. Trois pistoleros fervents adeptes de matériel Fender délivrant leur Country-rock, souvent échevelé, à divers sauces (Jazz, Boogie, Blues, Rock'n'Roll), proche d'un Danny Gatton et d'un Roy Buchanan.
Jorgenson c'est également le gars qui avait été recruté par Elton John pour l'accompagner sur une longue tournée internationale de 18 mois. Finalement, il restera six ans avec lui ( ... en qualité de musicien, exclusivement). C'est que ce Californien a plus d'une corde à son arc : guitariste talentueux reconnu, il maîtrise aussi les claviers, le saxophone, la pedal-steel et le chant. Une exposition qui lui permet désormais de travailler pour des célébrités (Billy Joel, Patty Loveless, Michael Nesmith, Sting, Bob Seger, Johnny Cash, Bonnie Raitt, Willie Nelson, Hank William Jr, et même ... Pavarotti).
Ce qui est intéressant dans ce projet, c'est que, loin de tous ces trop nombreux disques où une foule d'invités n'est là que pour jouer sur un mouvement sans vraiment s'investir, tout le monde ici est impliqué et concerné. Il ne s'agit nullement d'une affiche racoleuse, un coup de marketing reposant sur quelques noms célèbres, qui ne sont en fait venus que pour jouer un petit solo (parfois deux ...).
Si Paul Personne est bien le capitaine du vaisseau, il s'agit bien d'une rencontre entre musiciens, qui se sont accordés sur des affinités musicales communes. Et qui, ensemble, dans une réelle ambiance démocratique, avec un leader, un chef d'équipe non seulement à l'écoute, mais qui n'a de cesse de connaître l'opinion, la perception de ses collègues temporaires. Pour s'enrichir et pour faire avancer dans le bon sens, et en étant certain que tous y trouve son compte, y prennent du plaisir.
Chacun apportant sa contribution, son feeling, sa touche particulière, dans un milieu où, pour certains, on les attendait pas.
Alors certes, il y a deux plans de Ron Thal qui peuvent décontenancer, voire même irriter quand il ne refrène plus sa facette shredder. Mais cela fait aussi parti du charme (contestable), et puis c'est rapidement rattrapé par l'intervention d'un collègue.
Toutefois, tous ont l'intelligence d'être respectueux les uns envers les autres ; à aucun moment cela ne dérive vers la compétition, le déballage de plans démonstratifs. Ça reste toujours au service de la musique. A l'exception de deux courts dérapages de Ron Thal - un réflexe -, tous les soli sont absolument intégrés au morceau, bien dans le rythme et la mélodie. Du grand art.
Robben Ford, plus modeste, avec une "simple" Telecaster |
Une entreprise en droite ligne des rencontres au sommet de certaines réalisations des années 60 et 70, et donc non - ouais, je sais, j'insiste lourdement - dans l'esprit commerciale de ce siècle.
Je soupçonne d'ailleurs l'instigateur d'avoir été inspiré par le "Super Session" de Bloomfield, Kooper et Stills. Une fascination nostalgique qui l'aurait entraîné à tenter de retrouver ces moments sacrés et fragiles, de graver la magie de l'éphémère, un instant rare et fugace dont on a l'outrecuidance d'immortaliser.
Rien que pour ça, ce disque est attachant et passionnant.
Surtout que toutes les versions proposées sont bien différentes des originaux. Même la scie "Little Red Rooster" (tellement de fois reprise qu'elle en devient répulsive), bien que par essence basique, fini par sortir des rails. L'irrévérencieux Ron Thal y contribuant considérablement avec son solo toxique, un rien atonal. Avec le "It's All Over Now" en mode Rolling Stones (évidemment), et le "One Good Man" de Joplin, ce sont les titres les plus facilement identifiables dès les premières mesures.
Le fameux "I Don't Need No Doctor" aussi, son chant chaloupé étant si identifiable ; cependant, l'orchestration se pare d'un groove funky qui l'amène autre part. Où ça ? A la Nouvelle-Orléans, pardi ! Du moins, jusqu'à ce que le riff de Steve Marriott retentisse ; signal de départ d'un festoiement où l'on s'arme d'une overdrive et d'un solide Marshall. Les guitares se répondent, se taquinent, et on remarque que malgré leur tempérament différent, elles s'entendent comme larrons en foire.
Une des meilleurs interprétations qu'il m'ait été donné d'écouter (plus goûteuse que celle de Mayer et plus classe que celle de WASP)
Paul Personne et John Jorgenson |
En se basant sur du matériel assez connu (quoi que, de nos jours ...), le collectif propose une relecture festive, gorgée d'envie et de spontanéité. Nombreux sont ceux, bien moins scrupuleux, et sous prétexte de modifications notables, n'auraient eu aucun complexe à les rebaptiser pour se les réapproprier.
Afin d'apporter un peu de féminité à ce banquet de Blues virils, Paul a sollicité à l'improviste Beverly Jo Scott, lui enjoignant de se pointer au studio toutes affaires cessantes. Elle se précipite à la gare prendre le premier train, et quitte sa Belgique d'adoption pour se rendre à Paris aussi vite que possible. C'est aussi ça c'est les amis.
On la retrouve bien sûr sur le succulent "One Good Man" (avec une courte intro en clin d’œil à Canned Heat), et sur le "Evil Gal Blues" immortalisé par Dinah Washington et ensuite par l'impératrice Aretha Franklin avec une version Soul. Ici, Paul, John et Beverly la présentent en mode slow-blues, avec une approche veloutée et féline. Toujours Beverly Jo sur le "Fire Down Below" de Bob Seger, en trio avec John et Paulo.
Personnellement, j'ai actuellement un peu de mal avec les albums de reprises ; il y en a trop eu ; des disques qui se ressemblent, et parfois sans âme.Cependant là, c'est d'un niveau nettement supérieur. Les reprises ne sont essentiellement là que pour servir de terreau de base, de terrain de jeu à des musiciens réunis avant tout pour passer un bon moment. Une base solide sur lequel on peut s'exprimer librement. Quelque chose de sain, de fondamental et de spontané. Quelque chose qui a tendance à se perdre mais que beaucoup de musiciens ont encore en eux. Il suffit juste d'une étincelle. Comme ici. C'est d'ailleurs assez incroyable que ces musiciens, sans être rodés à jouer ensemble, soient parvenus dans un laps de temps aussi court, à réaliser un disque de plus d'une heure de d'une indéniable qualité.
Robben observe d'un air amusé Ron Thal |
Étonnement, on peut être un peu déçu en comparaison des productions précédentes de Paul Personne (en comparaison même de la plupart de ses skeuds depuis "Comme à la Maison"). Certainement en raison du registre qui sonne bien généralement plus classique, mais aussi parce que la Gibson crémeuse et onctueuse de Doudou laisse du champ libre aux compères d'un temps. Et que donc, par conséquent, on réalise que son jeu expressif n'a rien à envier à celui de ces stars américaines. Peut-être pas aussi technique, mais pas moins éloquent. Sinon plus ? (à l'exception de Robben Ford). On dirait même qu'il tient sa Les Paul en laisse, l'empêchant d'enflammer le ciel dans un feu d'artifice sonique ; par pudeur, par respect ou par humilité (ou tout ça à la fois).
Et puis, progressivement, on découvre ce "Lost in Paris Blues Band", et on apprend à en savourer toute sa richesse.
Si seulement le fruit de cette rencontre pouvait ouvrir des portes à Paulo. Qu'un manager d'un des trois invités lui propose une première partie sur le continent nord-américain. Ou que la présence de ces yankees en vadrouilles éveille la curiosité de quelques américains, assez pour souhaiter voir en live ce surprenant frenchy dont la guitare sonne aussi bien, et même mieux que pas mal de leurs compatriotes. Certes, les américains sont chauvins, mais il y a eu déjà dans le passé des français qui sont parvenus à s'y produire. Alors, pourquoi pas. Ce ne serait que justice.
Néanmoins, un gros regret. En DVD, plutôt que le "making off", cela aurait été nettement plus sympa d'avoir un petit concert. Un témoignage filmé du collectif en live, pour une prestation impromptue dans un club. Hélas, les planning des belligérants sont chargés. D'ailleurs Ron Thal avait dû s'absenter pour une master-class.
- Dowton (Tom Waits) - 6:36
- Fire Down Below (Bob Seger) - 4:01
- Little Red Rooster (Willie Dixon) - 4:46
- I Don't Need No Doctor (Nick Ashford, Valerie Simpson, Jo Armstead) - 6:32
- One Good Man (Janis Joplin) - 6:00
- Tell Me (Howlin' Wolf) - 4:29
- You're Killing My Love (Mike Bloomflied, Nick Gravenites) - 4:47
- It's All Over Now (Bobby & Shirley Womack) - 5:59
- Trouble No More (Muddy Waters) - 6:18
- Evil Gal Blues (Lionel Hampton, Leonard Feather) - 4:58
- I Can't Hold Out (Elmore James) - 4:29
- Watching the River Flow (Bob Dylan) - 4:41
- Driftin' Blues (Johnny Moore) - 3:11 - Paul, seul, en acoustique
(1) Aujourd'hui, répliquée par Vigier.
(2) Conforme à l'image du dessin de la couverture son disque : "Adventures of Bumblefoot"
Laissons les musiciens s'exprimer : tout est dit.
🎶
Autres articles sur Paul PERSONNE (liens/clic) :
⤇ A L'Ouest "Face A" (2011)
⤇ A L'Ouest "Puzzle 14" (2014)
⤇ à L'Ouest "Electric Rendez-Vous" (2015)
⤇ Paul Personne à l'Olympia (20/01/2015)
Deux questions.
RépondreSupprimerQuid des claviers ? On voit dans le film Ford au piano, et Jorgenson à l'orgue... Ils ont la double casquette ou des claviéristes étaient là aussi ?
Quid du chant ? Sur ce que j'ai entendu, c'est Paulo qui prend le micro, mais son accent... ouh la... les autres chantent aussi ?
C'est Jorgenson qui assure toutes les parties d'orgue. Peu nombreuses mais bien jolies ; c'est un pro. Quant à Ford, sincèrement je ne sais pas (faut qu'je vérifie).
SupprimerLe chant c'est Paul Personne. Et oui, son accent n'est pas exceptionnel. On peut d'ailleurs voir dans le "making off", Robben le reprendre en rigolant. Et Paulo de répondre : "Désolé, mon anglais n'est pas aussi bon que ton français, mais je m'améliore".
Cependant, tous trois, Robben, John et Ron, sont également chanteurs. Ainsi, ils chantent parfois un couplet ou font les chœurs.