jeudi 9 février 2017

Johnny HALLYDAY - Rester Vivant (DVD et édition triple CD 2016) – Par Vincent Le Chaméléon



Dans sa gueule

Je peux bien le reconnaitre au moins une fois ici : JOHNNY HALLYDAY aura, selon moi, tant de fois usurpé et galvaudé le terme de Rock durant toute sa carrière, que je ne me suis jamais privé de me payer sa tête dès qu’une occasion pouvait se présenter à moi. Et les occasions, elles sont si nombreuses avec un personnage tel que lui. A commencer par ses apparitions dans toutes ces émissions de variétés “grand public”. De ses spectacles démesurés et de sa vie privée si constamment commentée, illustrée, chaque fois que le Jojo bouge un orteil.
De leurs côtés, depuis la création de sa marionnette (ah que coucou !) aux Guignols de l’info sur Canal+, jusqu’aux imitations souvent cruelles de Laurent Gerra, on peut décidemment affirmer que depuis des années et des années, aucune autre Star du Showbiz, sinon JOHNNY lui-même, ne s’en sera autant pris plein la gueule à ce point-là.
D’ailleurs, l’annonce d’une retransmission de son dernier spectacle en date me préparait une nouvelle fois à me conforter dans l’idée que je m’étais forgé de lui depuis belle lurette. Et puis voilà que, contre toutes attentes, je n’allais pas tarder à ravaler une bonne fois pour toute ma langue. Ce concert, enregistré a Bruxelles le 26 Mars 2016, est une telle réussite qu'il ne m’aura pas fallu attendre plus de la moitié de son visionnage pour me décider à acquérir, prestement,  le DVD et son équivalant audio dans sa version triple CD. Et oui… rien que ça ! 

Encore un peu de patience pour ce qui est du contenu du concert en lui-même. Car pour comprendre et apprécier, à sa juste valeur, un show tel que celui-ci, il nous faut nécessairement remonter quelque peu dans le temps pour mesurer toute la particularité d’une soirée telle que celle-là. Patience j’ai dit.

À la vie à la mort

Disons-le tout net, les gros problèmes de santé qui avaient momentanément contraint JOHNNY à interrompre son Tour 66, au cours de l’année 2009 et 2010, auraient tout à fait pu avoir raison de lui définitivement.
Ainsi, il est absolument certain que ces premières alertes auront forcément impacté et amené le désormais septuagénaire a envisager ses prochaines années autrement. Remettant en perceptive l’importance de sa propre existence et de sa propre mortalité.
A l’image de son intitulé, Rester Vivant, et de ce crâne symbolisant ouvertement la mort (placé volontairement tout au-dessus de l’icône durant tout le concert), JOHNNY, pour sa 29ème captation en Live (ça veut dire vivant !) nous offre ici un moment de pure authenticité, doublé d’une vraie intensité.

JOHNNY Guitares !

Philippe Almosnino à la guitare...
XXXXX
Depuis quelques temps déjà, les “Plumes” que JOHNNY avait convié sur ses derniers disques se nommaient désormais Mathieu Chedid, Christophe Miossec, Jeanne Cherhal, ou encore Yodélice. On était ainsi assez éloigné des univers de Gerald De Palmas, Patrick Bruel, Zazie, ou le fin du fin, de celui d’un Pascal Obispo.
Ces nouveaux auteurs dans l’univers de JOHNNY auraient dû me mettre assez vite la puce à l’oreille. Car, loin de minimiser le talent d’écriture de chacun d’entre eux (je parle ici des textes et uniquement des textes), ces nouveaux noms, tous tellement éloignés du grand cirque de la Pop/Variété, donnaient surtout le signe que le plus célèbre de nos chanteurs Français tendait alors à retrouver une certaine dimension par trop souvent négligée dans ce domaine. Et ce, depuis assez longtemps.
Et puis du côté des musiciens qui l’accompagnent depuis quelques années maintenant, là aussi, en s’adjoignant les services d’un guitariste aussi chevronné que Yarol Poupaud  (ancien membre du groupe FFF), en lieu et place du talentueux mais très encombrant pianiste/arrangeur Yvan Cassar, JOHNNY semblait très désireux de replacer les guitares aux premiers plans dans sa musique. Du coup, se sont carrément 3 guitaristes qui officient sur scène: Yarol Poupaud donc, le fidèle Robin Lemesurier (Ron Wood es-tu là ?) en second, et bien plus surprenant, le très fifties Philippe Almosnino (Les Wampas) a la steel guitare et à la guitare acoustique. Quand ce n’est pas JOHNNY lui-même qui se saisit aussi, très épisodiquement, d’une guitare… Pour gratouiller.

Rock’N’ Roll Attitude

Ayant vu et/ou écouté plusieurs de ses spectacles de ces 25 dernières années, bien des choses me sont apparues comme très révélatrices (et nouvelles !) sur l’état d’esprit qui était assurément celui de JOHNNY ce soir-là en Belgique. Sa proximité, sa disponibilité et ce réel sentiment de gratitude envers son public ne devraient ici tromper personne. Même les plus sceptiques. Bien sûr, on pourra une nouvelle fois sourire de la façon si unique que JOHNNY HALLYDAY a quand il parle. JOHNNY, il est vrai, ne parle pas exactement le français comme nous autres. JOHNNY parle le JOHNNY voilà tout. Et on aurait bien tort de ne pas sourire quand il nous précisera,  au moment d’introduire l’excellent “Mistery  Train”, qu’à l’époque où son idole Elvis Presley enregistrait l’une de ses premières chansons, sur le label emblématique Sun Records, il s’agissait de 45 Tours.
Mais JOHNNY serait-il cette figure aussi emblématique qu’elle est sans cela également ? Car c’est sans doute aussi ça qui touche peut être encore les gens de nos jours : Cet aspect naïf et complètement désarmant après autant d’années à servir sa propre cause : Le Wouakénouôôl ! Et dans cette époque ou la moindre phrase est si systématiquement scrutée, décortiquée, analysée, je trouve salvateur d’entendre encore des personnes s’exprimer sans filtre comme il le fait. Au risque de passer pour des cons aux yeux de tous les pisse-froids.

L’envie d’être toujours en vie

Comme JOHNNY le chantera dès l’introduction de son spectacle, “Rester Vivant” exprime d'emblée le désir d’un homme qui, malgré les embuches, ne renoncera jamais. Ni à ce qu’il aime, ni à ceux qu’il aime. “Et tant qu’on aime, tant qu’on en rêve... Rester vivant, avant que l’amour foute le camp” chante-t-il dans le refrain. Plus loin, autre extrait de son très introspectif 49ème album Rester Vivant. “Au Café de l’Avenir” raconte cette vie qui passe pour nous tous si rapidement Les paroles de la chanson se terminant ainsi : “Je m’suis pas vu vieillir, j’ai pas vu l’coup venir, le temps d’un dernier verre, on va bientôt fermer. Je me prépare à partir, mais on venait juste de commencer”. 
Derrière ces paroles emplies de gravité, les musiciens qui accompagnent Jojo envoient du lourd comme on dit. Pied au plancher, Guitares, basses et batterie et orgues Hammond forment le noyau dur d’une formation complice et visiblement bien décidée à jouer cette musique là (le Rock) avec passion, envie et détermination.
Rock’ N’ Roll, RockaBilly, Country Music, Rythm’N’ Blues. C’est à une complète et totale célébration du Rock à laquelle JOHNNY et ses musiciens ont décidé de nous convier ici.
Mais pour que la sauce prenne durablement, et pour que chaque spectateur reste au plus près de la musique, il fallait également que tout ce qui relève habituellement du “grand spectacle” soit quelque peu revu à la baisse.
Finie toute cette pyrotechnie et toute cette surenchère de décors et de mise en scène à tout va. Certes, il serait stupide d’ignorer ou de chercher à occulter tout le travail qu’il y a quand même autour d’un show comme celui-ci. Les lumières sont somptueuses, les réalisations et la scénographie des fonds d’écrans permet également de renforcer avec intelligence la plupart des titres interprétés ce soir-là. Mais décidément sur cette tournée, c’est bien à son amour de cette musique-là, le Rock, que JOHNNY HALLYDAY a souhaité mettre l’accent et rendre hommage.

Au regard du répertoire joué ce soir-là, certains ne manqueront pas de faire remarquer que HALLYDAY ne s’éloigne pas suffisamment de ses chansons les plus emblématiques. Mais nom d’un chien, vous vous imaginez ne pas entendre pour la centième fois des titres aussi incontournable que “Le Pénitencier”, “Requiem Pour Un Fou”, “L’envie”, “Que je t’Aime”, “Toute la Musique que j’aime” ou bien encore l’éternelle “Gabrielle” ? C’est tout simplement IM-PO-SSIBLE !!!

De l’amour, de l’amour, de l’amour

A gauche : Yarol Poupaud. A droite : Robin Lemesurier
Et puis comme cette tournée n’était définitivement pas comme les autres, JOHNNY  a su quand même, plus qu’à l’accoutumée, se montrer audacieux et généreux. Outre les 2 morceaux mentionnés plus haut,  le très beau “Seul” aura aussi fait partie des nouveautés de ce soir-là. Ajoutons également “De L’Amour” et “Mon Cœur qui Bat". Tous les deux écrits et joués en compagnie de Yodélice. Plus tôt dans le spectacle, c’est une vieille chanson qui était aussi venue se glisser dans ce set de quelques 27 morceaux (DVD). Je découvrirai ainsi ce petit bijou qu’est “J’ai Pleuré sur ma Guitare”. Rebelote avec “La Fille de l’été Dernier”.
Le Rock ‘N’ Roll des pionniers est alors à l’honneur durant un set acoustique qui n’en a presque que le nom tant des morceaux tel que “Mystery Train”, du jeune Elvis Presley, ainsi que “Blue Suede Shoes” sont joués avec une incroyable vitalité. Visiblement cette formation s’éclate comme jamais.
Toujours au chapitre des nouveautés et/ou des raretés, je vous citerai bien volontiers aussi cette formidable adaptation d’un vieux titre de Chuck Berry, “Nadine” et ses paroles pleines de drôleries. Dans le même registre, le trop rarement joué “Je Suis Victime de l’Amour” est lui aussi un pur Boogie Rock au texte volontairement naïf et franchement irrésistible. JOHNNY, même considérablement amaigri et marqué physiquement, prend un plaisir sans égal dès lors qu’il s’empare d’un micro pour faire ce qu’il fait mieux que quiconque : chanter avec ses tripes.
Au registre d’autres nouveautés, on retrouvera également d’autres inédits dans la version Deluxe 3 CD. Citons notamment 2 morceaux extrêmement poignants. L’un évoquant le meurtre du noir américain Mike Brown par un policier, puis à la toute fin du disque, l’évocation de ce dimanche de Janvier et de recueillement national à la mémoire des victimes des attentats de Paris.  

Avant d’en terminer avec ce compte rendu, certes assez long, et quand bien même il y aurait encore tellement à dire, je voudrais au moins faire remarquer ici que jamais le chanteur n’aura accordé autant de place à ses musiciens pour les mettre clairement en avant. A titre d’exemple, Yarol Poupaud, en plus de seconder le patron au micro sur le furieux “Fils de Personne”, se fend surtout d’un chorus de guitare long de 72 mesures (oui Messieurs j’ai compté !). Je ne vous en dis pas plus, mais c’est là l’un des nombreux grands moments du spectacle.
Orgue Hammond et harmonica jouant aussi à armes égales, il est également important de souligner à quel point voir les noms de Bob Clearmountain et Bob Ludwig accolés ensemble pour le mixage d’un tel concert sont là encore le gage d’une exigence retrouvée de la part du chanteur. Tout est enfin audible et parfaitement équilibré. Un son tout à la fois moelleux et percutant comme celui de la batterie du génial écossais Geoff Dugmore. Idem en ce qui concerne le très beau rendu sur les voix des choristes. Tout ici est absolument parfait. Ces derniers ne se contentant pas uniquement des habituels hou ! Hou ! et/ou Oh ! Oh ! Pour épauler un JOHNNY en très grande forme vocalement.

Bonus ou pas bonus: Un vrai casse-tête

Encore une fois, il est vraiment regrettable de voir à quel point les acheteurs de produits physiques (support, CD et DVD principalement) ne sont pas franchement récompensés comme ils le devraient. Et les artistes viendront ensuite pester  contre le téléchargement. Avec de telles méthodes de marketing, ils n’encouragent en fait que ça ! J’ai ainsi totalisé pas moins de 5 formats différents afin d’avoir (ou pas) la globalité de tous les morceaux joués durant cette tournée. JOHNNY alternant d’un soir sur l’autre 2 ou 3 morceaux différents.

De nos jours, il n’est plus du tout rare de voir de nombreux artistes joindre, en bonus du concert filmé, son équivalent en CD audio. La fameuse version Double CD+DVD. Le tout pour une petite vingtaine d’euros environ. Alors pourquoi ne pas l’avoir fait ici  ?!

Chez Madame Hallyday, le marketing est très sensiblement différent visiblement. Pour vous la faire courte cette fois, le concert en DVD à 20 euros ne propose lui aucun bonus. J’ai bien dit aucun (interview, backstage, etc. Rien de rien !).
En revanche, son équivalent en format Blue Ray a 30 euros, propose, lui, 15 titres supplémentaires en support audio. M’étant procurée la version en DVD, mais désireux de prolonger mon plaisir avec les 15 autres titres inédits, je n’ai eu d’autres choix que celui de repasser a la caisse afin d’avoir l’intégralité des morceaux de cette tournée. La version triple CD étant nécessairement un peu plus onéreuse que la simple version Double, j’ai en tout et pour tout déboursé quelques 40 euros au total. A ce prix-là, il fallait vraiment que la prestation, dans sa globalité, relève du domaine de l’excellence… Gagné ! 

Set List concert DVD
1.      Intro
2.      Rester Vivant
3.      O Carole
4.      Noir c’est Noir
5.      Requiem pour un Fou
6.      J’ai pleuré sur ma Guitare
7.      Au Café de l’Avenir
8.      Oh ma Jolie Sarah
9.      Quelque Chose de Tennessee
10.   Gabrielle
11.   De l’Amour (avec Yodelice)
12.   La Fille de l’Été Dernier
13.   Mystery Train
14.   Blue Suede Shoes

15.    Je te Promets
16.    L’Envie
17.    Fils de Personne (en Duo avec Yarol Poupaud)
18.    Le Pénitencier
19.    Mon Cœur qui Bat (en Duo avec Yodelice)
20.    Ma Gueule
21.    L’Idole des Jeunes
22.    Seul
23.    Nadine
24.    Que Je T’Aime
25.    Allumer le Feu
26.    Je suis Victime de l’Amour
27.    La Musique que J’Aime
28.    Quand on n’a que l’Amour (hommage aux victimes des attentats de Bruxelles)

Supplément titres Bonus sur version triple CD
1.       Je Veux te Graver dans ma Vie
2.       J’ai Oublié de Vivre
3.       La Terre Promise
4.       I’m Left You‘re Right She’s Gone
5.       I’m Gonna Sit Right Down
6.       Be Bop A Lula
7.       Elle est Terrible
8.       Le Bon Temps du Rock’N’Roll
9.       J’ai Besoin d’un ami
10.    Dans la Peau de Mike Brown
11.    Je la Croise Tout les Matins
12.    Jusqu’à Minuit
13.    Dégage
14.    Te Manquer
15.    Un Dimanche de Janvier
  Les Musiciens :
  •       Guitares Yarol Poupaud, Robin Lemesurier, Philippe Almosnino et Yodelice
  •       Basse: Laurent Vernerey
  •       Batterie: Geoffrey Dugmore
  •        Harmonica: Greg Zlap
  •        Claviers, Orgue Hammond: Alain Lanty et Jean Max Mery
  •        Choeurs: Amy Keys, Carmel Helen (Rrrr !) Gaddis, Rycko et Stefan Filey
  •        Cuivres: Renaud Gensane, Thomas Henning, Allen Hoist et David Mc Murray
(la chronique de "Rester vivant" l'album, en 2014 : johnny hallyday "rester vivant"
et celle de "jamais seul" en 2011: johnny hallyday "jamais seul")




Note pour le spectacle
Marketing produit

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