A
l’origine il y a le roman biographique de David Foenkinos, écrivain et
scénariste, à qui on doit notamment LA DELICATESSE, adapté à l’écran par
l’auteur et son frère en 2011, avec Audrey Tautou et François Damiens. C’est en
2010 qu’il publie LENNON, aujourd’hui adapté en bande dessinée par Eric
Corbeyan au scénario (LE CHANT DES STRYGES, ASSASSIN'S CREED…) et Horne aux
dessins.
L’histoire commence en 1980, au Dakota building, où John Lennon commence une thérapie. Allongé sur un divan, il revient sur les évènements de sa vie. Les auteurs ont choisi de garder un récit chronologique, en flashs back. Le point de vue est donc intime et psychanalytique, soulignant les fêlures et traumatismes de l’enfance. Une mère incapable de l’aimer, souvent absente, qui mourra jeune laissant une plaie béante, son père, Fred, marin, barré aux quatre coins du monde. Lennon a passé plus de temps chez sa tante Mimi.
Viennent les années lycée, au Quarry Bank, qui donnera son nom au premier groupe les Quarrymen. Lennon se forge une personnalité de voyou, agressif et bagarreur. Les années 50 sont celle de la vague Skiffle, cette musique folk jouée avec des instruments de fortune. Il crée son groupe, dont il veut être le seul chef. C’est la rencontre avec Stuart Sutcliffe, guitariste, de Pete Best, premier batteur, cajolé parce qu'il possédait sa batterie, puis viré deux ans plus tard (par Brian Epstein, manager, les autres n'ont pas eu ce courage), et un certain Paul McCartney, le plus jeune de la bande, et surtout… d’Elvis Presley vu à la télé. Du Skiffle on passe au Rock’n’roll.
On attend évidemment les passages sur les Beatles, et on ne sera pas déçu. Les années de galère, les tournées à Hambourg, le décès prématuré de Stuart Sutcliffe qui marquera profondément Lennon, le mettant un peu plus en colère. Si on maîtrise mal le parcours du groupe, on apprendra plein de choses, de petites anecdotes, mais pas que, le travail en studio, le rôle de George Martin aux manettes, la fin des tournées, la rivalité McCartney/Lennon qui se cristallisera en haine farouche.
Mais les auteurs restent sur leur ligne, tant mieux, sinon ce ne serait qu’un bouquin de plus sur les Beatles, à savoir inscrire constamment les éléments privés, intimes, les ressentis de l’homme, dans la carrière artistique. On parlera davantage de sa relation avec Yoko Ono que des aspects techniques d’Abbey Road, de la propension de Lennon à se façonner des personnages, du p’tit voyou des débuts au charismatique leader d’opinion. Tout cela est vécu dans la douleur par la star, le besoin d’être au-devant de la scène, et paradoxalement, de vouloir sortir de ces rôles, de ce personnage qu’il n’aimait pas, qu’il n’aimait plus, à l’origine de ses addictions aux drogues dures. La bd commence d'ailleurs par ce constat : "j'ai pris du hasch pour rigoler, de l'acide pour m'émanciper, de l'héroïne pour tout oublier...".
Tiens, un épisode qui m'était inconnu. Le retour de son père, une fois Lennon super star, qui non content de se vanter de sa progéniture, réclame du fric, a enregistré un disque avec cet argument marketing imparable : par le papa de John Lennon ! Ce qui a évidemment profondément énervé le fiston, qui allonge les chèques pour éloigner ce père indésirable, opportunément revenu dans la vie de son fils.
Le dessin est en noir et blanc, encré au pinceau, nuancé de gris. On reconnait bien sûr chaque protagoniste. Les puristes tiqueront parfois sur les représentations d’instruments, batterie, guitares, la fameuse basse Hofner… mais bon, l’important n’est pas dans ce genre de détails.
L’histoire étant fait de souvenirs, certaines planches illustrent des fantasmes, des pensées, des rêves, parfois drôles, comme ce Lennon bouffi, vieilli, presque chauve, sirotant bières sur bières lorsqu’il évoque le Elvis des dernières années, auquel certain le compare, dans son statut de star déconnectée. Un dessin revient souvent, celui d’une valise posée sur un lit, celle du gamin balloté de foyers en foyers, ou plus tard, d’hôtels en hôtels. Les cadres sont soignés, il y a un vrai travail de "mise en scène". Horne réutilise certaines cases, à l’identique, procédé qui irrite certains lecteurs. En début de chapitre, on revoit toujours Lennon sur son divan, qui lance une nouvelle séquence de souvenirs. L’image est la même. Je n’y vois pas une facilité, mais un procédé narratif classique, utilisé dans le cinéma, lorsqu’au sortir d’un flash-back on revient au narrateur principal. De même, le Dakota building est reproduit plusieurs fois, mais recadré. Là encore, on pense au cinéma, au plan d’ensemble, plans moyens, gros plans.
Le récit se fait quasiment sans dialogue, c’est John Lennon qui parle à sa psy, qui raconte, comme une voix-off. Les phrases sont courtes, simples, informatives, c’est le dessin qui en rend toute la profondeur. Le rythme ne faiblit pas, tout concorde à rendre la lecture aisée, lisible, addictive. Il me semble que le portrait est juste, n’éludant pas certains comportements (le lost week end) ne les excusant pas non plus. Comme beaucoup d’artistes de cet acabit, le personnage est plus complexe qu’il n’y parait, derrière le gendre idéal en costard de 1964, l’intello facétieux aux lunettes rondes (il était myope comme une taupe), se cache un être tourmenté, qui n’a eu de cesse de gagner sa place au firmament, et une fois atteinte, n’a souhaité que s’en libérer.
L’histoire commence en 1980, au Dakota building, où John Lennon commence une thérapie. Allongé sur un divan, il revient sur les évènements de sa vie. Les auteurs ont choisi de garder un récit chronologique, en flashs back. Le point de vue est donc intime et psychanalytique, soulignant les fêlures et traumatismes de l’enfance. Une mère incapable de l’aimer, souvent absente, qui mourra jeune laissant une plaie béante, son père, Fred, marin, barré aux quatre coins du monde. Lennon a passé plus de temps chez sa tante Mimi.
Viennent les années lycée, au Quarry Bank, qui donnera son nom au premier groupe les Quarrymen. Lennon se forge une personnalité de voyou, agressif et bagarreur. Les années 50 sont celle de la vague Skiffle, cette musique folk jouée avec des instruments de fortune. Il crée son groupe, dont il veut être le seul chef. C’est la rencontre avec Stuart Sutcliffe, guitariste, de Pete Best, premier batteur, cajolé parce qu'il possédait sa batterie, puis viré deux ans plus tard (par Brian Epstein, manager, les autres n'ont pas eu ce courage), et un certain Paul McCartney, le plus jeune de la bande, et surtout… d’Elvis Presley vu à la télé. Du Skiffle on passe au Rock’n’roll.
On attend évidemment les passages sur les Beatles, et on ne sera pas déçu. Les années de galère, les tournées à Hambourg, le décès prématuré de Stuart Sutcliffe qui marquera profondément Lennon, le mettant un peu plus en colère. Si on maîtrise mal le parcours du groupe, on apprendra plein de choses, de petites anecdotes, mais pas que, le travail en studio, le rôle de George Martin aux manettes, la fin des tournées, la rivalité McCartney/Lennon qui se cristallisera en haine farouche.
Mais les auteurs restent sur leur ligne, tant mieux, sinon ce ne serait qu’un bouquin de plus sur les Beatles, à savoir inscrire constamment les éléments privés, intimes, les ressentis de l’homme, dans la carrière artistique. On parlera davantage de sa relation avec Yoko Ono que des aspects techniques d’Abbey Road, de la propension de Lennon à se façonner des personnages, du p’tit voyou des débuts au charismatique leader d’opinion. Tout cela est vécu dans la douleur par la star, le besoin d’être au-devant de la scène, et paradoxalement, de vouloir sortir de ces rôles, de ce personnage qu’il n’aimait pas, qu’il n’aimait plus, à l’origine de ses addictions aux drogues dures. La bd commence d'ailleurs par ce constat : "j'ai pris du hasch pour rigoler, de l'acide pour m'émanciper, de l'héroïne pour tout oublier...".
Tiens, un épisode qui m'était inconnu. Le retour de son père, une fois Lennon super star, qui non content de se vanter de sa progéniture, réclame du fric, a enregistré un disque avec cet argument marketing imparable : par le papa de John Lennon ! Ce qui a évidemment profondément énervé le fiston, qui allonge les chèques pour éloigner ce père indésirable, opportunément revenu dans la vie de son fils.
Le dessin est en noir et blanc, encré au pinceau, nuancé de gris. On reconnait bien sûr chaque protagoniste. Les puristes tiqueront parfois sur les représentations d’instruments, batterie, guitares, la fameuse basse Hofner… mais bon, l’important n’est pas dans ce genre de détails.
L’histoire étant fait de souvenirs, certaines planches illustrent des fantasmes, des pensées, des rêves, parfois drôles, comme ce Lennon bouffi, vieilli, presque chauve, sirotant bières sur bières lorsqu’il évoque le Elvis des dernières années, auquel certain le compare, dans son statut de star déconnectée. Un dessin revient souvent, celui d’une valise posée sur un lit, celle du gamin balloté de foyers en foyers, ou plus tard, d’hôtels en hôtels. Les cadres sont soignés, il y a un vrai travail de "mise en scène". Horne réutilise certaines cases, à l’identique, procédé qui irrite certains lecteurs. En début de chapitre, on revoit toujours Lennon sur son divan, qui lance une nouvelle séquence de souvenirs. L’image est la même. Je n’y vois pas une facilité, mais un procédé narratif classique, utilisé dans le cinéma, lorsqu’au sortir d’un flash-back on revient au narrateur principal. De même, le Dakota building est reproduit plusieurs fois, mais recadré. Là encore, on pense au cinéma, au plan d’ensemble, plans moyens, gros plans.
Le récit se fait quasiment sans dialogue, c’est John Lennon qui parle à sa psy, qui raconte, comme une voix-off. Les phrases sont courtes, simples, informatives, c’est le dessin qui en rend toute la profondeur. Le rythme ne faiblit pas, tout concorde à rendre la lecture aisée, lisible, addictive. Il me semble que le portrait est juste, n’éludant pas certains comportements (le lost week end) ne les excusant pas non plus. Comme beaucoup d’artistes de cet acabit, le personnage est plus complexe qu’il n’y parait, derrière le gendre idéal en costard de 1964, l’intello facétieux aux lunettes rondes (il était myope comme une taupe), se cache un être tourmenté, qui n’a eu de cesse de gagner sa place au firmament, et une fois atteinte, n’a souhaité que s’en libérer.
Un
très joli travail, tant scénaristique que graphique, et un bon moyen pour les
néophytes de découvrir le parcours de celui se prétendant (lui et son groupe)
plus célèbre que le Christ !
Edition Marabulles, format 18x25, 156 pages.
Bon, la bd c'est pour les yeux. Y'a quoi pour les oreilles ? "Instant Karma" avec maman au tricot...
000
Intéressant ! En 1981 le journal de BD "A SUIVRE" avait sortie un hors série en hommage à John Lennon. De petite histoire courte sur sa vie et ses dernier moments. Horne fera une autre cohabitation avec Corbeyan en 2009 en faisant "La Métamorphose" de Franz Kafka en BD (Plus simple à lire et à comprendre sur ce support).
RépondreSupprimerMonsieur B, vous êtes un escroc, un briseur de rêves...
RépondreSupprimerMoi qui croyais que John Lennon avait réellement existé, voilà t-il pas que j'apprends que c'est juste un personnage de BD ...
Si ça se trouve, vous allez bientôt nous affirmer que Tintin et Astérix n'ont jamais existé en vrai ... J'suis déçu ...