vendredi 29 juillet 2016

JIMI X. de Louis Atangana (2015) par Luc B.



Voilà une autre approche de la biographie classique, le roman biographique. J’avais lu il y a quelques années l’excellent DINO de Nick Toshes, sur la carrière de Dean Martin, et là, dans le même genre, je tombe sur JIMI X de Louis Atangana. Ce franco camerounais est professeur de français, dans le sud ouest, et auteur de livres pour enfant. Mais aussi d’une biographie romancée de Billie Holiday, BILLIE H (2015). Il s’intéresse ensuite à Jimi Hendrix.

A mon sens, intéressant quand on ne connait pas le parcours du génial gaucher, puisque que cela se lit comme un roman, ou au contraire, quand on maitrise l’épopée hendrixienne, pour apprécier le travail de romancier fait à partir d’un matériau réel. Le livre s’attache surtout à l’enfance de Johnny Marshall Hendrix, oui Johnny, de son premier prénom, que son père s’empressa de changer, lors d’un second baptême, en James/Jimmy. Pas facile le père… James Allen Hendrix (jardinier), vétéran de la seconde guerre (cantonné sur une base militaire), se prenant en pleine poire le retour au bercail, sans boulot, cherchant à gagner trois dollars par-ci par-là, qu’il dépense illico dans une bouteille de Gin

Sa femme Lucille bibine sec aussi, entre deux raclées. Ca fait un peu Cosette sur les bords, disputes, hurlements, paires de claques, le petit en prend pour son grade aussi, dès qu’il l’ouvre un peu trop, proteste, se plaint, pose une question… En gros, un gamin n’a pas à s’immiscer dans la vie des adultes. Sauf pour faire le ménage et sortir les poubelles. A tel point qu’à la mort de sa mère, Lucille, le gamin et son frère ne seront pas conviés à l’enterrement. Trop de frais, et puis, ça sert à rien…

Seul récréation, quand le père passe ses 78 tours de rhythm’n’blues. Ca, c’est de la bonne vibration. Les pages consacrées à l’écoute des disques, à leurs études, aux gimmick entendus chez tel ou tel artiste, sont intéressantes, et décrites du point de vue de l’enfant. Les hivers passent, un p’tit frère arrive, c’est la fête à la maison, on mange du poulet grillé, et puis tout se rebarre en vrille. Lucille picole de plus en plus, se tire de la maison. Le gamin est confié à une tante, pour des durées indéterminées. Mais surtout à la grand-mère, quand Al en a soupé de l'avoir dans les pattes. Elle vit dans une réserve Cherokee. Entre la mamie et le gamin, c’est le coup de foudre.

Louis Atangana avait décrit des scènes de rêves de Jimmy, où le gamin se voyait appeler par une belle femme, une fée, marchant sur les nuages… Allusion au texte de « Layla », et rêvant plus tard d’une petite maison rouge dans les bois… « Red House »… L’auteur parsème son récit de clins d’œil à l’œuvre future d’Hendrix. Cette femme s’avèrera d’être la grand-mère, le refuge du petit garçon, des séjours paisibles, où son attirance pour la musique peut s’épanouir. Et la découverte de ses racines, les moqueries des copains sur cet échalas qui bégaie, vêtu d’une veste indienne qui fait sensation.

Jimmy gratte sur une guitare à une corde ! Avant cela, sur un manche à balais, sans que le père le voie. Plus tard, la famille (rabibochée, mais pas pour longtemps) assistera à un concert (de loin, pas de fric pour les billets) d’Elvis Presley. Jimmy est médusé. Le blues c’est chouette, mais le rock, waouh, ça c’est la classe ! Le gamin apprend à se déhancher comme le King, en jouant de la guitare, entre deux taloches de son père qui trouve cela vulgaire, et impie. Le gamin s’enferme, introverti, se crée un monde, de couleurs, de sons.

Le bouquin déroule l’histoire, en chapitres courts. L’école, l’adolescence, l’acné, les bigoudis, le petit frère dont il a la charge, les familles d’accueil, les premières copines. Car un gars qui joue de la guitare a du succès avec les filles. Mais lui, il en joue bizarrement. Autodidacte, aidé par son père qui sur le tard (jaloux ?) prend un crédit pour lui payer une guitare électrique (qu'il se fera voler). La p’tite copine à une sœur, qui a un jules, musicien. L’ado traine dans les clubs, demande des conseils, se fait rabrouer le plus souvent, mais parvient à se glisser ici et là, sur scène. La rumeur enfle… C’est qui ce mec qui joue du blues comme s’il venait de la planète Mars ?

Tous les passages dits sociaux, reviennent sur le cadre familial très dur dans lequel Jimi Hendrix a grandi. Sans misérabilisme, mais dans une veine mélo, avec foule détails du quotidien. Et puis c’est l’épisode de la bagnole empruntée pour sortir sa copine. Volée tranchera le tribunal, qui lui donne le choix entre la taule ou l’armée. Ce sera l’armée. Avec sa guitare, en guise de nounours, au pieu. Ce type est barge, on le laisse tranquile, dans son coin. Sauf un gars, bassiste, avec qui il monte un groupe : Billy Cox. Les deux hommes se retrouveront quelques plus tard, à Londres. Démobilisé, Jimi Hendrix entame une carrière quasi professionnelle. Le récit s'arrête ici.

La suite, c’est la rencontre avec Linda Keith, puis Chas Chandler, le départ en Angleterre en 1966, et la gloire…      

Le livre est court, le style concis, soupesé, bien écrit. Intéressant.     

  

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