Le réalisateur Michael Cimino
est mort, à 77 ans. Enfin, 77 ans, on n’en sait rien. Sa date de naissance
n’est pas clairement définie, son enfance possède quelques zones floues,
entretenues par le réalisateur lui-même, qui souhaitait empêcher ainsi qu’on
fasse des passerelles entre ses films, et sa vie. L’homme est assez discret,
voire mystérieux ces dernières années. C’est quoi cette tête ? Lorsque je
cherchais à illustrer les articles qui lui étaient consacrées, impossible de trouver son visage. Vous tapiez
« Cimino » et apparaissaient des photos d’un trans-genre d’une trentaine
d’années, brun, maigre, les yeux cachés derrière des Ray-Ban, vague sosie
d’Eric Serra. Et pis non, c’était bien Cimino, dont on ne savait plus s’il
s’agissait un homme, d’une femme, de son fils s’il en avait un… Seul le Statson souvent vissé sur le crâne
nous rassurait sur son identité !
photo récente... |
avec C. Eastwood, en 74 |
Ce qu’il aimait le plus dans la réalisation d’un film, trait commun aux « grands », sont les phases de repérage et de montage. Préparation et recherche des décors, afin de se rendre compte dans quel cadre évolueront ses personnages, et à voir les paysages filmés dans LA PORTE DU PARADIS, l’homme avait du goût ! Recherche historique, architecturale, afin de coller au plus à la réalité. Cimino était un maniaque, le moindre vêtement, accessoire devait être conforme, et ce sont des millions de dollars à chaque fois dépensés pour recréer avec exactitude l’univers souhaité. Les mêmes sommes sont aujourd'hui dépensées en effets spéciaux et merchandising... Lui, dépensait beaucoup, certes, mais pour de bonnes raisons. Le montage lui permettait ensuite d’agencer les nombreux plans tournés, en multi caméra, afin de donner la couleur, le rythme au film, faire émerger tel personnage plutôt qu'un autre.
avec Isabelle Huppert, 1980 |
Après LA PORTE DU PARADIS, Michael Cimino a été black-listé. C’est lui qui a tout pris dans la gueule, désigné responsable de la gabegie des auteurs, et la reprise en main des productions par les Studios. Il a soudain représenté ce qu’il fallait éliminer, pour privilégier le retour sur investissement. Michael Cimino déplorait que les jeunes réalisateurs indépendants croisés au festival de Sundance, ne rêvaient que d’une chose : être embauché par un gros studio pour tourner un Batman avec trois suites dans le contrat, et générer un max de blé.
avec Robert de Niro, 1978 |
avec Mickey Rourke, 1985 |
Michael Cimino avait une haute opinion de lui-même, on le voit dans son ouvrage CONVERSATION EN MIROIR sorti en 2004. Dans une première partie, il se raconte, dans un récit puzzle, schizophrénique, cocasse, où il convoque les fantômes de DW Griffith et Orson Welles pour venir à son secours, parle de ses virées alcoolisées et opiacés. Long monologue intérieur, pas toujours simple à suivre, pas sûr qu’il ait eu tous ses esprits devant sa machine à écrire.
Il a aussi écrit des romans, A HUNDRED OCEANS, très bon, rude, âpre comme un plan de Peckinpah, et BIG JANE, édité dans la Série Noire en France, où il estimait être mieux perçu que chez lui. Je confirme. Dans les années 2000, il disparait de la circulation, accorde moins d’interview. Quand LA PORTE DU PARADIS est ressorti dans son montage initial en 2012, il est reçu au festival de Venise, redonne quelques entretiens. Et puis s’en va… définitivement le 2 juillet 2016. Il avait en projet depuis 30 ans d'adapter LA CONDITION HUMAINE de Malraux... On aurait aimé voir ça...
Cinéaste hors norme, dernier nabab (Coppola qui donna l’exemple s’est depuis rangé des voitures) Michael Cimino n’a pas su, comme un Terrence Malick, un Kubrick, même un James Camerron, se faire rare, et imposer son indépendance artistique et financière. En dix ans, il a réalisé quatre grands films, dont deux chefs d’œuvre.
Liens vers les articles consacrés à Michael Cimino dans ce blog :
LE CANARDEUR (1974)
Florilège de quelques scènes... qui illustre l'adage de John Ford que Cimino faisait sien : "le plus beau à filmer, ce sont des chevaux qui courent ou des gens qui dansent".
000
Mort passée presque inaperçue, quasiment pas commentée, ce qui confirme le délabrement intellectuel du pays qui en fait au contraire des tonnes pour un politicard énarque haut fonctionnaire arriviste pantouflard (pléonasme) et 22 crétins millionnaires tatoués en short, comme il en existe (malheureusement)des dizaines de milliers. Enfin, la postérité fera le ménage comme d'habitude. La 1ère heure de Deer Hunter est un grand moment.
RépondreSupprimerCorrect Shuffle! Je n'ai appris sa mort que 2 jours après son décès, dans quelques entrefilets.
SupprimerManque plus qu'un hommage à Scotty Moore. Keith Richards disait:"Tout le monde voulait ressembler à Elvis, moi je voulais être Scotty"!
La 1ère heure de Deer Hunter est certes un grand moment, le deuxième est époustouflante et la scène finale bouleversante......On va pouvoir respirer les 22 crétins sont rentrés chez eux le queue entre les jambes....ouf! reste plus que les 180 drogués et le lamentable Gerard Holz sur nos routes .....c'est bientôt fini!
RépondreSupprimer