SK-1 était le nom de code d’une
affaire criminelle, la traque du tueur en série Guy George. SK-1 pour Serial
Killer n°1, parce qu’en France, à cette époque, c’était la première fois que la
police était confrontée à un tueur récidiviste de cette envergure.
Ce que tend à montrer ce film,
réalisé par Frédéric Tellier. On y suit l’arrivée au 36 quai des Orfèvres de
Franck Magne, nouvelle recrue. Son chef de groupe lui file des dossiers à
potasser, dont les meurtres de plusieurs jeunes femmes. Ça traine depuis des
mois, rien n’avance, un œil neuf pourrait apporter quelque chose. Aussi dingue
que cela puisse être, Franck Magne va faire ce qu’aucun policier n’avait fait avant :
chercher des liens entre les affaires. Et s’apercevoir qu’un certain nombre
d’éléments convergent vers un seul coupable. Le mot est lâché : et si un
tueur en série sévissait à Paris ?
Le film adopte un point de vue
quasi documentaire. On surprend rapidement un poster au mur, chez les flics,
l’affiche de L627 de Bertrand Tavernier. Détail anachronique, mais peu importe,
il indique clairement la direction que va prendre le film. On ne donne pas dans
le romanesque, ni dans le film d’atmosphère, ni dans le psychologique. On regarde le
travail besogneux des flics.
Le film met bien en avant le
manque de moyen matériel (tous les flics disponibles sont mis sur l’attentat du
RER en 95), le manque de temps, et la concurrence entre services. Car au
départ, plusieurs crimes, plusieurs dossiers, et donc plusieurs enquêteurs. Qui
travaillent chacun dans leurs coins, sans communiquer. Ainsi le commissaire
Jensen, homme d’expérience, qui ne veut surtout pas partager ses informations
avec le jeune Magne. Et même une fois admis qu’un seul tueur agit, par égo, par
stratégie politique, plan de carrière, Jensen garde ses dossiers fermés. Et
pendant ce temps, le tueur continue de tuer.
Ce que le film met à jour,
c’est aussi la désorganisation des services judiciaires, et notamment des
laboratoires. Les fichiers des délinquants sexuels n’étaient pas centralisés,
et rien ne contraignait les labos à collaborer avec la police… C’était y’a 20
ans, on croit rêver ! Dans le film on voit le juge Gilbert Thiel proposer
à la chef de la police judiciaire de désobéir à la loi : on n’a pas
le choix, on va obliger les labos à nous filer leurs fichiers, et exiger une
note écrite, argumentée, en cas de refus. Car Guy George laisse son ADN
partout. Et cette empreinte était gentiment répertoriée depuis déjà des années…
Le film suit la chronologie de
l’enquête, certains flics dans leur carrière ou dans leur vie. Les scènes
privées n’apportent pas grand-chose qu’on ne sait déjà (quand on bosse sur une
enquête comme celle-ci, la vie de famille en prend un coup) mais rien d’envahissant.
En parallèle, on suit la préparation du procès de Guy Georges, l’angle de
défense des avocats (oui il viole, mais est-on sûr qu’il tue ?). Cette
construction permet de ne pas lorgner vers le film de suspens classique,
puisque le spectateur en connait déjà tous les détails, et l’issue.
Et pourtant, Frédéric Tellier
parvient à maintenir la tension, parce que le spectateur attend des évènements
connus, voire célèbres. Comme le coup du pied égyptien (le second orteil plus
long), indice accablant et rabâché, sauf que Guy George n’avait pas cette particularité physique. Le fait qu’il n’ait pas été reconnu par une femme séquestrée qui
avait pu lui échapper. Ou l'énorme boulette des médias qui diffusent l’identité du tueur aux infos, alors que tous les flics de Paris planquent pour le choper au petit matin...
On a parlé de ce film comme d’un
ZODIAC français. ZODIAC était signé David Fincher. La mise en scène de Frédéric
Tellier n’est pas franchement à la hauteur, on assiste plus à un téléfilm de luxe, et le format télé (2 x 90 minutes) aurait été préférable. Car Tellier manque de temps, de développements, il empile rapidement les
faits, donne un coup d’accélérateur à son récit, quand il fallait au contraire en
rendre toute la complexité. Comme le dit l'avocate, je suis là pour traquer l'homme derrière le monstre. Le film ne répond pas à la question. Qui est cet homme, quels fantasmes assouvit-il et pourquoi ?
Par contre, l’ensemble est très
bien joué, par Nathalie Baye, Raphaël Personnaz, Olivier Gourmet, Michel
Vuillermoz, Thierry Neuvic. Et Adama Niane, dans le rôle pas facile de Guy
George, dont la scène des aveux à l’audience est très forte.
L'AFFAIRE SK1 scé : Frédéric Tellier, David Oelhoffen
couleur - 2h00 - scope 2:35
Connais pas le film. Je ne sais donc pas ce que vaut la prestation d'Olivier Gourmet, mais je trouve que c'est un très très bon second rôle comme on n'en avait plus depuis disons...Jean Bouise, par exemple.
RépondreSupprimerJe voue une passion sans limite pour Olivier Gourmet. Une présence énorme. Il éclaire toutes les scènes où il apparait, dans SK1, il en a pas mal ! Michel Vuillermoz, dans un tout autre genre (plus Buster Keaton que Spencer Tracy...) est aussi toujours fabuleux à voir à à entendre.
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