vendredi 22 août 2014

ILS VIVENT LA NUIT de Dennis Lehane (2012) par Luc B.


Dennis Lehane est un des plus fameux écrivains de Roman Noir, créateur d’un couple de détectives basés à Boston (théâtre de ses livres) Kenzie et Gennaro. Parmi leurs enquêtes, TENEBRES PRENEZ-MOI PAR LA MAIN (1996) ou GONE BABY GONE (1998) dont Ben Affleck a réalisé une adaptation au cinéma. Romans indépendants de la série de Kenzie, MYSTIC RIVER avait été adapté par Clint Eastwood, et SHUTTER ISLAND par Martin Scorsese. En 2008, Dennis Lehane prend encore un virage, et entame une saga de Boston, avec UN PAYS A L’AUBE, dont l’action démarre en 1918, et cible en particulier le personnage de Danny Coughlin, fils d’un responsable de la Police.

ILS VIVENT LA NUIT en est la suite, et s’attache à Joe Coughlin, le petit frère, qui a choisi la côté sombre de la vie. Il est hors-la-loi, comme il dit, et pas gangster. Nous sommes en 1926. Avec son trio de monte-en-l’air, Joe va dévaliser un tripot clandestin. Double erreur. Parce que le bouge appartient à Albert White, le caïd local, et parce que Joe y tombe raide dingue d’une serveuse, Emma, qui est aussi la maîtresse de White. Ainsi commencent les ennuis pour Joe Coughlin, et après un autre hold-up, sanglant celui-là, même papa, chef de la police, ne pourra pas grand-chose.

Théâtre de Tampa, 1930
Dennis Lehane nous capte vite, par sa narration rythmée, son style, et quelques grandes scènes de suspens, comme la fuite de Joe et Emma, à la barbe d’un Albert White, beaucoup plus dangereux qu’il n’y parait, ou plus tard, le sabotage d’un navire de guerre américain, ou encore l’attaque d’un dépôt d’armes. Joe Coughlin fera un passage en prison, et là encore, même si le décor est connu (trafic, violence, corruption, n'en jetez plus), les séquences carcérales sont passionnantes, riches en suspens, d’autant que c’est là que Joe va rencontrer son mentor, le vieux Maso Pescatore. L’élève, qui apprend vite, une fois libéré, va partir réorganiser un réseau de trafic de Rhum (c’est la Prohibition) en Floride, à Tampa.

Le récit bifurque, d’autres personnages apparaissent, Estèban et Graciela, passionaria révolutionnaire, Dion, le fidèle ami et pourtant celui qui avait trahi Joe. Outre la description du monde le Pègre, les tractations, les chantages, la construction d’un empire du crime qui passera tôt ou tard par les premiers casinos, on croise les fous du Ku Klux Klan, une illuminée folle de Dieu, les réseaux de libération de Cuba, et bien sûr les luttes intestines pour le pouvoir, et le contrôle des trafics. Et Joe, de s’apercevoir qu’il n’est que salarié, susceptible de redescendre les échelons de la hiérarchie criminelle sur un simple claquement de doigt de Lucky Luciano, le Big Boss.

Ceux qui ont lu UN PAYS A L’AUBE se diront que cette suite est un peu en dessous. Mais il faut avouer que la barre avait été mise très haute. ILS VIVENT LA NUIT est moins fourni en destins, on s’attache essentiellement à Joe, et couvre moins de thèmes, comme la description sociale, politique, la naissance du tissu syndical. C’est un roman moins ample, sans doute moins virtuose (mais à des encablures de la production lambda) qui réserve son lot de rebondissements, destin amoureux, fusillades, et climax dramatiques (assez cinématographiques, ce n’est pas un hasard si Lehane a été souvent adapté, apparemment Ben Affleck aurait acheté les droits de celui-ci), comme toutes les scènes autour de Coughlin, White et Pescatore, dans un casino mort-né, puis le grand lessivage à coups de rafales de Thompson et bain de pieds dans le béton.

Si vous cherchez à finir l’été avec un roman rondement mené, prenant, ILS VIVENT LA NUIT fera très bien l’affaire. Il peut se lire indépendamment de UN PAYS A L’AUBE, mais je ne saurais trop vous conseiller la lecture du premier !

530 pages, éditions Poche / Rivages Noir

2 commentaires:

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