jeudi 19 juin 2014

DES ACTEURS QUI CHANTENT ou DES CHANTEURS QUI JOUENT ? par Pat Slade






Serge Reggiani, chanteur sur le tard



Beaucoup d’acteurs français ont commencé devant une caméra et non devant un micro comme on pourrait le croire. Le plus connu reste Serge Reggiani qui commença à se faire un nom au théâtre. Il recevra un premier prix de comédie en 1938. On commence à le voir sur l’écran dans «Les Disparus de Saint- Agil» où il ne fait que de la figuration en jouant le rôle d’un élève. Entre «Britannicus» de Racine et «Les Parents terribles» de Cocteau au théâtre, il tourne de plus en plus, jusqu'à l’année 1952 ou il éclatera dans le rôle de Georges Manda, un ancien apache reconverti en charpentier et repenti de son ancienne vie. Manda tombera éperdument amoureux d’une femme de petite vertus «Casque d’Or» (De son vrai nom Amélie Hélie) jouée par Simone Signoret. Il en perdra la tête sur… la guillotine. Un chef d'œuvre de Jacques Becker. Sans arrêter de tourner, il se tourne vers la chanson en 1963 après avoir rencontré le directeur artistique Jacques Canetti chez ses amis Montand et Signoret. Son premier album sort en 1965 et est composé de titres de Gainsbourg, Moustaki, Boris Vian entre autres… C'est un succès auprès de la jeunesse qui prépare les évènements de mai 68. Une de ses chansons «Les loups sont entrés dans Paris» sera un hymne pour les soixante-huitards. Avec 92 films à son actif et une trentaine d’albums, Serge Reggiani est l’exemple parfait de l’acteur-chanteur.


Tirez sur le pianiste



«Si il ne buvait pas tant, il pisserait moins la vache !». Qui pourrait croire que le gars qui a chanté «La bohème» pouvait dire des choses comme ça ? Et pourtant… ! Charles Aznavour prononcera cette réplique dans «Un taxi pour Tobrouk» en 1960 grâce à Michel Audiard. Comme Reggiani, Aznavour à commencé aussi par le cinéma avant de se planter derrière un micro. Des 1936, il apparait sur l’écran et comme Reggiani, il joue le rôle d’un élève dans «Les disparus de Saint-Agil» (1938). Ce parisien, né de parents arméniens en 1924, se fera connaitre dans la chanson en 1946 au coté de Edith Piaf et des Compagnons de la Chanson. Il ne prendra son envol comme compositeur et chanteur soliste qu'en 1960 avec le titre «Je m’voyais déjà». Pourtant à cette époque, il avait déjà 13 films à son actif, et pas des moindres : «La Tête contre les murs» de Georges Franju (1958), «Le Testament d’Orphée» de Jean Cocteau (1959) et «Tirez sur le pianiste» de François Truffaut (1960) où l’on peut voir Bobby Lapointe chanter «Avanie et Framboise». Pour l’anecdote, même si c’est Aznavour au piano derrière Bobby, ce n’est pas lui qui jouait, il était en play-back complet. Je ne suis pas un admirateur du chanteur, mais j’aime l’acteur Aznavour que ce soit dans «La Métamorphose des Cloportes» de Pierre Granier-Deferre (1965) ou dans «Le Tambour» de Volker Schlöndorff (1979) dans lequel il tient le rôle de Sigismund  Markus le vendeur de jouets. 57 films entre 1936 et 2009, une belle carrière cinématographique.



Yves Montand, la Star



Yves Montand un acteur au multiples étiquettes, des rôles dramatiques à la comédie en passant par le style policier et le genre politique, il aura touché à tout, même à Marylin Monroe. Yvo Livi, italien né en 1921, à l’inverse de Reggiani et Aznavour débutera par la chanson avant de passer devant la caméra. Il apparaitra pour la première fois à l’écran au coté de Edith Piaf (Qui aimait bien les petits jeunes) dans «Etoile sans lumière» (1944). Un film ou l’on trouvera aussi Serge Reggiani à l’affiche. Après une apparition dans «Les portes de la nuit» (1946), il explosera dans les salles obscures au volant d’un camion rempli de nitroglycérine dans «Le salaire de la peur» de Clouzot (1953) avec Charles Vanel comme compagnon de "sauterie". Il sera le seul acteur français à avoir pu tenir dans ses bras, embrasser (et plus si affinités) la plus belle femme du monde de l’époque : Marylin Monroe, ce qui fera grincer des dents Simone Signoret. Beaucoup de films dans des genres qui se mêlent et s’entremêlent. Dans les années 70, ses rôles se tournent plus vers le militantisme politique, il fera une trilogie avec Costa-Gavras dénonçant les dictatures : la Grèce des colonels dans «Z» (1969), les procès (purges) de Prague en 1951 dans «L’Aveu» (1969) et l’envoi d’agent de la C.I.A dans des pays sud-américains dans «Etat de Siège» (1972), le seul rôle de soudard en cravate que jouera l'acteur dans sa carrière. Mais il apparaîtra aussi dans beaucoup de comédies dont les plus célèbres resteront «Le Diable par la Queue» de Philippe de Broca (1969) ou «La Folie des Grandeurs » de Gérard Oury (1971). Il fera parti de «la bande à Sautet», des films regroupant des affiches au casting impressionnants avec «César et Rosalie» (1972), «Vincent, François, Paul… et les autres» (1974) et «Garçon !» (1983). Il sera flic dans «Police Python 357» (1976), Procureur dans «I comme Icare» de Henri Verneuil (1979), ex-flic devenu truand alcoolique dans «Le Cercle Rouge» de Jean-Pierre Melville (1970), truand à la retraite dans «Le Choix des Armes» et Papet dans «Jean de Florette» et «Manon des sources» de Claude Berri (1986). Mais malgré tous les rôles qu’il ait joué quelques soit ses costumes, même le marcel couvert de pétrole dans «Le Salaire de la Peur», Il y a une chose qu’il a toujours eu à l’écran, c’est la classe ! Cela dit, on ne peut pas oublier la voix chaude de Montand chantant "les feuilles mortes" de Prévert et Kosma.


Philippe Clay plus Acteur que Chanteur





Philippe Mathevet, plus connu sous le pseudonyme de Philippe Clay, est plus resté dans les mémoires comme un chanteur que comme un acteur, et pourtant sa filmographie est beaucoup plus importante que sa discographie. Même si il commencera par chanter dans des cabarets comme aux Trois Baudets dans le quartier Montmartre, c’est en 1950 qu’il commence à tourner dans «Rome-Express» (1950), un obscur film qui ne fera pas date dans le cinéma français. Philippe Clay y joue le rôle d’un employé S.N.C.F... Il faudra attendre 1954 pour voir sa carrière prendre de l’ampleur sur les écrans et sur la scène. Il fréquente les caves de Saint-Germain-des-Prés et devient ami des habitués comme J.Prévert, B.Vian et S .Gainsbourg. Au cinéma, Jean Renoir fait appel à lui pour jouer le rôle de Valentin le désossé dans le film «French Cancan» au coté de Jean Gabin. En 1956, il est Clopin Trouillefou roi des gueux et de la cour des miracles dans le magnifique film de Jean Delannoy  «Notre Dame de Paris» avec la non moins sublime Gina Lolobrigida. Sinon, pas d’œuvre majeure dans tous ce qu’il a pu tourner, peut être «Le Gentleman de Cocody» (1965) avec Jean Marais et le très bon «Lautrec» (1997) de Roger Planchon ou il incarne un Auguste Renoir libidineux avec ses modèles en général et Elsa Zylbernstein dans le rôle de Suzanne Valadon en particulier. Il apparaitra aussi sur le petit écran et au théâtre, Même si sa silhouette dégingandée, sa taille importante (1m90) et son visage osseux ont laissé une trace dans les esprits, c’est quand même sa voix chantant le générique de la série «Les Brigades  du Tigre» qui lui donnera une reconnaissance auprès de ses contemporains.



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