Je vous invite à suivre une petite histoire du Rock'nRoll au cinéma, depuis les premières apparitions de Bill Haley en 1955, jusqu'au portrait déconstruit de Bob Dylan par Todd Haynes, en 2007. L'excellent ouvrage de Thomas Sotinel, paru en 2012 aux éditions La Martinière, m'a servi de guide. Et comme le veut le genre, oui, y'aura des oublis, on ne peut pas parler de tout ! Bon voyage !
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Il n’a pas fallu longtemps pour que le Cinéma rencontre le Rock’n’roll. Dès la naissance de ce dernier, à vrai dire. En 1953, on avait raté le coche, quand sort sur les écrans L’EQUIPEE SAUVAGE de Laslo Benedek, avec Marlon Brando en bicker sauvage et rebelle. Las, quand le viril motard met une pièce dans un judebox, ce qui en sort évoque davantage les chansonnettes de Doris Day. Imaginez la réaction des gamins si les haut-parleurs avaient craché « Summertime Blues »… Sauf quand 1953, le Rock’n’Roll n'existait pas.
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"Graine de violence" premier film au générique rock'n'roll |
Avec
des budgets de séries B, les studios sortent des productions pour teenager, à base de romances, courses de voitures, bikini, et des apparitions des nouveaux idoles. GO JOHNNY GO ! (1959) réunit Richie Valens,
Eddie Cachran, Jackie Wilson et Chuck Berry. Gene Vincent dans HOT
ROD GANG (1958) y va de sa chansonnette mais joue aussi quelques répliques, alors que
Jerry Lee Lewis dans HIGH SCHOOL CONFIDENTIAL n’a droit qu’à son play back. Ce film au titre français de JEUNESSE DROGUÉE (sic!) parle des dangers de la... drogue ! Il est réalisé par Jack Arnold, qui avait fait L'HOMME QUI RÉTRÉCIT. C’est
en 1956 qu’apparait la première BO, Bande Originale, un 33 tours issu du film
ROCK ! ROCK ! ROCK ! et c’est le label Chess Records de Chicago,
distributeur de Chuck Berry, qui tire le premier. Un coup de génie.


Pour le moment le cinéma n'utilise pas le côté subversif du rock, juste son aspect récréatif, décoratif, en incluant des scénettes musicales à des intrigues polycopiées. Chacun y trouve son compte. Les films coutent peu et rapportent beaucoup, le chanteur y fait sa promo, et la maison de disque sort le 33 tours, sur lequel les gamins se précipitent encore enivrés par les images. Les producteurs de cinéma se contrefichent du rock, une sous-culture. Le rock y sera vite aseptisé, remplacé par des ersatz, comme dans TWIST AROUND THE CLOCK d'Oscar Rudolph (1961) avec Chubby Checker, et son célèbre "Let's twist again", The Marcels, et la jeune Liza Blackwell.
Et
en Angleterre…

Si le cinéma a mis le grappin sur Elvis Presley, il ne pouvait rater les Beatles. En 1964, le producteur américain Walter Sheenan signe avec Brian Epstein (manager) une série de trois films. Plutôt que de confier la réalisation à un vétéran, c’est le jeune Richard Lester qui s’y colle. Lester fait partie de la Nouvelle Vague anglaise. Il a réalisé THE KNACK en 1964. Son idée n'est pas de faire jouer la comédie aux Beatles, qui, il l'a bien compris, lui, ne sont pas des acteurs. John, Paul, Ringo et George viendront pimenter une intrigue par leurs interventions loufoques. Le phénomène Beatles s'inscrit donc parfaitement avec le nouveau souffle des films de Lester. Le succès est foudroyant : HARD DAY'S NIGHT et sa bande-son aux petits oignons rapportera 22 fois sa mise. HELP ! (1965) du même réalisateur fait un moins bon score.
On évoque ensuite LES TROIS MOUQUETAIRES, qui ne se fera pas, comme LE SEIGNEUR DES ANNEAUX que John Lennon a tenté de vendre à Stanley Kubrick, qui déclina gentiment. En 1967, c’est MAGICAL MYSTERY TOUR, où Ringo Starr sort son épingle du (non) jeu. Mais comme c’est financé par la télé, il faut donc au groupe refaire un dernier film. Aux Etats Unis, ils sont déjà les héros d'un dessin animé. Fatigués de faire les gugusses devant une caméra, les Beatles optent donc pour un film d'animation, YELLOW SUBMARINE (1968), délicieusement psychédélique.


A cette époque beaucoup de musiciens, fans de cinoche, mettaient la main à la poche pour financer des projets, Jimmy Page, Roger Waters, George Harrison, lui-même producteur, notamment de LA VIE DE BRIAN des Monty Python.
Le
rock est maintenant bien intégré au cinéma anglais, mais aux Etats Unis, ça
traine les pieds. En 1964, un programme va faire fureur : le TAMI SHOW, un
montage de bandes promos, d’extraits de concerts, diffusé dans les drive-in où
les ados se pressent boire leur milk-shake et bécoter Peggy Sue sur la banquette
arrière. Ils y découvrent des artistes dont ils ne connaissent que la voix, sans les avoir jamais vus réellement à l'oeuvre :
les écuries de Soul Music, Motown, Stax, les Beach Boys, les Stones et James Brown,
qui écrase la concurrence avec son funk incendiaire. Le cinéma produit aussi
ses premiers documentaires, ceux de D.A. Pennebaker (réalisateur du premier
clip « Homestick blues ») sur Bob Dylan, DON’T LOOK BACK (1965) et EAT
THE DOCUMENT (1966). Dylan rechignera à montrer ce dernier, illustrant son
passage à la musique électrique.

Rions un peu avec le balourd et pompeux THE SONG REMAINS THE SAME de Joe Massot et Peter Clifton, avec les zozos de Led Zeppelin, dont Bonzo sur son tracteur, et Jimmy en Père Fourras... Les images datent de 1973, le film sort 3 ans plus tard... Observons de près un divorce à quatre dans LET IT BE (1969) de Michael Lindsay-Hoog, avec les Beatles. Arrêtons-nous sur ce Hoog, qui serait selon la rumeur le fils caché d'Orson Welles (!!) réalisateur de clips pour les Stones, et celui qui fut aux manettes pour le ROCK'N'ROLL CIRCUS, l'émission musicale orchestrée par Mick Jagger pour Noël 1968, et jamais diffusée... SOUL TO SOUL est un témoignage d’une tournée de Wilson Pickett, Ike et Tina Turner au Ghana. WATTSTAX de Mel Stuart revient en 1973 sur un méga concert de l'écurie Stax. Marc Bolan est impressionné sur pellicule par Ringo Starr lui-même, dans BORN TO BOOGIE (1971). Le batteur des Beatles y apparait avec Bolan dans des scénettes pseudo-comiques, des prises en concerts, et un "Children of révolution" avec Starr à la batterie et Elton John au piano. Les Stones déchantent en découvrant le montage peu glorieux de COCK SUCKERS BLUES (1972) de Richard Franck, Sodome et Gomorrhe rock’n’rollien, finalement planqué au fond des tiroirs de Mick Jagger soudainement pris de pudeur...
Passons sur les expérimentations audio-visuelles d'Andy Warhol et Paul Morrissey, avec le
Velvet Underground, qui aura une grande influence sur les futures scènes Glam
et Punk, et un certain cinéma dit underground. Une tendance raillée dans le très beau MACADAM COWBOY de John Schlesinger (1969), classé X à sa sortie pour cause de pornographie (une scène d'orgie psychédélique où apparait Paul Morrissey, cité plus haut), film auréolé de la merveilleuse chanson "Everybody's talkin" par Harry Nilsson et Toots Thielemans à l'harmonica. Et comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, certains musiciens prennent eux mêmes la caméra. Franck Zappa
réalise 200 MOTELS (1971) avec Ringo Starr – encore lui – dans le rôle du moustachu, et l'autre batteur rigolo Keith Moon.
Neil Young se filme dans JOURNEY THROUGH THE PAST (1972). Bob Dylan, en 1978, donnera dans la fresque de 4 heures
de RENALDO ET CLARA, (normal, quand on sait que la moindre de ses chansons fait 9 minutes !) co-écrit par Sam Sheppard, montage approximatif de concert, interview et fictions...
La donne va changer avec l'apparition d'une nouvelle génération de cinéastes, qu'on surnommera plus tard le Nouvel Hollywood. Du rock, ils en écoutent tous les jours. Alors pourquoi pas en mettre dans leurs films ? Parmi eux, un acteur black-listé, instable et junkie : Dennis Hopper. Son film : EASY RIDER (1969).
Qui fera l'objet d'un prochain épisode... vendredi prochain !
La donne va changer avec l'apparition d'une nouvelle génération de cinéastes, qu'on surnommera plus tard le Nouvel Hollywood. Du rock, ils en écoutent tous les jours. Alors pourquoi pas en mettre dans leurs films ? Parmi eux, un acteur black-listé, instable et junkie : Dennis Hopper. Son film : EASY RIDER (1969).
Qui fera l'objet d'un prochain épisode... vendredi prochain !
Zappa c'est le Coluche du Rock !
RépondreSupprimerA part Graine de violence et Macadam cow boy, on ne peut pas vraiment dire que la qualité soit au rendez-vous. Beaucoup ont assez mal vieilli, y compris Easy Rider avec ses passages chaotiques (le cimetière entre autres).
RépondreSupprimerJe confirme... aussi pour Easy Rider, dont on parlera la semaine prochaine. Il apparait que le but du jeu n'était pas de faire de grands films, mais de réunir un max de gus dans les salles de cinéma... Mais le Live in Pompéi est tout de même une expérience musicalo-visuelle assez osée.
SupprimerJe me souviens l'avoir vu en nir et blanc à la télé vers 75. Un choc, en effet. Ça changeait des Carpentier.
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