Boudé des médias, inconnu d'un grand public gavé de pseudo-idoles jetables, Christophe Marquilly est pourtant un des plus authentiques rockers/bluesmen de l'hexagone. En effet qui peut faire sonner le blues comme ça en France, hormis Paul Personne et une poignée d'autres comme Benoit Blue Boy et Bill Deraime je ne vois pas, et surtout pas Johnny, malgré ses efforts. Et pourtant - Oh Injustice! - c'est l'ex idole des jeunes qui remplit des Stades de France; mais Marquilly s'en fout, il poursuit son chemin loin des modes et comme il l'avoue lui même "le Showbiz ce n'est pas mon truc"..
Mais je vois déjà mes jeunes lecteurs -si tant est que j'en ai, y'a t'il encore des jeunes qui s'intéressent à la musique, je me le demande parfois, jeunes qui me lisez rassurez moi! manifestez vous!- aller chercher sur Wikipédia qui est Christophe Marquilly. Alors remontons la machine à remonter le temps, début des années 80, la préhistoire, rendez vous compte, pas d'internet ou de portable, tout juste un truc qui s'appelait le minitel (3515 Ulla toute une époque..) et le rock qui passaient encore parfois en radio ou télé (sur les 3 chaines à l'époque, pas 2541 comme aujourd'hui!) car en ces temps le rock n'était pas encore tout à fait mort et les ados écoutaient Téléphone, Trust, Scorpions, AC/DC....et Stocks, le groupe fondé par notre Marquilly, des lillois qui chauffaient sévère et eurent l'outrecuidance en 1982 de débarquer avec un premier album live, le bien nommé "Enregistré en public". Un indispensable à toute discothèque rock, classé par feu l'excellent mag Hard Force dans les 100 meilleurs live rock of all times, un brûlot aux influences à chercher du côté de ZZ Top, Creedence, Lynyrd, Johnny Winter ou Rory Gallagher, paroles en français, dont une fabuleuse version du "Cocaïne" du regretté JJ Cale et le tubesque "Suzy".
2 titres bien diffusés par les radios d'alors, encore relativement éclectiques, avec en plus, l'explosion des radios libres - qui ne le resteront guère longtmeps . Même dans les les villages et les hameaux les plus reculés, on peut découvrir ce groupe plein de ressources. Ce qui profite bien évidemment aux ventes de l'album.
Le groupe fera les premières parties de Thin Lizzy, Molly Hatchet ou encore Rory Gallagher, sortira un second album "Eclats de rock" en 1984, avec d'autres musiciens autour de Marquilly (chant, guitares, textes). Un disque peut être un tantinet trop en avance sur son temps, ou en décalage avec la scène Heavy-Metal du moment, moins cru et direct que l'image qu'avait laissé le fameux live. En conséquence, il dérouta et fut boudé par une frange radicale. Une mauvaise distribution n'arrangea guère les choses. Pourtant, pratiquement trente ans après, cet album a gardé toute sa fraîcheur (anticipant même les compositions les plus Rock d'un Fred Blondin), avec de superbes sons de guitares. Le groupe se dissout en 1987, mais se reformera épisodiquement, et en 2002 sort l'album "Troisième", et tourne avec Johnny Hallyday en 2003 avant de refermer définitivement la page en 2007. "Absurde" est le second album solo de Marquilly après "Rien n'est joué "en 2009.
Et je ne le cache pas cela me fait bien plaisir de le retrouver car je suis un fan de longue date, mon vinyle usé jusqu'à la corde peut en témoigner.. Marquilly c'est l’exacte antipode de toutes les conneries genre the Voice ou Star' ac et dérivés, un pur un dur, façonné "on the road ", un baroudeur du rock à la Calvin Russell ou Tony Joe White.
un grand merci à Alain Hiot pour les photos! (plein de superbes photos de live sur sa page ) |
Bon, on cause, on cause mais il est temps d'en venir à ce nouveau disque, pour lequel Christophe s'est entouré de Franck Marco (drums), Max Catteloin (drums sur 2 titres), et Anthony La Rosa (basse).
Et dés l'ouverture on est fixé, Christophe n'a pas renié son attirance pour le blues rock, "Absurde" suinte d'une certaine tension, au climat épais, un peu inquiétant, comme ce monde qui l'est aussi (absurde), voix un peu éraillée, chargée de vécu et guitare précise. Impression confirmée par la suite "J'attends", un rock au souffle puissant qui lorgne vers du ZZ Top, paroles sans concessions, à l'image de leur auteur ("je ne sais pas faire allégeance, insoumis aux costards chemises blanches"). Et ça continue au même tempo avec "L'empire du je", entre sudiste à la Allman Brothers et boogie primaire à la Status Quo avec en prime Christophe qui sort l'harmonica.
"Ca m'fait tout drôle" ravira les nostalgiques de Stocks, pour ma part c'était mon titre favori du fameux live, ici en version studio, une sorte d'absolu du blues rock, avec ses oiseaux de nuit, ses piliers de bar, des filles, le genre de chanson que rien qu'en les écoutant, on voit un film défiler sous ses yeux, si vous voyez ce que je veux dire ("Quand l'alcool a remplacé le sang dans les veines, que les p'tites tiennent plus qu'à un fil, les coudes écartés sur le bar encombré par des mecs de mon style qui regardent les filles dans le noir...quand son regard se pose sur mes yeux délavés par la bière la fumée, le bluesman noir vient juste d’arrêter de chanter, je ferai peut être bien d'me tirer..").
Place à une ballade reposante sur les berges du Mississippi, aux racines du blues, avec "Là-Bas", country blues avec harmonica, super solo de gratte, puis arrive "Jeremiah Johnson" qui touche au sublime. Hommage bien sûr au film de Sydney Pollack avec Robert Redford. C'est encore une belle ballade porteuse d'images, celle des grands espaces, du Yuccon, des amérindiens, ("les plaintes des loups accompagnent les chants guerriers monotones"), aussi une parabole qui conte les aventures du pauvre Johnson qui ne cherchait qu'à fuir une "civilisation" dans laquelle il ne se retrouvait pas, comme Marquilly au fond. Un superbe titre intemporel, tout simplement.
Après "J'avais tant", un blues rock solide, nous avons droit à une jolie ballade, un rien désabusée, puis à un blues, genre le "Red house" d'Hendrix, au texte sensible et à la mélodie prenante, un des temps forts assurément.
"Virtuel des écrans" est encore un blues rock de belle facture, avec un petit coup d'harmo, "j'ai trinqué avec le diable" nous avoue Christophe, émule de Robert Johnson...
"Stetson blues" est la seconde reprise du live de Stocks (avec une intro à la "Just Got Paid" des barbus), et encore un de mes préférés, ("J'aurai voulu habiter l' Texas ou la banlieu d'Chicago, faire la sieste et boire une tasse de tequila quand y fait chaud... Je sais pas si vous êtes comme moi mais le rock ça laisse des traces") , et on termine avec un instru hispanisant "Andaluaia blues".
Pas grand chose à ajouter pour conclure, vous aurez compris que Christophe nous a pondu là un excellent album et que dans ce genre en France il est difficile de trouver mieux; vous savez ce qui vous reste à faire..
le site de Christophe pour se le procurer: marquilly.com
-PS 1 Mais si ce n'est pas malheureux qu'un disque de cet acabit ne soit disponible que via son site. On cherche quoi ? A enterrer Marquilly ? Parce qu'il n'a pas voulu se plier aux diktats d'une industrie musicale ? Sa musique ne va pas dans le sens de l'uniformisation ? Ah pour publier les déchets des Star 'Ac and Co, y'a du monde; triste époque)
-PS 2 nous retrouverons bientôt Christophe en interview dans ces colonnes.
Rockin-JL, avec l'aimable participation de Bruno
(lien) à lire aussi : L'interview - exclu -
Moi aussi ça m'a fait tout drôle de réécouter les meilleurs titres du fameux live de STOCKS remis au gout du jour par son créateur. Et entièrement d'accord on tient avec cet "Absurde" un très bon album. Un regret cependant que les 2 titres "Cocaïne" et "Suzy" ne soient présent que sur un mini-cd à part, ils auraient très pu faire parti du même support car la nouvelle version de "Suzy" est exceptionnelle. Espérons que celle-ci puisse ouvrir quelques arrières salles enfumées pour apprécié Christophe Marquilly avec son nouvel opus en live
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SupprimerFive stars pour ce post !
RépondreSupprimerJ'ai vu et écouté le Sieur maintes fois !
Dans des endroits les plus incongrues : Les 3 brasseurs de Lomme, un resto avec une minuscule estrade et un public limité à 100 personnes au maximum et dans le cadre d'une soirée de départ d'un N° 2 d'une grande banque régionale du NORD, c'est facile de trouver !
Un GRAND MONSIEUR, Christophe Marquilly !!! merci Christophe et tes Potes pour tant de bonheur que vous m avez donné (et toujours !)...Ne cherchez pas le Rock de la Métropole, c'est ICI que ca se passe ^^
RépondreSupprimer... Long Life RnR ^^ Phil
de Daniel D. Un vrai rockeur avec son blues à écouter et à faire écouter, que du bon chez ce généreux et humain Monsieur.
RépondreSupprimerSalut Christophe et à bientôt en live.