Encore Sidney Lumet ? Bah
oui, désolé si ce type a fait de bons films !! Nous en avons déjà parlé de
ce metteur en scène américain, décédé en 2011, vous verrez les liens en fin d’article.
Donc, cela signifie qu’on peut entrer illico dans le vif du sujet.
Sean Connery et Sidney Lumet, tournage |
LE DOSSIER ANDERSON, ou LE GANG
ANDERSON, ou encore THE ANDERSON TAPES en anglais, et la seconde collaboration
entre Sidney Lumet et Sean Connery, après LA COLLINE DES HOMMES PERDUS en 1965,
et avant THE OFFENCE en 1972. Autant ce dernier est un film extrêmement sombre
et dérangeant, autant LE GANG ANDERSON est dans la lignée des polars, plus
divertissant. A première vue… car Sidney
Lumet n’était pas homme à simplement réaliser un p’tit polar…
Duke Anderson sort de taule. Il
a pris 10 ans pour cambriolage. Et comme tout ex taulard qui se respecte, à
peine dehors, il organise un nouveau coup ! Parce que sa maîtresse habite un
immeuble très cossu de New York (ses premiers mots pour elle, juste en sortant
de l’ascenseur seront : « j’ai pas baisé depuis 10 ans », notre héros
est un grand sentimental… mais la scène réellement magnifique) cela lui donne une idée terrible. Cambrioler non pas
un appart, mais tous ! Tout
l’immeuble. Le vider entièrement, tableaux, bibelots, bijoux, meubles,
liquide… Pour cela, il faut une phase de
reconnaissance précise, une équipe de confiance, et une mise de départ. Duke
Anderson se rapproche d’un ami, lié à la mafia, qui accepte de financer le
projet, à deux conditions : 50/50 sur les bénéfs, et prendre dans l’équipe
un homme à lui, un dingue, un violent… et le descendre ensuite.
Hélas, et je ne vous révèle
rien, puisqu’on le sait dès le début, tous les gens qu’approche Duke Anderson,
qui deviendront ses complices, sont pour des raisons différentes déjà
surveillées par la police. Tous suivis, mis sur écoute, filmés… Ce que chacun
ignore, Anderson le premier.
Christopher Walken, Stan Gottlieb, Sean Connery |
Et c’est là que Sidney Lumet va
se distinguer de ses confrères, car son film porte sur un thème qu’il a souvent
évoqué, la justice, et les moyens qu’elle se donne. A travers ce film de casse,
Lumet se livre à une dénonciation d’une Amérique sous surveillance, parano,
grand thème du cinéma des années 70, comme dans CONVERSATION SECRETE (F.F.
Coppola) ou LES TROIS JOURS DU CONDOR (Sydney Pollack), KLUTE (A.J. Pakula). De quels moyens les
autorités peuvent disposer, pour protéger la population ? Quelle limite
est-elle admissible dans une démocratie ?
Car le sentiment de parano est
extrême dans ce film. Partout, tout le temps, ce ne sont que caméras, écrans, ordinateurs,
bases de données, micros, filatures, photos.
Dès les premiers pas de Duke Anderson en liberté, dans une gare, le
voilà déjà repéré par les caméras de surveillance parce qu’il fait les poches
d’un p’tit vieux (en réalité, un ami à lui qu’il cherche à aider). La caméra de
Lumet court sur les câbles téléphoniques, les bandes magnétiques, sur fond de
bruitages technologiques, drôles, puis agaçants, mais qui finalement en nous
portant sur le système, jouent parfaitement leurs rôles, ça nous inquiète et nous
hérisse. Il y a un aspect avant-gardiste dans cette bande son (qui a vieilli
bien sûr) d’autant que la musique composée par Quincy Jones, joue sur des
sonorités d’orgue, en trio jazz ou funk.
Sean Connery et Martin Balsam |
Face à toute cette technologie,
Duke Anderson semble bien dépassé. Il est d’un autre temps, utilise les
méthodes éprouvées, rechigne à la violence. Toute la préparation du casse,
rappelle le film OCEAN’S ELEVEN de Steven Soderbergh, avec notamment
l’antiquaire homosexuel chargé d’évaluer les marchandises, et joué par
l’excellent Martin Balsam (SUR LES QUAIS, DOUZE HOMMES EN COLERE, PSYCHOSE,
LITTLE BIG MAN, LES HOMMES DU PRESIDENT…). On frise la comédie, et même la
farce, avec le rôle du capitaine de police, droit dans ses bottes, les forces
de police ridiculisées, ou la scène au standard téléphonique (faut-il ou non
accepter un appel de détresse en PCV ?!). Avec Sidney Lumet à la caméra,
vous pouvez être sûr que la forme sera maitrisée, les cadrages parfaits, les
mouvements d’appareil précis, tout sera mis au service du récit, et le rythme
ne faiblit pas, en 1h40 c'est emballé. C’est au début du casse que Lumet utilise les flash-foward
(donc, le contraire des flash-back) en montage alterné, montrant les habitants
de l’immeuble témoigner à la police. Donc, l’après casse. Rien n’indique à ce
stade si le plan a réussi, mais on sait que la police est intervenue… Le casse en lui-même permet d’observer les
habitants de l’immeuble, les lâches, les filous, les pingres, comme ces deux
petites vielles, dont l’une dénonce l’autre car on a trouvé chez elle un
exemplaire du livre Histoire d’O !!
Mais alors que tout semble bien
se passer, le ton change. On s’énerve, on s’impatiente, la peur gagne les
esprits, la parano aussi. Anderson perd de son flegme, de son autorité. Il cède
à la violence. Y’a un truc qui cloche. Pourquoi ce silence. Cette rue
entraperçue des fenêtres, vide, calme. Anderson communique souvent avec un
complice, qui a pris la place du concierge. A priori, rien à signaler… Sauf
que. Sauf que le gamin, paralysé, dans sa chambre, expliquant aux truands qu’il
ne peut représenter une menace, cache une cibi dans son placard… Et puis cet appartement logiquement occupé mais
donc les propriétaires ne répondent pas. Curieux. Contrariant. Et puis ce large
plan à la grue, dehors, devant l’immeuble, un type, en chemise, un journal sous
le bras, qui marche. La caméra le suit, élargit le champ, et ce sont des
dizaines de voitures de police postées à chaque angle de rue, tapies, silencieuses,
prêtes à foncer. Ca, les hommes d’Anderson n’en savent rien. Ces plans
rappellent ceux de UN APRES MIDI DE CHIEN, du même auteur, avec Al Pacino
coincé dans sa banque.
Les mêmes déguisés en Hannibal Lecter ! |
Sidney Lumet mêle le grotesque,
la comédie, le suspens. Du grand art. Sur la fin, sèche, froide, plus de
musique, on ne rigole plus, les bas instincts reprennent le dessus. Au dernier
plan du film, toutes les bandes enregistrées, les fameuses Anderson’s tapes,
qui concernent ses complices (l’ironie est là, lui, Anderson, personne ne le
surveillait, on ignore même qui est ce type !) sont effacées, détruites.
Parce qu’illégales. Et cette histoire de holp-up débouchera sur une enquête,
alors on ne laisse aucune trace.
Dire que Sean Connery domine le
film est peu dire. Quelle présence ! On sait que l’acteur voulait sortir
du smoking de James Bond, il a prouvé de nombreuses fois qu’il était capable de
bien autre chose. Citons pour les seules années 70 : THE OFFENCE, L'HOMME QUI VOULUT ETRE ROI, LA ROSE ET LA FLÈCHE, L'ATTAQUE DU TRAIN D'OR et juste après OUTLAND génial western spacial... A ces côtés, le jeune Christopher Walken, diaphane blondinet
dans un de ces premiers rôles au cinéma. On le retrouvera dans ANNIE HALL,
VOYAGE AU BOUT DE L’ENFER, LA PORTE DU PARADIS, DEAD ZONE, PULP FICTION… Toute
la distribution est magnifiquement dirigée.
LE GANG ANDERSON, n’est pas
le plus célèbre métrage de la filmographie de Sidney Lumet. C'est une parfaite
réussite, que je vous engage à découvrir. Deux mécaniques s’y opposent, celle
d’Anderson et son plan de dingue, et la mécanique parallèle, invisible, sournoise,
le réseau d’informations qui circulent, qui mènera le héros à sa perte. Du
grand cinoche américain, qu’on se le dise !
THE ANDERSON TAPES (1971)
couleurs - 1h40 - format 1:85
Impossible de trouver une bande annonce digne de ce nom. Il n'y a que ce clip qui en reprend les images. ATTENTION !! Passées 3 minutes, vous verrez les dernières scènes du film ! Pour ceux qui ne connaissent pas, ce serait dommage, donc arrêtez-vous avant !!
THE ANDERSON TAPES (1971)
couleurs - 1h40 - format 1:85
Impossible de trouver une bande annonce digne de ce nom. Il n'y a que ce clip qui en reprend les images. ATTENTION !! Passées 3 minutes, vous verrez les dernières scènes du film ! Pour ceux qui ne connaissent pas, ce serait dommage, donc arrêtez-vous avant !!
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Sidney Lumet est mort
Son dernier film : "7h58 ce samedi-là"
Entièrement d'accord ... bon, j'ai pas vu le film, ça facilite le consensus.
RépondreSupprimerBientôt les Lumet / Pacino (Serpico, Un après-midi de chien) ?
Y'a des chances que le coffret y passe, oui...
RépondreSupprimerConnais pas celui-là. In n'a jamais dû passer à la télé, si?
RépondreSupprimerSur de petites chaines, coincées entre la 213 et la 245... Mais il est certain qu'il n'a pas l'audience d'un "Serpico"...
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