mardi 26 février 2013

MATHIS HAUG "Distance" (2013) par Rockin-JL


Voila un vrai plaisir de chroniqueur : recevoir dans sa boite aux lettres le CD d'un artiste sur lequel on ne s'est pas encore trop penché, le glisser dans sa platine et découvrir un petit bijou finement ciselé. Je m'y attendais un peu quand même vu que c'est un album Dixiefrog, produit par Jean-Jacques Milteau, qui pose aussi ses harmos dessus, autant de gages de qualité.
Mathis Haug n'est pas un débutant dans le milieu, le jeune troubadour franco-allemand a même déjà pas mal roulé sa bosse, en solo, avec son groupe Mathis & the Mathematiks ou encore aux cotés d'Emilie Loizeau, de bars en festivals ses prestations scéniques le font remarquer (Prix "talent jazz" au festival de Vienne).


Il nous présente là son cinquième album, le second pour le label à la grenouille après "Playing my dues" en 2011. Outre Milteau il s'est entouré  de Stephan Notari (drums, guitare acoustique, piano) , Benoit Rapetti (basse, contrebasse), Celine Bonacina (sax) et Mike Lattrel (tuba, mandoline, orgue, un multi instrumentiste américain réputé qui a déjà accompagné Popa Chubby, Neal Black, Buddy Miles..), Mathis quant à lui est au chant, guitare et banjo.
Pas toujours facile de coucher sur papier (ou sur écran plutôt, vivons avec notre temps..) les émotions qu’inspire une musique, mais on va essayer...

"We'll get there by dawn" nous plonge d'entrée dans un blues crépusculaire qui prend aux tripes, quelque part entre John Campbell, Johnny Cash et Léonard Cohen, la voix est profonde, sombre, soutenue par les traits d'harmonica discrets de Milteau.
Je verrai bien cette chanson pleine d'images  ("there's a moon over the bayou") en BO d'un film de Jim Jarmush  genre "Down by law" (clic) ou "Dead man"..
Changement de style avec une virée à bord du "Carnival train" , entre blues , folk, country et New Orleans,  un de mes titres  préférés, puis comme Mathis ne s'enferme pas dans un genre mais au contraire se renouvelle de morceau en morceau "Wise advise" à un coté blues des pays de l'Est, avec l'harmo de Milteau et un beau sax de Celine Bonacina. "Poodle dog" est une belle ballade soul aux accents  folk à la Bob Dylan / Neil Young.


Je voudrais également attirer l'attention sur l'écriture, chose que l'on fait rarement sur les disques chantés dans la langue de Shakespeare (et Beckham),  "sometimes I feel like I wanna howl all night long, go chasing cat and running after the postman (...) I just don't wanna be your poodle dog (...) when the summer comes don't you leave me  on the side of the road" ("parfois je sens que je voudrais hurler toute la nuit, poursuivre les chats et courir après le facteur... je ne veux pas être juste ton caniche... quand l'été arrive ne m'as-tu pas abandonné sur le bord de la route"). Une reprise ensuite, la seule, très personnelle, du "Sign of the times " de Prince, avant "Song for my brunette", une sucrerie pop/folk dépouillée, entre la british pop classieuse des Kinks et une ballade de Donovan ; superbe. Nous aurons d'ailleurs un morceau même couleur plus loin avec "Paper cup", protest song à la Pete Seeger.

 merci à nos amis du blues-café pour les photos, Francis à gauche et Cédric (des Chics types) à droite,  autour de Mathis.

 
Quand je parlais d'ambiances variées, avec "Heartbreaker" (et la ballade "The clown") on est dans le trip Tom Waits, super sax, harmo, guitares, ça part dans tous les sens, un peu délirant, ambiance club jazz enfumé, poussées d'adrénaline, film noir, une vamp en longs collants noirs boit un whiskey au bar, attention à la descente des flics... Je m'emballe je m'emballe, mais voila la force d'une musique : faire naître des images dans la tête de celui qui l'écoute.  Vous voulez du rock, du gospel, du blues ? Y'en aura pour tout le monde avec "Cannibal dancer", plus rock avec dans la voix un petit coté "Caraïbes", à la Harry Belafonte, puis go to Harlem avec le gospelisant "Is Jesus on my side"  et pour finir  "Sad and lonesome day blues", blues où Mathis exprime tout son toucher de guitare, dans le style Piedmont blues (Mississippi John Hurt, Blind Blake, Blind Willie McTell).

Mince déjà fini ! Pas besoin d'ajouter que j'ai eu le coup de cœur pour cet album, vous l'aurez compris. J'ai tout aimé, que ce soit la voix chaude, expressive et à géométrie variable de Mathis, les compositions soignées, les arrangements, la guitare ainsi que les autres instrus, le sax, les traits d'harmo, le piano, les influences variées qui colorent son blues de touches country, jazzy, pop ou soul. Indiscutablement nous avons là un grand talent et c'est plutôt réconfortant alors que nous sommes de plus en plus encerclés par les grossistes en  daubes. Alors rêvons que des artistes comme Mathis Haug soient un peu plus médiatisés, mais ce rêve est aussi entre nos mains, entre vos mains, achetons leurs albums, allons les voir en live, parlons d'eux autour de nous. I had a dream !... euh... Je crois que que c'est déjà pris ça...




quelques extraits puis "Wise advise" en live:

5 commentaires:

  1. Franchement ce que j'entends me séduit je m'en vasi aller écouter l'album sur la Grenouille. Merci de la découverte

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  2. Oui faisons un rêve où des artistes comme Mathis Haug, Fred Chapellier, Blues Power Band et bien d'autres accèdent juste à la notoriété à la hauteur de leur talent et qu'ils puissent vivre tout simplement de leur art et à l'inverse renvoyons la dernière greluche RNB (ainsi que ses nombreuses et nombreux avatars) là d'où elle n'aurait jamais du sortir, c'est à dire le néant.

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    1. Si seulement... Hélas, la justice n'est pas seulement aveugle, elle est également sourde !

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  3. Dans le Blues Café on s'y attelle à vous les faire découvrir en tout cas. Pourvu que ça dure !
    http://www.bluesactu.com
    Cédric

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