lundi 14 janvier 2013

ALEJANDRO ESCOVEDO - "Big Station" - (2012) par Philou



Un très grand songwriter méconnu...

Quasiment inconnu dans l’hexagone (200 personnes à son concert à Paris, en juin dernier), Alejandro Escovedo, né le 10 janvier 1951 à San Antonio au Texas, est une véritable légende aux USA.
Artiste authentique, intègre et modeste, il reste, malgré 11 albums studio à son actif, encore injustement méconnu du grand public et mérite que l'on s'attarde un peu sur son œuvre...

Ce fils d'émigrés mexicains est issu d'une famille de musiciens, il grandi au son des mariachis, du rock'n roll des sixties et du jazz latino. 
Dans la famille Escovedo, il y a donc le fils Alejandro, ses deux grands frères Pete et Coke, qui ont joué avec Carlos Santana, son petit frère Javier, fondateur du groupe mythique The Zeros et sa petite nièce Sheila E, la divine percussionniste aux multiples talents, bien connue pour avoir travaillé avec Prince
Au milieu des seventies, le jeune Alejandro balance ses premiers riffs dans un groupe de punk-rock de San Francisco, The NunsThe Nuns passent même en 1ère partie des Sex Pistols, le 14 Janvier 1978 au Winterland de San Francisco.

La rage Punk des seventies....
Serviteur du Rock'n' Roll depuis plus de 30 ans, on trouve sa trace au début des années 80 dans le groupe culte Rank And File, un combo country-punk désormais culte, qui inspirera un certain Jason Ringeberg (Jason and The Scortchers) ainsi qu'une ribambelle de groupes de cow-boys énervés comme The Beat Farmers, Green On Red, The Long Ryders, Blood On The Saddle...etc...
Après une ultime tournée, Rank And File s'installe définitivement à Austin. Mais le succès n'est pas au rendez-vous : "On était trop country pour les clubs de rock, et trop rock pour les clubs country !"  déclarera Alejandro Escovedo quelques années plus tard.
A Austin, Alejandro croise régulièrement Town Van Zandt, Billy Joe Shaver et ne manque pas les concerts des frères Vaughan qui passent tous les soirs dans les clubs de la ville. 
Le début de la reconnaissance arrive avec son 3ème groupe qu'il forme avec son frère Javier Escovedo : "The True Believers". Mais après la sortie de leur 1er album en 1986, le groupe s'évanouit dans le désert...
Au début des années 90, Alejandro travaille dans un magasin de disques et joue avec des groupes locaux d'Austin. 
Le 24 avril 1991, sa femme se suicide et le monde s'écroule autour de lui !!! Pourtant, il réussit à sortir son 1er album solo "Gravity" en 1992, un disque poignant, hanté par la mort de femme. Son talent explose enfin sur ce 1er essai solitaire et grâce à New Rose, on peut enfin écouter cet artiste en France.
En 1993, "Thirteen Years" est la sombre suite de "Gravity". Heureusement, le texan relève un peu la tête avec la sortie de "With This Hands", avec un petit coup de main de Willie Nelson. Parallèlement, Alejandro Escovedo n'oublie d'assouvir son amour pour le rock teigneux en publiant un album avec le groupe Buick MacKane, "The Pawn Shop Years".

Malgré la sortie d'albums plus somptueux les uns que les autres comme "A Man Under The Influence" (2001) ou "By the Hand of the Father" (2002),  Alejandro Escovedo ne parvient pas vraiment à toucher le grand public. 
En 2003, la mort vient le frôler et il échappe de peu à une hépatite C. La suite est difficile, il connaît de graves difficultés financière pour faire face à sa maladie. Heureusement, une trentaine de musiciens se réunissent pour ramasser les fonds pour le soigner, des artistes qui l'admirent, comme Lucinda Williams, Steve Earle, Ian Hunter, Charlie Musselwhite, Ian McLagan, The Jayhawks, Peter Case, Charlie Sexton, Howe Gelb, The Cowboy Junkies, Lenny Kaye, Calexico etc.... et même John Cale en personne. Tout ce beau monde se mobilisent pour sortir un double album en juillet 2004, "Por Vida: A Tribute to the Songs of Alejandro Escovedo" afin de le sortir de cet interminable tunnel de souffrances.
 En 2006, il revient à la vie avec un nouvel album "The Boxing Mirror" produit par John Cale.
 A partir de 2008, Jon Landau, l'ancien manager et producteur du Boss, décide de s'occuper sérieusement du texan et collabore avec lui sur les 2 albums suivants, "Real Animal" (2008) et "Street Songs of Love" (2010).

 
  
Après une p'tite compil "The Best of Alejandro Escovedo" qui sort en 2011, nous voilà donc avec son 11ème album studio "Big Station", dans les bacs depuis le 11 juin dernier.
Comme sur les 3 albums précédents, c'est le légendaire Tony Visconti (David Bowie, T.Rex, Sparks, Thin Lizzy, Marc Lavoine.. etc...) qui assure la production.
L'excellent guitariste Chuck Prophet (ex-Green On Red) qui a beaucoup travaillé avec Alejandro Escovedo ces dernières années, participe à l'écriture de 8 titres et fait sonner sa Fender Squier Telecaster avec une précision démoniaque tout au long de l'album...
En écoutant "Big Station" Alejandro Escovedo nous fait voyager dans son univers résolument Rock'n' Roll, tendu et nerveux, parfois plus léger et plus calme, mais toujours remplie de poésie. Évidemment, le texan avec sa Gretch (ou sa Gibson SG) en bandoulière, ne peut s'empêcher d'enregistrer des titres aux riffs de guitares sauvages et aux solos endiablés, à l'instar de "Man Of The World". Il sait également nous faire dresser les poils sur des chansons plus cool, dans un style country alternative, appelé également Americana (ou plus exactement ici, Amexicana) comme "Bottom Of The World", "San Antonio Rain" ou encore "Never Stood A Chance"
Si l'album précédent "Street Songs of Love" était introspectif, ce nouvel album est plutôt  tourné vers le monde extérieur comme le confirme l'auteur : -"Chuck Prophet et moi  voulions que ce soit un regard extérieur sur ce qui se passe dans le monde autour de nous"-
Les paroles qu'il met sur sa musique ne sont pas à l'eau de rose, mais sont de véritables histoires écrites avec compassion, des événements qu'il a vécu. "Sally Was A Cop" en est le parfait exemple, une chanson qui raconte l'histoire d'une femme agent de police dans une ville frontalière mexicaine, forcée de combattre contre les cartels de la drogue.
Et en hommage à ses racines mexicaines, il nous offre pour clôturer l'album, une reprise d'un vieux standard de 1959, écrit par Alvaro Carillo, "Sabor A Mi".
Le petit reproche que je pourrai formuler, c'est que les arrangements intimistes des premiers albums, générés à partir d'une guitare acoustique, d'une pedal steel ou d'un violon ont disparus. Ces instruments sont largement absents sur les collaborations avec Tony Visconti et Chuck Prophet. Le son est (un peu trop) puissant et il y a beaucoup de chœurs féminins et de rythmes syncopés percutants, disséminés un peu partout dans la production.  Cette particularité sonore mise au point par Visconti et Prophet depuis trois albums, enlève le coté authentique et mélancolique du troubadour texan, moi personnellement, je préférais l'ambiance de "Gravity",  de "Thirteen Years" ou de "A Man Under The Influence" ....
 
En écoutant le Prince le l'Americana, (comme l'a baptisé en juillet 2010 le magasine Xroad), les fans de Bruce Springsteen, de Tom Petty ou de John Mellencamp ... devraient certainement pouvoir écouter cet album jusqu'au bout sans avoir une poussée d'urticaire.









Alejandro Escovedo and The Sensitive Boys live "Man Of The World"



Et pour le plaisir...le Boss et Alejandro pour un "Always A Friend" d'anthologie !!!!!!


6 commentaires:

  1. Ah que voilà une bien belle idée que de nous parler d'Alejandro Escovedo! Un sacré bonhomme, bien entendu pratiquement inconnu ici! J'avoue humblement ne pas avoir écouté son dernier disque pour la bonne raison que j'ai un peu "décroché" depuis 2006 et son "The boxing mirror", j'ai essayé d'insister avec la suite "Real animal" et "Street songs of love", mais ça le fait pas....malgré le présence de Chuck Prophet que j'adore.
    Je reste fan de ses premiers opus et particulièrement "Gravity" et "With these hands", sa dernière grande oeuvre reste à mon sens le remarquable "A man under the influence", sans doute celui que a le mieux marché dans l'hexagone! (Il a dû en vendre une petite centaine!) Ceci dit je vais jeter une oreille sur ce "Big station" on ne sait jamais....
    Amicalement

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    1. Évidemment un artiste que tu connais bien mon cher JP !!!
      je suis d'accord avec toi, ces derniers albums sont(un peu) moins bons et ce "Big Station" est dans la même veine....
      Amitiés.

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  2. Pour être tout à fait honnête, ta petite chronique ci-dessus m'a fait réviser mon "petit Escovedo illustré" et je viens de réécouter ses derniers disques dont "Real Animal" et "Street songs of love"...force est de constater que c'est quand même bougrement bon! A part "The boxing mirror", pas terrible...! Bien qu'effectivement un peu plus commerciale et donc plus abordable, la direction prise par Escovedo ces dernières années est tout sauf inintéressante! Conclusion...'Big Station" in the basket! Merci Philou!

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    1. hello JP, gaffe au surendettement quand même !!!

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  3. "Always a friend"... se souvenir des belles choses !!!

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    1. Une très, très belle chanson qui fait revenir beaucoup de souvenirs ....
      Merci de votre passage.
      A très bientôt...

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