- Tiens Monsieur Claude, vous nous parlez encore de Valery Gergiev,
pourquoi pas, mais quel rapport avec l'hiver ?
- Parce que Valery Gergiev vient de publier un album
des 3 premières symphonies de
Tchaïkovski et que la 1ère s'appelle "Rêves d'hiver"…
- Ah je vois et à part vous ça intéresse qui ?
- Heuuu les mélomanes je pense, au moins Monsieur Pat Slade qui a un
faible pour cette belle symphonie et m'a souvent demandé d'en
parler…
- Tchaïkovski-Gergiev ont déjà eu un article consacré aux symphonies 4
à 6, comme cela vous aurez commenté les 6 qu'il a composées, vous serez débarrassé…
- Heuuuu oui… oui Sonia c'est celaaa… Allez donc bosser avant de dire
une ânerie… je la sens venir…
- oui Monsieur Claude… j'ai dit une bêtise je crois… désolée…
Sonia est en verve ce matin, mais elle n'a pas tort sur le fond ! Un DVD
de
Valery Gergiev
interprétant les trois dernières symphonies du "cycle du destin" de
Tchaïkovski
a déjà fait la une du Deblocnot, en compétition avec le même triptyque
dans l'interprétation légendaire d'Evgeny Mravinsky
(clic). Ce bel album consacré aux
symphonies 1 à 3 vient de paraître
et m'a donné l'idée de mettre une doudoune et des mitaines (les moufles
sur le clavier, ça ne le fait pas) pour évoquer les frimas à travers les
œuvres de trois compositeurs. Tout le monde pense déjà à "l'hiver" tiré des quatre saisons de
Vivaldi…
Tchaïkovski Symphonie N°1
"Rêves d'Hiver"
La
biographie du compositeur russe a déjà été détaillée dans ces pages.
Tchaïkovski
se révèle sans conteste comme le symphoniste majeur en la fin du XIXème
siècle en Russie. Si le groupe des symphonies 4 à 6, avec la "la Pathétique" en conclusion du cycle, s'est imposé comme un trio de chef d'œuvres du
genre, on trouve déjà le grand talent de mélodiste et d'orchestrateur de
Tchaïkovski
dans les symphonies de jeunesse. Elles ont chacune un surnom. La
première donc, "Rêves d'hiver", la seconde
'Ukrainienne" ou encore "petite Russie" qui est une œuvre rythmée et joyeuse, et enfin la
troisième "Polonaise" qui ne m'a jamais vraiment séduit par sa longueur un peu vaine, et un
manque de thèmes marquants (même si
Gergiev
ou
Karajan
ont su donner une savoureuse langueur dans l'adagio).
Tchaïkovski a 26 ans en 1866 quand il s'attaque d'arrache-pied à sa première symphonie. C'est une
période de très grand stress voire de dépression qui sera soulagée et
récompensée par un succès immédiat lors de la création en
1868. Curieusement et pour
contredire son sous-titre, l'œuvre
est composée du printemps à l'automne ! Il semble que ce sont les
souvenirs d'un voyage hivernal de Saint-Pétersbourg à Moscou que
Tchaïkovski essaye de peindre en musique. Elle comprend très classiquement
4 mouvements.
Des cordes qui frissonnent (c'est de saison) et un premier thème paisible
introduisent l'allegro tranquillo. Tout l'art du grand mélodiste
russe est déjà présent dans cette poétique introduction. La musique va se
déployer dans sa tonalité de sol mineur aux accents mélancoliques et
élégiaques.
Tchaïkovski ne se répand jamais en pathétisme lascif et
Valery Gergiev
et son
Symphonique de Londres encore moins. On rencontre une rythmique bien marquée et un jeu
enchanteur des bois et des cuivres aux belles couleurs agrestes.
L'adagio est l'un des plus beaux écrits par
Tchaïkovski. Peut-on imaginer d'immenses steppes enneigées et mordorées par un
soleil nébuleux ? Pourquoi pas ! Le chant solitaire du hautbois après les
longues phrases brumeuses des premières mesures peut y faire songer.
Gergiev
met en place ce tableau avec une grande subtilité. Cet
adagio assure à lui seul la popularité de cette symphonie. C'est
très émouvant et, même si la référence à l'hiver semble par trop
imaginative, on ne peut qu'aimer cette musique en l'écoutant près d'un bon
feu de bois… Ce doute quant à l'inspiration purement hivernale de l'œuvre
se justifie à l'écoute des deux derniers mouvements, scherzo et
andante-Allegro, vigoureux dans leur discours et le dramatisme
sous-jacent : tempête de neige ?
Flocons, glace craquante, blizzard, chacun créera ses images à l'écoute
d'une cette belle version. Depuis la rédaction de ce billet, exit la vidéo
! Donc toujours à Londres,
Igor Markevitch, éblouissant en 1963....
Ah ! J'oubliais,
Tchaïkovski
a également écrit une suite pour piano intitulée "les saisons" et comportant 12 pièces dédiés aux douze mois de l'année.
Tchaïkovski
n'est pas le seul à s'intéresser au calendrier.
Vivaldi bien sûr et aussi
Haydn (pour assurer l'enchaînement), et puis il existe une suite "les quatre saisons" une très belle musique issue de
l'imagination fertile du prince du bandonéon
Astor Piazzola. Elle a été enregistrée sur un
beau disque chez Orféo qui rassemble cette suite de
Piazzolla
et une transcription pour cordes des
"Saisons"
de
Tchaïkovski. Par ailleurs, Haydn
et son oratorio "Les saisons" a marqué d'une pierre essentielle ce genre à l'époque classique.
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Haydn : Les Saisons : L'hiver
Vers la fin de sa longue et fructueuse carrière,
Joseph Haydn
écrit deux oratorios qui sont la quintessence de son art : "La création" sur les textes de la Genèse et
sur un sujet plus profane, "les saisons". Ce vaste ouvrage est composé pour un trio de solistes (soprano, ténor
et basse), un orchestre et un chœur mixte.
On retrouve chez le compositeur le goût de l'épicurisme, de la joie de
vivre. L'œuvre présente un enchaînement des quatre parties avec une
variété bluffante de climats.
Haydn
déjà très âgé va travailler deux ans sur l'ouvrage qui est terminé en 1801
(il a 70 ans). C'est une musique sans métaphysique. Des pièces bucoliques
et folkloriques se succèdent avec, en filigrane, un hymne de
reconnaissance au Divin pour la renaissance de la nature au printemps, les
moissons, la venue de Jésus en hiver…
Cette grande et belle partition mérite sa chronique perso. Je vous
propose l'hiver et notamment son ouverture orchestrale de l'hiver, sujet
du jour. La musique très douce semble suggérer l'immobilisme de la nature
en hiver, les arbres pétrifiés par le givre, le silence des animaux qui
hibernent, la quiétude d'une famille rassemblée devant l'âtre. Une pièce
sublime de moins de 3 minutes… Plus loin... un air de soprano chantée par
Helen Donath
accompagnée par le chœur…
Nous écoutons l'introduction de l'hiver lors d'un live de
2012.
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Antonio Vivaldi : les Quatre Saisons : L'hiver
Lors d'une
chronique précédente, j'avais opposé (par le haut) les interprétations des "Quatre Saisons" du Prêtre Roux par
Janine Jansen
(une approche intimiste et chambriste) et par
Giuliano Carmignola
à Venise (une interprétation emprunte de folie).
Cet article avait été publié le jour du printemps 2012. Je parlais de
mille et une versions discographiques. Bien entendu, à coté de ma
sélection, il existe de très belles interprétations avec des options de
sonorité et de rythme les plus variées, une possibilité qu'offre cette
musique d'une grande richesse…
L'hiver comprend trois
mouvements comme tous les concertos baroques avec un programme précis en
forme de poème. Nous sommes dans un univers descriptif :
On écoute une version très vivante, celle de
Fabio Biondi
et de l'ensemble
Europe Galante.
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Quelques disques au pied du sapin
Le nombre d'enregistrements des trois premières symphonies de Tchaïkovski est moindre que celui du cycle du destin avec la "pathétique" en point d'orgue. En dehors de l'album Gergiev récemment paru et de l'intégrale Mutti qui illustre cette chronique, on pourra acquérir sans arrière-pensée la compilation des œuvres symphoniques par Herbert von Karajan, excellent serviteur du compositeur russe (un coffret de 8 CD Dgg avec les concertos interprétés de mains de maître par Sviatoslav Richter et Christian Ferras 6/6). Pour la première symphonie seule, essayez de trouver d'occasion l'interprétation raffinée de Michael Tilson-Thomas avec le Symphonique de Boston (Dgg 5/6).
Comme souvent pour les œuvres de l'époque classique telles "Les
Saisons" de
Haydn, les conceptions "à l'ancienne", sur instruments modernes, s'opposent à
un retour aux sources avec des instruments d'époque et une recherche
d'authenticité historique. Pour la première approche, l'interprétation de
Karl Böhm
à
Vienne
avec
Gundula Janowitz,
Peter Schreir
et
Martti Talvela
en 1967 me parait indémodable et de plus servie par un prise de son
éblouissante (les galettes vinyles surpassent les CD !).
René
Jacobs
offre une lecture enchantée, aux mille couleurs pour la conception dans le
style début XIXème… (6/6 chacun, Dgg et HM).
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CDs Valery Gergiev et Fabio Biondi
ha !!! Enfin la première de Tchaikovsky ! Merci Claude !
RépondreSupprimerz'avez bien fait d'insister M'ieur Pat, c'est beau!
RépondreSupprimerAttention de ne pas prendre froid Sonia et Pat, une petite vodka c'est excellent dans ces contrées glaciales...
RépondreSupprimerCaaat.... 3 Vodka s'il te plaît !!!!!!!!!!