- Mais ?! Monsieur Claude, c'est Mickey dans l'apprenti sorcier…
j'adooore… le chapeau, les balais… C'est de qui la musique ?
- D'un compositeur français Sonia, Paul Dukas, surtout connu pour cette
petite fantaisie symphonique…
- Ô Monsieur Claude, vous ne pouvez pas ne pas nous offrir la vidéo de
Disney…
- Il suffit de le demander mon petit… Et attention je suis en
astrologie occidentale Scorpion, et Chat chez les chinois, les deux
signes pour être sorcier !!
- Hiiii, je me sauve…
XXXX
Paul Dukas et Armin Jordan
Paul Dukas
n'est pas un grand compositeur… au sens "célèbre" du terme. Cela est sans
doute dû à la triple vie de cet homme : compositeur (un peu), critique
musical et musicologue de talent et enfin, professeur et pédagogue.
Paul Dukas
nait à Paris en 1865. Il prend très jeune des cours de piano.
Précoce, la fibre de la composition le gagne dès ses 14 ans. En
1881, il entre au Conservatoire de Paris où il se lie d'amitié avec
le plus novateur des compositeurs de sa génération :
Claude Debussy. Il remporte un second prix de Rome en 1888 pour sa cantate
Velléda. Comme toutes les cantates boursouflées sanctionnant un prix de Rome,
l'œuvre va dormir au fond d'un tiroir jusqu'en 2011 où elle sera
jouée à Venise pour "changer". J'en ai entendu quelques minutes, oui… bon…
ça mériterait un petit CD quand même.
En 1892, il se fait remarquer par une critique habile du
Ring
de
Wagner
dirigé par
Gustav Mahler
à Covent Garden à Londres. Il va commencer ainsi une seconde
carrière de rédacteur dans de nombreuses revues musicales de l'époque. En
1928, Dukas devient professeur de composition à Paris, succédant
ainsi à Charles-Marie Widor, célèbre organiste. Il aura comme élève
Olivier Messiaen.
Novateur et perfectionniste,
Dukas
compose peu et détruit beaucoup de ses partitions qu'il estime
imparfaites. Le patrimoine qu'il nous a légué est donc restreint et c'est
surtout
l'apprenti sorcier, le ballet
La Péri
de 1912 (qu'il faillit brûler) et une
symphonie en Ut. Il est aussi l'auteur d'un opéra
Ariane et Barbe-Bleue.
Il meurt à paris en 1935.
Les trois œuvres orchestrales mentionnées ci-dessus ont été gravées par Armin Jordan en 1992. Le chef Suisse
est né à Lucerne en 1932 et nous a quittés en 2006 à
Zurich. Ce grand chef discret a servi avec talent l'univers
lyrique, des opéras italiens au Ring de
Wagner
dont il donna une conception remarquable au
Grand Théâtre de Genève. Il a beaucoup dirigé
l'Orchestre de la Suisse
romande,
l'Orchestre de chambre de Lausanne, et l'Orchestre de la
Tonhalle de Zurich. Comme Molière ou Bernstein, il est pris d'un malaise à
Bâle pendant une représentation de l'Amour des trois
Oranges
de
Prokofiev
le 15 septembre 2006. Il succombe cinq jours plus tard en nous
léguant un beau parcours discographique, dont
ce disque enregistré avec
l'orchestre de la Suisse Romande.
L'Apprenti Sorcier, La Péri et la Symphonie en Ut
Disney
en 1937 a imposé la vision définitive de
l'Apprenti Sorcier
dans la culture universelle. Il s'agit d'un poème symphonique composé en
1897, d'après le poème de Goethe "Der Zauberlehrling" écrit un siècle plus tôt. Tout le monde connait cette histoire de jeune
sorcier qui profite de l'absence de son maître pour réaliser des
expériences qui le dépassent avec un, puis une armée de balais maléfiques.
L'animation est très fidèle au récit du poète.
L'orchestration de
Paul Dukas
est luxuriante.
Armin Jordan
adopte un tempo moins frénétique que
Léopold Stokowski
dans Fantasia. La qualité de la structure et la fantaisie des
couleurs sonores ressortent d'autant mieux à l'écoute (le contre basson
[7'20"]). Le chef dirige avec humour. Le discours de l'orchestre oscille
entre souplesse et dramatisme obsédant quand le pauvre apprenti perd tout
contrôle… Prise de son magique…
La Péri
est un ballet d'une vingtaine de minutes écrit en 1912 pour les
Ballets russes sur une commande de Serge Diaghilev. J'ai
souvent parlé du succès de ces ballets au début du XXème siècle et de la
participation de la crème des artistes tant musicaux que peintres de
l'époque (pour les décors). Voyons l'argument :
Iskender
s'est vu prédire une fin proche et part à la recherche d'une fleur
d'immortalité détenue par une
péri
(sorcière). Il tente de profiter du sommeil de celle-ci, mais en la
réveillant malencontreusement, il est envoûté par la danse de la péri.
Iskender ne pourra échapper au maléfice… Lors de la création
Natalia Trouhanova danse le rôle de la Péri et
Vaslav Nijinsky celui d'Iskender. Les décors et les costumes
sont de Léon Bakst.
L'œuvre débute par une courte fanfare qui n'a pour but que de calmer la
salle avant le début du ballet aux sonorités très ténues.
Paul Dukas
se voulait novateur et l'on retrouve dès les premières mesures un climat
enchanteur et oriental qui fait penser à l'"impressionnisme" d'un
Debussy
ou encore à
Shéhérazade
de
Maurice
Ravel. La mélodie se veut poétique, une flûte s'affirme dans la lascivité d'un
orchestre aux douces lumières exotiques. Cette partition légère n'a rien à
envier à
Daphnis et Chloé, toujours de
Ravel.
Paul Dukas
propose une partition moderne et
Armin Jordan
en distille toutes les saveurs et malices. Avec ce grand artiste,
l'orchestre de la
Suisse Romande
n'a rien perdu de
son ensorcellement, de sa puissance
et de sa clarté étincelante (les cors et les cordes) que savait donner
Ernest Ansermet. Écoutons :
La
symphonie en UT a été composée en 1896 et créée en 1897 par
Paul Vidal. Elle comprend trois mouvements comme celle de
César Franck
:
1 - Allegro non troppo, ma con fuoco 2 - Andante
espressive e fuoco 3 - Allegro spiritoso
C'est une grande symphonie qui étire ses thèmes avec douceur et tendresse
dans le début du premier mouvement. Une fanfare du développement est une
idée vaillante que l'on retrouve dans plusieurs œuvres d'autres
compositeurs contemporains d'importance comme
Albéric Magnard
dont je vous parlerai un jour. (Albéric ? difficile à porter…). Ce n'est
pas une symphonie à programme et encore moins de la musique à vocation
métaphysique. Cette symphonie s'écoute sans déplaisir grâce à
Armin Jordan
qui avec une belle articulation du discours fait ressortir à merveille les
frémissements des cordes, les changements de climats, les surprises et
facéties musicales cachées ici et là. Le second mouvement est une longue
méditation avec un développement plus énergique voire pathétique qui fait
songer à
Bruckner.
Dukas
qui aimait tant
Wagner
aurait-il entendu l'un des rares concerts dédiés au symphoniste (clic) ou parcouru une partition. Le final est joyeux mais je le trouve un
soupçon véhément… On écoute cette symphonie, toujours
Armin Jordan
à la tête de
l'Orchestre de la Suisse Romande
:
Discographie Alternative
Un beau disque qui n'a pas vraiment de concurrent dans ce programme. À
signaler un CD Telarc SACD avec le
Cincinnati Symphony Orchestra
dirigé par
Jesus Lopez-Cobos, une valeur sure.
Par ailleurs la version de référence de la symphonie en Ut est à mon sens
celle de
Water Weller
avec le
Philharmonique de Londres. L'énergie du premier mouvement nous entraîne dans un
maelström ; le second mouvement est
somptueux de sensualité et de subtilité. Par ailleurs ce double album
comprend 3 autres des plus belles symphonies françaises de l'époque :
celles de
Franck
(d'origine belge),
d'Ernest Chausson
ainsi que la 3ème de
Magnard
par
Ernest Ansermet
avec
l'orchestre de la Suisse romande. J'ai un peu honte de vous mettre l'eau à la bouche en vous parlant de
ce double album DECCA essentiel mais quasi introuvable (occasion à
prix accessible), grrr ! (6/6).
Armin Jordan
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