samedi 24 novembre 2012

BARBARA : 15 ANS D’ABSENCE par Pat Slade



De Monique Serf à Barbara


Je n’aime pas sombrer dans le culte de la personnalité des personnes que j’admire, comme le font les fans de Claude François ou de Johnny Hallyday, mais le 24 novembre 1997, une femme m’a fait pleurer, une femme pour qui j’avais une profonde admiration, Barbara venait de décéder à Bagneux. Déjà 15 ans que la chanson Française a perdu sa plus belle interprète féminine.
Parisienne pure souche, Monique Serf est née dans le XVII ème arrondissement. Une enfance ponctuée par de nombreux déménagement pour cause d’occupation nazie et pour fuir la chasse faite au juif sous le gouvernement de Vichy. Elle aura aussi à supporter le comportement incestueux de son père, chose qu’elle évoquera dans ses mémoires et dans une chanson "L’Aigle Noir".

Chanson que l’on croirait élégante au début, mais si l'on écoute bien et si l’on dissèque les paroles, "l’aigle noir" n’est autre que le père de l’interprète et fait référence au viol et à l’inceste. Écrite en 1970, elle est dédiée à Laurence qui est la nièce de Barbara. La chanson "Nantes"  ne serait-elle pas alors celle où elle donne son pardon à son père ? Chanson qui pourtant a été écrite en 1964. Alors le pardon pour avoir abandonné sa famille ou pour des rapports incestueux ?

De L’Écluse à Bobino


Après le conservatoire, elle quitte Paris et se rend en Belgique ou elle commencera sous le nom de Barbara Brodsky (Le nom de sa grand-mère) à chanter dans les cabarets le répertoire de Juliette Gréco, Germaine Montero et Jacques Brel qu’elle croisera souvent sur sa route. Retour sur Paris en 1955 ou elle commence à écumer les petits cabarets jusqu’à l’écluse en 1958 ou elle arrive à se forger un public de fidèle surtout composé d’étudiant du Quartier Latin et c’est dans ce même endroit qu’elle enregistrera sont premier 33 tours.
En 1959, elle apprend le décès de son père à Nantes, le lendemain elle commencera l’écriture de la chanson "Nantes" qu’elle ne finira qu’en  1963.

Après un premier Bobino loupé en première partie de Félix Marten, elle retourne à l’Écluse. Il faudra attendre deux ans et de nouvelles chansons pour attirer le succès et séduire Georges Brassens qui lui proposera sa première partie de Bobino. La réussite sera au rendez-vous. 1965 L’album "Barbara chante Barbara" est primé par l’académie Charles-Cros.
Cependant, elle "découpe" son diplôme pour en remettre les morceaux aux techniciens en signe de gratitude pour leur travail. En septembre de la même année retour à Bobino en vedette ou elle chante "Göttingen" et "Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous" dédiée à son public. A cette époque, la chanteuse n’hésite plus à se présenté, seule au micro, sa silhouette de femme fatale vêtue de noir.
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De L’Olympia Au Sommet



En 1967, après une tournée qui la mènera du Canada à l’Italie en passant par l’Allemagne (Ou elle enregistrera un album "Barbara singt Barbara zum ersten"), elle se retrouve en 1968 sur la scène de l’Olympia ou elle donne un récital unique retransmis en direct sur Europe 1. Puis elle retourne à Bobino pour une quinzaine de récitals avec Georges Moustaki qui, chaque soir, vient interpréter avec elle "La Dame Brune". Au fil des années, ses activités ne cessent de se multiplier et de se diversifier.
Après une série de concert qui l’emmènerons jusqu’au Japon, retour à Paris ou elle annonce ses adieux à la scène. En 1970, elle s’essaye au théâtre dans la pièce "Madame" de Remo Forlani ou elle joue et signe la musique, ce sera un échec. Trois mois après sort "L’Aigle Noir" avec son titre qui devient un standard, avec sa pochette couleur bois ou l’on pourra aussi trouver le  titre "Drouot". 

Barbara quitte définitivement l’étiquette Rive Gauche qui lui collait à la peau, elle est désormais inclassable avec sa voix et sa présence unique.
En 1971 elle passe devant l’objectif de Jacques Brel pour le film "Franz". Les albums s’enchainent avec le très subversif "Les amours incestueuses" et le titre "Perlimpinpin". Trois ans plus tard sort "La Louve" orchestré par William Sheller, une parution qui est suivie d’une tournée mondiale.


De Lily Passion à Précy



Elle commencera à se faire rare dans les bacs des disquaires à partir de 1974. Ce sera à cette époque qu’elle quittera Paris pour s’installer à Précy-sur-Marne dont le maire n’était pas encore Yves Duteil.
En février 1978 retour sur les planches de l’Olympia sous les caméras de François Reichenbach. En 1981, c’est la préparation du nouvel album  "seule",  pour la photo de la pochette, Barbara pose au balcon de sa maison de Précy.

De Pantin Au Châtelet


Bientôt arrive à l’horizon l’aventure de l’hippodrome de Pantin (Futur Zénith de Paris), des spectacles qui débuteront fin octobre 1981 et finiront le samedi 21 novembre, jour où à ma plus grande joie, j’étais présent dans la salle. Sous ce chapiteau bleu à bande jaune qui peut accueillir jusqu’à deux milles personnes, elle exige que le prix des places reste modéré, les plus chers seront à 85 francs (à peu près 13 euros). Pour unique décor, un rideau rouge et une moquette rouge. Des sièges numérotés, en plastique, recevront les spectateurs. Près du chapiteau, elle fait mettre deux roulottes prêtées par Jean Richard, Barbara vivra là le temps des représentations, elle ne rentrera pas à Précy.
Le spectacle débutera tous les soirs à 21h00 sous les spots de Jacques Rouveyrollis qui a déjà habillé de lumière tous les grands artistes Français. Vêtue d’un pantalon de velours noir et d’une tunique du même tissu et de la même couleur, accompagné par Roland Romanelli à l’accordéon et de Gérard Daguerre aux synthétiseurs, elle interprète 25 titres  plus cinq durant les rappels. Au programme, deux morceaux inédit "Regarde", célébrant la victoire de la gauche au présidentiel et "Pantin" qui sera interprété le soir de la dernière représentation pour remercier le public d’être venu.


Les critiques unanimes saluent le triomphe de la grande dame brune. Le spectacle sera gravé dans la cire et une cassette vidéo sera réalisée par Guy Job et Barbara.
1979 avait marqué sa rencontre avec Gérard Depardieu. Ensemble, ce sera l’histoire "Lily Passion" en 1985, une histoire d’amour et de meurtre sous fond de music-hall. Le personnage de Lily partage des points communs avec Barbara. Le spectacle sera monté et joué au Zénith en 1986.
C’est à cette même époque qu’elle devient active dans la collecte de fonds pour la recherche d'un traitement du sida, elle écrira même un titre à ce sujet "Sid’ Amour à Mort".

Le théâtre du Chatelet lui ouvre ses portes en 1987, Roland Romanelli est remplacé à l’accordéon par Marcel Azzola qui accompagnait Jacques Brel.
Le piano ne sera pas le seul élément du décor. Un Rocking-chairs posé au milieu de la scène servira de reposoir à l’artiste. Elle offre les droits d’auteur de "Sid’ Amour a Mort" à l’association Sol en si. Lors de ses concerts, elle met des corbeilles de préservatifs à disposition de ceux qui viennent l’écouter. Chaque soir des vingt-trois représentations, le public l’acclame et certains soirs les rappels durent plus d’une heure.


De Mogador à Tours


De février à Avril 1990, elle commence une série de concerts à Mogador (59 représentations).
Elle reprend la recette de Pantin et du Chatelet, avec pratiquement les mêmes musiciens, plus Dominique Mahut, célèbre percussionniste Français qui a entre autre joué avec Jacques Higelin et Serge Tomassi à l’accordéon. Depuis son récital du Chatelet en 1987, elle présente cinq nouveautés dont "Gauguin" en hommage à Brel, et "Coline", texte écrit par Jacques Attali sur une musique de Franz Schubert  le Klavierstücke D 946.
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De temps en temps, Barbara se pose sur son rocking-chair. Elle parle avec son public du Sida : "Mis à part l’abstinence, chacun fait ce qu’il veut ; mis à part la fidélité, chacun fait comme il dit, on n’a pas trouvé mieux pour lutter contre cette maladie". Est-ce utile de dire que c’est un nouveau triomphe ? Pour vous donner une idée de l’atmosphère et de la communion avec le public lors  d’un concert de Barbara, écoutez !

Fin 1993 elle retrouve le Chatelet pour 26 représentations, mais des problèmes de santés la contraignent à ne pas chanter. Les organisateurs annulent six représentations. Barbara loge à l’hôtel près du théâtre, le soir après le spectacle, des admirateurs disposent sur le sol un tapis de rose jusqu’à son hôtel. Mais après la dernière date du Chatelet, elle renonce à poursuivre le spectacle. Toutes les dates suivantes de la tournée sont annulées pour mon malheur, elle devait passer pas loin de chez moi, j’ai du me faire rembourser mes places. Après une période de repos, fin janvier, elle repart en tournée jusqu’au 26 mars. Le 26 mars, ce fut à Tours son dernier spectacle en public.

De Précy à Précy


1996, retour en studio pour 12 nouvelles chansons avec un texte de Jean-Louis Aubert "Vivant Poème"  et de Guillaume Depardieu "A Force".         

Ce sera son chant du cygne. Malade, elle écrit ses mémoires mais est interrompue par une  infection respiratoire foudroyante, elle est hospitalisée le dimanche 24 novembre 1997 et décède le lendemain.
Je vous conseille de lire ses mémoires "Il était un piano noir".


Vidéos


Ma plus belle histoire d'amour... Puis L'aigle noir à Pantin en 1981...

5 commentaires:

  1. cat foirien24/11/12 13:07

    merci Pat de rendre hommage à cette Grande Dame.

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  2. La chanteuse préférée de mon frère né en 1951

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  3. Incontournable ! La plus belle interprète de la chanson française partie trop tôt à mon goût! Pantin 1981 restera un des concerts dont je me souviendrais longtemps. Dèja quinze ans.... ! Le temps passe trop vite !

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  4. Quelle immense Artiste ! je suis toujours ému lorsqu'on évoque Barbara.

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  5. Quelle immense Artiste ! je suis toujours ému lorsqu'on évoque Barbara.

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