CLAUDE TOON : NO SURRENDER !

Oui c’est un bon camarade, oui c’est un bon camarade, oui c’est un bon camarade, et sa nouvelle chambre est au premier avec vue sur le parc…

La petite chorale qui nous a accueillis, samedi matin, n’a manifestement pas trop plu à Claude. Il avait le sourire crispé. Avec Rockin, pourtant, on était content de nous, après quatre mois de recherche, on lui avait enfin trouvé une place : LES CASSES NOISETTES, un établissement situé en bordure d’une départementale, calme, avec un terrain, un bassin, et des bancs. Et prédestiné quand on apprécie le ballet... Je ne pense pas que le stade de 100 000 places que Bouygues avait prévu de construire en bordure de propriété aurait été vraiment gênant. Et puis, des grues qui bougent, c’est amusant à regarder dans la journée.

Et Claude avait sa propre chambre, avec un coin salon, constitué d’un guéridon et d’un tabouret. Il y avait aussi une petite étagère, pour ranger ses disques. Au mur, en guise de bienvenue, le dirlo avait mis un poster - il savait que Claude aimait la Grande Musique -  juste à côté de la photo de Bernadette Soubirous ornée d’une guirlande électrique qui s’allume automatiquement le soir à 20 heures, soit 15 minutes avant l’extinction des feux. Sauf le samedi, on peut veiller jusqu’à 22 heures, pour regarder le début du Grand Cabaret de Patrick Sébastien. Et même, le samedi soir une fois par mois, une jeune concertiste vient faire ses gammes devant les pensionnaires, et ça, c'est chouette, car elle a un sacré talent (voir photo plus bas...).

En plus, le directeur nous a certifié que Claude, même arrivant en cour d’année, pourrait intégrer l’orchestre maison, il restait une place au clavecin. D’ailleurs, l’orchestre était en train de répéter dans une pièce voisine, on entendait un air connu…

- De la Grande Musique, avec des violons et tout, avait dit le directeur, en ce moment nous répétons « Arabesque » du Rondo Veneziano. Mais pour ceux qui préfèrent la musique pop, car nous accueillons aussi les anciens hippies, il y a un atelier Franck Michael. Bien sûr, d’autres activités manuelles sont proposées à nos pensionnaires, de la broderie, de la confection de corbeille en rotin, ou de l’aquarelle.

Mais ce qui nous avait vraiment décidé, en signant avec LES CASSES NOISETTES, c’est le partenariat qu’ils avaient avec COSTA CROISIÈRE, et la possibilité pour une dizaine de pensionnaires parmi les plus vaillants, de partir 15 jours en Méditerranée, en croisière musicale avec Christian Morin (et sa clarinette) pour un spécial : découvrons la musique de Bach. Vous avouerez que écouter du Bach sur un bateau, c’est somptueux…

Bref, on pensait vraiment faire plaisir à Claude. Elodie l’avait aidé à faire sa valise, Philou et Bruno étaient émus aux larmes, Vincent lui avait offert son badge de Ronnie James Dio (c’est pas rien, il ne l’avait pas en double celui-ci!). La séparation avait été un moment émouvant, pour notre ancien collaborateur, maintenant  à la retraite.

Rockin a redémarré la voiture. Avec Foxy, on n’osait pas se retourner pour dire au revoir, de peur que Claude ne se mette à courir après la voiture. Il est resté sur le perron, puis une infirmière est venue lui demander de rentrer, le diner étant servi à 17h50.

On a failli s’écraser le nez contre le pare-brise quand Rockin a pilé ! On ne peut pas, qu’il a dit. On s’est regardé tous les trois. Non, on ne peut pas… pas comme ça.

- Vous savez les gars, qu’elle nous a dit Foxy, c’est un moment que tout homme doit vivre. C’est le tour de Claude. Il a travaillé 40 ans, et maintenant, il prend sa retraite. On ne pouvait plus le garder avec nous, vous le savez…  Ça nous coutait trop cher en cotisation. Sans compter l’entretien de l’ascenseur, qu’il était le seul à utiliser. Nous sommes tous tristes, mais je crois que c’était la meilleure chose à faire.

"Tu crois vraiment ?" qu’on lui a demandé. Tu parles ! La Foxy, elle était comme nous, au bord des larmes. Vroum ! Demi-tour, crissements de pneus sur les gravillons devant le perron, j’ouvre la portière, Claude comprend de suite, claque les fesses de l’infirmière en passant, déboule l’escalier, plonge dans la voiture, et avant que le directeur n’ait eu le temps de réagir, nous étions déjà en route pour le Déblocnot.

Claude restera avec nous, point barre ! ! !

Au Déblocnot, on a notre quota de filles sexy, Elodie et Foxy. Et notre quota d’handicapés, avec Luc qui essaie encore de comprendre le principe des liens sur Facebook. Notre quota d’extraterrestres, avec Selmogue et son langage kobaïen tout droit issu de la planète Magma. Nous respectons aussi notre quota régionaliste avec Rockin’ et ses Bigouden’Girls, ainsi que notre quota de TOC, avec Bruno qui nettoie ses cordes de guitares 37 fois par jour, en commençant toujours par celle du haut, sans parler de notre quota d'amateur de bières avec le Philou...(dont le propre quota de bibine est en expansion continue).

Et maintenant, nous sommes en règle avec les nouvelles dispositions gouvernementales de lutte contre l’exclusion du quatrième âge. Puisque notre ami Claude, officiellement en retraite depuis quelques jours, gardera finalement sa place au sein du blog. Bénéfice immédiat : cela nous permet aujourd'hui de profiter d'une chronique sur la 5ème de Beethoven...Alors qu'il y a encore trois semaines il nous aurait dit : j'ai pas l'temps !