Pour bien commencer ma nouvelle année de chroniques, un bon p’tit polar fera parfaitement l’affaire. Surtout si ce p’tit polar est en réalité un grand polar ! Il s’agit de LE POINT DE NON RETOUR, réalisé par John Boorman, en 1967, avec Lee Marvin et Angie Dickinson. POINT BLANK en VO. Ah ouais je connais ! Etes-vous sûr ? Parce que POINT BLANK signifie en fait « à bout portant ». Et A BOUT PORTANT c’est le titre français d’un film policier de Don Seigel, avec Lee Marvin et Angie Dickinson, réalisé trois ans plus tôt ! Les mêmes acteurs, donc ? Oui. Le titre américain c’était THE KILLERS. THE KILLERS ? Je connais, Foxy Lady nous en a parlé. l'article de Foxy, c'est en cliquant ici. Oui, mais la version de Robert Siodmak (1946). POINT BLANK s’inspire, lui, d’un roman de Donald Westlake. Et PAYBACK ? Ça c’est le remake de POINT BLANK, celui de Boorman, avec Mel Gibson, et réalisé par Brian Helgeland en 1999. Et A BOUT PORTANT est aussi un polar français de Fred Cavayé, avec Gilles Lellouche...
Tout le monde suit ?
Revenons un peu sur le cas de John Boorman, un type que j’aime beaucoup, discret, grand réalisateur, un vrai auteur, qui commence par être critique de cinéma, monteur pour la télé anglaise, et qui réalise en 1965 son premier métrage : CATCH US IF YOU CAN. C’est un succès. Il y aura aussi DUEL DANS LE PACIFIQUE (1968), DELIVRANCE (1972), EXCALIBUR (1981) LA FORET D’EMERAUDE (1985) LE GENERAL (1998) LE TAILLEUR DE PANAMA (que j’adore, 2001)… Boorman aime les mythes, et aime les confronter à la réalité. Dans DELIVRANCE le mythe du bon sauvage en goguette en prend un sacré coup, de même le bon roi Arthur dans EXCALIBUR ! Donc, auréolé d’un premier succès, John Boorman arrive à convaincre une star américaine, Lee Marvin, de tourner un film avec lui. Marvin aime le scénario, et soutien le jeune Boorman dans sa démarche. Et une fois de plus, Boorman se coltine un mythe, un mythe cinématographique, hollywoodien : Le Film Noir. Qu’il va copieusement déconstruire ! Car Boorman, qui vient de la critique, est très influencé par la Nouvelle Vague, le cinéma d’Alain Resnais, de Godard, d’Antonioni. Et il va appliquer ces méthodes pour son polar 100% adrénaline, un polar intello diront certains, limite prétentieux. Que nenni ! Ca s'appelle le talent, c'est tout ! Tous des jaloux... Bon, mais ça raconte quoi ?
La trame est fort simple. Reese (John Vernon) est un gangster en dette avec la mafia. Il convainc son pote Walker (Lee Marvin) de monter un casse. Au moment de se partager le butin, Reese choisit de tout garder, de descendre Walker et en option, de se tirer avec sa femme. Mais Walker a la mauvaise idée de ne pas mourir, de se remettre, et de vouloir récupérer ses 93000 dollars. Le problème c’est que Reese a utilisé le fric pour rembourser ses dettes. Qu’à cela ne tienne, Walker remontera la hiérarchie mafieuse, pour récupérer son dû.

Car le hold-up du début à lieu sur Alcatraz, désaffecté. Boorman propose un montage parallèle, il déconstruit son récit, alternant des images de Reese suppliant son pote de l’aider, de Walker dans une cellule, deux balles dans le bide. On ne comprend pas tout de suite l’enjeu, on ne cerne pas qui sont des gens. On ne situe pas l’action dans la chronologie. Voit-on un flash-back, un souvenir, ou ce qu’il adviendra ? En fait, un peu tout cela à la fois. Ensuite, le récit se fera plus linéaire, mais entrecoupé de scène montrant l'amitié de Reese et Walker, la rencontre de Walker et de sa femme Lynne. Ce qui est intéressant, c’est le traitement de ces scènes. Boorman arrive à faire du polar classique, tendu, violent, tout en inertie, mêlé à de l’expérimentation narrative, du lyrisme, de l’onirisme presque, avec ces chœurs féminins de la bande son (très en vogue à l'époque). Comme dans cette scène de Walker et sa Lynne, au lit, enlacés, ils s'embrassent et retournent, et par effet de fondu Reese remplace Walker dans les bras de Lynne, qui elle-même se transformera en Chris (Angie Dickinson). Le ménage à quatre. Les aléas des couples résumés en quelques secondes. Et puis 1967, c’est le psychédélisme, dont on trouve l’empreinte sur certaines séquences, celle de la boite de nuit bien sûr, célèbre pour sa violence, pour les projections de couleurs stroboscopiques sur le visage de Walker. On ne peut pas ne pas évoquer le cas d’Angie Dickinson et ses tailleurs de couleur, des couleurs franches, pures, jaune, orange, toujours assortis, et qui bien sûr contrastent avec l’ensemble gris métallique des costards de Walker, du décor très urbains du film. Le traitement des couleurs est assez remarquable dans ce film, Boorman, comme un peintre, agit par aplats, par zones [voir photo ci dessus, la robe de Angie Dickinson et la longue-vue]. Sa modernité et sa violence (pour l’époque) se sont certes émoussées, mais ce qui prédomine, c’est l’action, et la maîtrise totale de Boorman sur ses cadres, ses focales, son sens du décor, son montage sec comme une baffe dans la gueule, et toutes ses idées de mise en scène (la scène du night club, ce chanteur soul qui hurle, les gens qui s'amusent pendant que Walker tabassent à tout de bras en coulisse !)

La bande annonce :
LE POINT DE NON RETOUR / POINT BLANK (1967) de John Boorman.
couleur - 1h32 - scope 2:35
Ne pas délaisser non plus le groupe de Rock Sudiste " POINT BLANK " qui mérite 6 étoiles...
RépondreSupprimerHa bon, je suis pas dans la bonne rubrique ??
Celui-ci est également prévu HRT.
RépondreSupprimerExact Hard Round, et c'est aussi une magnifique chanson de Springsteen sur The River... Mais comme tu dis, c'est pas la bonne rubrique !
RépondreSupprimerPas vu celui !à. Grave erreur on dirait! Aussi pour Angie Dickinson, les plus belles guibolles à l'ouest de l'Oural, qui rend maboule le Duke dans Rio Bravo...Même Jagger en a fait une chanson...
RépondreSupprimerJ'adore POINT BLANK dans The River. J'l'ai déjà dis? Et ben je le redis!
Bin merde alors...
RépondreSupprimerMoi qui voulait associer "POINT BLANK" un bon grand groupe de Rock Sudiste à ce très bon film...
Vous savez... C'est pas des manchots à la gratte...
Bon, bon, je sais c'est pas la bonne rubrique.