mardi 1 novembre 2011
RICHARD KOECHLI "Howlin' with the bad boys" (2011) par Rockin-jl
Un peu de géo pour commencer et un scoop: d'après mes récentes découvertes le Mississippi prendrait sa source…au Lac Léman! J'en suis persuadé après avoir écouté le dernier disque de Richard Koechli, un petit Suisse digne descendant des "grands anciens", ces pères fondateurs du blues –et par extension du rock- sur lesquels nous reviendrons plus loin.
Déjà le titre de ce 5ème album de " Mississippi" Koechli "Howlin' with the bad boys" renvoie l'amateur de blues vers Howlin' Wolf , un des plus grands bluesmen de Chicago , et "bad boy" évoque un titre de Eddie Taylor, le complice de Jimmy Reed, quant à la pochette, on peut y voir une photo N & B de Richard rappelant l'unique photo de Blind Blake...
Koechli n'est pas un débutant dans la musique, voila une vingtaine d'années qu'il arrange et produit pour d'autres d'artistes suisses, tout en tournant , avec ses complices de la "Blues Roots Company" , qui comme son nom l'indique, fait dans le blues/country/folk.
J'aime beaucoup l'histoire de ce disque racontée par son auteur: un rêve revenant chaque nuit de pleine lune, dans lequel au fond d'une cave lugubre il rencontrait les pionniers du blues qui lui demandaient de les sortir de l'ombre et de les faire mieux connaître aux jeunes générations qui les ont un peu oublié. Ça vaut bien la légende du Crossroads de Robert Johnson ou celle de Frank Marino visité par le fantôme d'Hendrix!
Et Richard s'est exécuté, d'abord par le livre "Masters of blues guitar", écrit en allemand et gagnant d'un important prix outre-Rhin (on espère la traduction en français) ; puis par cet album de 15 titres. En bon Suisse notre ami est multilingue, il y a donc 6 titres en anglais, 4 en français, 2 en allemand sans oublier 3 instrumentaux; que des titres originaux, chacun dédié à une ou deux légendes de la musique du diable. Citons les, c'est faire acte de mémoire et aussi comme Richard les honorer et les remercier de leur immense apport au patrimoine de la musique: Big Bill Broonzy, Mississippi John Hurt, John Lee Hooker, Charley Patton, Howlin'Wolf, Kokomo Arnold, Elmore James, Robert Johnson, Franck Huchinson (1897-1945, un des premiers blancs à avoir enregistrer du blues), Leadbelly, Memphis Minnie, Fred McDowell, Blind Blake, Blind Willie Johnson, Son House, Muddy Waters,Tampa Red.
Tous les styles sont abordés, du blues profond du Delta à celui plus élaboré du Piémont et chaque titre est en rapport avec le style du géant à qui il est dédié, un beau travail mené par Richard (guitare, slide, mandoline) et son band , Fausto Medici (drums et percussions), Michel Dolmetsch (piano, orgue Hammond, accordéon) et Dani Lauk (harmonica). Les textes aussi racontent des histoires autour des musiciens comme "Leave your toys at home" qui part d'une anecdote sur John Lee Hooker auquel le morceau est dédié, comme il se doit sur un beat "Hookerien" , qui fait penser à "Boogie Chillun". Autre titre qui ressort , "Howlin with the bad boys", un blues très "laid back", qui évoque irrésistiblement J.J. Cale; d'ailleurs l'album précédent de Richard s'intitulait "Laid back", tout un programme.. Citons aussi "Kokomo dans mes rêves", autour de Kokomo Arnold , et un beau texte qui révèle une vrai qualité de "songwriter". "CEO worksong" est une work song moderne dédicacée à Leadbelly, assez cinglante, comme "esclave en 2010", avec un bottleneck à la Fred McDowell (l'auteur du "Got to move" reprit par les Stones). Ironie aussi avec "Blues police song" qui égratigne les puristes du blues, sa "police". Blind Willie Johnson n'est pas oublié avec un blues plutôt sombre, dans l'esprit de ce géant , "Bruno", dédié aussi au frère de Richard, parti trop tôt écouter Muddy Waters là haut..
Un vrai album concept, que l'on peut rapprocher par l'esprit de "Chicago Blues a Living History" (à lire:chicago blues a living history )
Du beau travail dont les maîtres pré-cités peuvent être fiers et qui rappelle que le blues n'a ni frontière ni couleur, qu'il est avant tout une sensation et un feeling, et ça Richard il connaît..
l'histoire de cet album raconté par Richard lui-même:
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