Pourquoi Bob Dylan est-il un des musiciens les plus importants de l'après guerre, au même titre qu'un Thelonious Monk, Elvis, ou un Jimi Hendrix ? Pourquoi parle-t-on toujours de lui comme d'un génie, d'un type qui a influencé toute la musique post 65, à qui on déroule le tapis rouge à chaque prestation, alors qu'il en rate deux sur trois ?!
La réponse se trouve dans ce documentaire passionnant, réalisé par un passionné : Martin Scorsese, dont on connaît l’amour immodéré pour le blues et la musique rock. Il fut un des monteurs du film WOODSTOCK, et a produit récemment sept films sur le blues, réalisés par Wenders, Eastwood, Figgis, Burnett… Scorsese a aussi capté sur scène les Rolling Stones pour son film SHINE A LIGHT (ampoulé, mais quelques bons moments), et avait filmé en 1976 le dernier concert de THE BAND, sous le titre THE LAST WALTZ (ampoulé bis, rococo, mais de très bons moments). C’est d’ailleurs à cette occasion qu’il a rencontré Robbie Roberston (chanteur-guitariste de The Band), devenu depuis conseiller artistique dédié à l’illustration musicale de ses films. Car les amateurs de Marty (je me permets cette familiarité par amitié pour cet homme que j’admire, et qui, s’il me connaissait, me rendrait sans doute la pareille) savent que les bandes originales de ses longs-métrages regorgent de chansons issues des années 50’s, 60’s, 70’s. La BO du film CASINO est un must du genre… Est-ce sur une des dernières scènes des AFFRANCHIS qu’il nous balance « Layla » de Clapton ? Oui, je crois. Et le premier plan des INFILTRES, travelling fulgurant vers un bar lugubre, avec les Stones dans les oreilles ? Un vrai miracle ! Donc, cousin Marty s’attaque au portrait de l’oncle Bob, on est en droit de s’attendre au meilleur. Nos espoirs ne seront pas déçus.
NO DIRECTION HOME n’est pas à proprement parlé une biographie exhaustive. Le film s’arrête en 1966. Et on découvre l'itinéraire de Dylan, son enfance, ses influences, ses racines, ses débuts à New York, ses premiers concerts dans les clubs pour gagner de quoi se payer son dîner, son cercle d'amis artistes, plasticiens, auteurs, de son amour profond pour le folk, le blues, la country, musique à la fois de terroir et contestataire. Musique de tradition orale, chaque texte est chanté par les uns ou par les autres, adapté, modifié, la notion d’auteur étant alors peu présente. Dylan reprend cette tradition, rend hommage à son maître Woody Guthrie, qu’il traque (et retrouve) dans un sanatorium, mais bouleverse la donne en composant ses propres titres. Epluchant journaux et bouquins dans les bibliothèques, de vieilles coupures, des faits divers, il en tire matière à écrire, un matériau vivant, à la fois intemporel (de vieilles histoires) et contemporain, à la fois universel et personnel. Je ne sais plus qui dans le film dit : « quand Dylan chante devant un public, chaque personne a l’impression qu’il s’adresse à elle seule, directement, et pour des raisons différentes à chacun ». Toute cette transformation est longuement analysée, montrée, illustrée par Scorsese, grâce à des images d’archives fabuleuses, des centaines de photographies (car Dylan, qui en plus avait une petite gueule adorable, le regard pétillant de malice et d’intelligence, était suivi 24h/24 par les objectifs…) et des témoignages de proches, comme Joan Baez (des moments de pure grâce entre ces deux-là), Allen Ginsberg, Mickey Jones, Al Kooper (futur comparse de Michael Bloomfield, et qui s’est immiscé dans le studio d’enregistrement de « Highway 61 » se faisant passer pour organiste… anecdote fabuleuse !), D. A. Pennebaker (grand documentariste) , Pete Seeger, Dave Van Ronk (chanteur et ami des débuts, amusé de voir Dylan lui avoir piqué quelques plans…).
NO DIRECTION HOME n’est pas à proprement parlé une biographie exhaustive. Le film s’arrête en 1966. Et on découvre l'itinéraire de Dylan, son enfance, ses influences, ses racines, ses débuts à New York, ses premiers concerts dans les clubs pour gagner de quoi se payer son dîner, son cercle d'amis artistes, plasticiens, auteurs, de son amour profond pour le folk, le blues, la country, musique à la fois de terroir et contestataire. Musique de tradition orale, chaque texte est chanté par les uns ou par les autres, adapté, modifié, la notion d’auteur étant alors peu présente. Dylan reprend cette tradition, rend hommage à son maître Woody Guthrie, qu’il traque (et retrouve) dans un sanatorium, mais bouleverse la donne en composant ses propres titres. Epluchant journaux et bouquins dans les bibliothèques, de vieilles coupures, des faits divers, il en tire matière à écrire, un matériau vivant, à la fois intemporel (de vieilles histoires) et contemporain, à la fois universel et personnel. Je ne sais plus qui dans le film dit : « quand Dylan chante devant un public, chaque personne a l’impression qu’il s’adresse à elle seule, directement, et pour des raisons différentes à chacun ». Toute cette transformation est longuement analysée, montrée, illustrée par Scorsese, grâce à des images d’archives fabuleuses, des centaines de photographies (car Dylan, qui en plus avait une petite gueule adorable, le regard pétillant de malice et d’intelligence, était suivi 24h/24 par les objectifs…) et des témoignages de proches, comme Joan Baez (des moments de pure grâce entre ces deux-là), Allen Ginsberg, Mickey Jones, Al Kooper (futur comparse de Michael Bloomfield, et qui s’est immiscé dans le studio d’enregistrement de « Highway 61 » se faisant passer pour organiste… anecdote fabuleuse !), D. A. Pennebaker (grand documentariste) , Pete Seeger, Dave Van Ronk (chanteur et ami des débuts, amusé de voir Dylan lui avoir piqué quelques plans…).
Bob Dylan, en 1963, déjà une star, ovationné à chaque festival, ici en posture de chanteur itinérant. Le folk et le blues réunis en un même cliché.
Ce film, c’est l’extraordinaire impact de la chanson « Blowin’ in the wind », les séances d’enregistrement avec John Hammond de Columbia, une carrière qui décolle, les titres repris par des groupes en vogue dans les charts, les amis et collègues qui restent sur le carreaux, heureux, fiers d’avoir côtoyé la légende, mais parfois aigris, lucides. Car le petit Dylan est décidé à se faire un nom, et qu’importe les moyens pour y parvenir… Scorsese nous raconte cette histoire avec maestria, gourmandise, générosité, comme dans un de ses thrillers mafieux. On y voit ce petit gringalet, tignasse ébouriffée, clope au bec, grandir, mûrir, et devenir malgré lui porte parole de toute une génération d'Américains, puis d'Européens, qui se sont reconnus dans ses chansons. Ses triomphes dans les festivals de folk, debout sur une charrette, avec sa guitare, son harmonica et sa voix de crécelle. Et puis patatras !
L'hérétique ! Dylan en 1965, avec les "Hawks", futur "The band", toutes guitares branchées et claviers stridents.
L'hérétique ! Dylan en 1965, avec les "Hawks", futur "The band", toutes guitares branchées et claviers stridents.
Un jour, un peu las, par usure, par provocation, par instinct de ce que deviendra la musique pop, et tout simplement par envie d’aller vers ce qu’il lui plait plutôt que là où on l’attend, Dylan décide que ça sonnerait mieux à l'oreille s'il prenait une guitare électrique, et se faisait accompagner par des musiciens dignes de ce nom : Mike Bloomfield, Al Kooper, puis The Hawks, devenus The Band. Et là c'est le cataclysme ! Le héros est hué, injurié, traîné dans la boue ! La tournée de Manchester en 1966 (tournée par Pennebaker dans DON’T LOOK BACK), et surtout ce fameux festival de Newport 65, où Dylan débarque avec ses musiciens et ses amplis électriques, sous les yeux furibards de Pete Seeger dont on dit qu’il se précipitât hache à la main pour couper les câbles d’alimentation ! (lu dans « White Bicycle » de Joe Boyd, édition Allia, dont nous aurons l'occasion de recauser ici...) Dylan a commis le crime de sacrifier la noblesse du folk contestataire et ancré dans la réalité sociale, sur l’autel de la pop commerciale et bruyante, brouhaha électrifié pour teenagers boutonneux…
NO DIRECTION HOME n’est pas qu’un film sur Dylan, c’est un film sur l’Amérique d’après guerre, sur les mouvements sociaux, culturels, sur la musique, un film qui interroge, sur le talent, la célébrité, l’engagement des artistes. C’est un film très long, presque quatre heures, mais complet, disséqué, détaillé, dont les interviews intelligemment montées se croisent et se complètent, donnant de son personnage central une vision nette. Les nombreuses archives sonores et vidéos sont choisies avec pertinence. Précision de taille : ce n'est pas un film élitiste. NO DIRECTION HOME intéressera tout le monde ayant au moins une fois dans sa vie entendu une chanson de Dylan à la radio. Et c'est bien sûr un film scorsesien pur jus, rapide, passionné, qui va de l'avant, et pertinent ! Une interview du maître (réalisée 4 ans plus tôt et utilisée avec parcimonie) complète l'ensemble. Un film que l’on regarde d’une traite, ou en deux fois, puis sur lequel on revient, chapitre par chapitre. Il se feuillette comme un album photo. Les bonus DVD proposent des extraits de concerts, de passages en TV, en intégralité, alors que tronqués dans le montage du documentaire.
Springsteen disait : "En matière de musique, Elvis a libéré le corps, et Dylan lui a donné une tête". C'est bien vrai. Avec Dylan, la musique rock, commence à raconter des choses intelligentes, à se mêler de ce que racontent les grands, à ne plus être une musique d’ados, à dire "je ne suis pas d'accord", et à le dire dans des formats de chansons différents, inédits, avec des mots différents, mais surtout, à le dire bien, et à le dire à tout le monde. C’est ce que raconte ce film, documentaire quasi définitif sur Robert Allen Zimmerman, dit le Zim, qui fêtera l’an prochain ses 70 ballets.
NO DIRECTION HOME n’est pas qu’un film sur Dylan, c’est un film sur l’Amérique d’après guerre, sur les mouvements sociaux, culturels, sur la musique, un film qui interroge, sur le talent, la célébrité, l’engagement des artistes. C’est un film très long, presque quatre heures, mais complet, disséqué, détaillé, dont les interviews intelligemment montées se croisent et se complètent, donnant de son personnage central une vision nette. Les nombreuses archives sonores et vidéos sont choisies avec pertinence. Précision de taille : ce n'est pas un film élitiste. NO DIRECTION HOME intéressera tout le monde ayant au moins une fois dans sa vie entendu une chanson de Dylan à la radio. Et c'est bien sûr un film scorsesien pur jus, rapide, passionné, qui va de l'avant, et pertinent ! Une interview du maître (réalisée 4 ans plus tôt et utilisée avec parcimonie) complète l'ensemble. Un film que l’on regarde d’une traite, ou en deux fois, puis sur lequel on revient, chapitre par chapitre. Il se feuillette comme un album photo. Les bonus DVD proposent des extraits de concerts, de passages en TV, en intégralité, alors que tronqués dans le montage du documentaire.
Springsteen disait : "En matière de musique, Elvis a libéré le corps, et Dylan lui a donné une tête". C'est bien vrai. Avec Dylan, la musique rock, commence à raconter des choses intelligentes, à se mêler de ce que racontent les grands, à ne plus être une musique d’ados, à dire "je ne suis pas d'accord", et à le dire dans des formats de chansons différents, inédits, avec des mots différents, mais surtout, à le dire bien, et à le dire à tout le monde. C’est ce que raconte ce film, documentaire quasi définitif sur Robert Allen Zimmerman, dit le Zim, qui fêtera l’an prochain ses 70 ballets.
A voir aussi, le film « I’m not there » de Todd Haynes, surprenant patchwork, avec différents acteurs (dont Kate Blanchett !) pour interpréter le grand homme. Et à lire, «Chronicles vol.1» l’autobiographie de Bob Dylan sortie en 2004, évocation poétique et déstructurée de sa vie. Déroutant, mais parfois passionnant. A ma connaissance, le tome 2 n’est pas encore paru en France. Accompagné d’un double CD éponyme, où sont regroupés une quarantaine de titres country-folk ayant inspirés Dylan à ses débuts. Complément essentiel à la lecture de l’ouvrage.
La fête ne serait pas complète (mais concernant ce monsieur, aurons-nous le temps d'en faire le tour en une vie ?) sans vous inviter à parcourir les articles de notre camarade Dr. Philou (méfiez-vous mesdames, s'il vous fait le coup, il n'est absolument pas docteur en médecine, mais diplômé ès-six cordes...) en suivant les liens ci-dessous.
http://ledeblocnot.blogspot.com/2010/08/bob-dylan-bob-dylan-1961-par-philou.html
http://ledeblocnot.blogspot.com/2010/07/bob-dylan-live-au-zenith-de-nantes-1er.html
NO DIRECTION HOME (2005) 2 DVD
Réalisation : Martin Scorsese
Montage : David Tedeschi
Distribution : Paramout
Couleur et n&B - 208 minutes - VOST français
Et dire que je suis passé à coté de ce film...
RépondreSupprimerJe ferais 2 "Like a rolling stone", 3 "I shall be released" et 1 "My back pages" en pénitence...
Amen !