Charlie Musselwhite , chanteur harmoniciste de 66 ans - une trentaine d’albums au compteur et la réputation (justifiée) d’être un des virtuoses de l’harmonica - nous revient avec cet album pour Alligator , son 4eme pour le label au croco aprés "Ace Of Harps" (1990) , "Signature" (91) et "In My Time" (93) tous excellents , d’ailleurs Bruce Iglauer* a-t-il déjà produit un mauvais album ?
(* fondateur et patron du label de Chicago)
Charlie a connu le parcours classique des bluesmen : né dans le Mississippi (enfin sur ses berges plutôt) , puis un passage par Memphis avant de gagner Chicago à 15 ans, à un petit détail prêt : le fait qu’il ne soit pas noir , mais de mère indienne et de père blanc mais j’y reviendrai plus loin.
Jeune homme, il survit de petits métiers tout en tâtant de l’harmo et de la guitare et a 15 ans il rencontre l'immense harmoniciste Big Walter Horton . Décidant de faire du blues son métier il se rend à Chicago, où il sera un des premiers blancs a jouer, dans la rue, au mythique marché aux puces de Maxwell Street, du bottleneck et de l'harmonica.
Il sympathise aussi avec Sonny Boy Williamson, Little Walter, Howlin’Wolf, Big Joe Williams, John Lee Hooker et Muddy Waters, qui le prit un moment sous sa coupe. En effet Muddy , prévoyant la désaffection du public noir pour le blues, attacha de l’importance aux jeunes musiciens blancs susceptibles d’amener un plus large public vers le blues (voir l’album de Muddy avec Butterfield et Mike Bloomfield " Fathers and sons" ) .
Il se fait rapidement la réputation d'un des meilleurs harmonicistes de la place et Vanguard l'enregistre en 1966. Son premier album "Stand Back " gravé a 19 ans en fait le rival de Paul Butterfield dont le premier album a connu un gros succès et est dans le même genre, parfois un peu désordonné, mais sincère, créatif et avec un grand jeu d'harmonica. Mais alors que Butterfield s’accoquinera avec le public rock ainsi que d’autres blanc becs comme Mike Bloomfield , Musselwhite restera toujours fidèle au blues de ses racines, ce qui lui aura sans doute sauvé la vie si on pense aux fins tragiques des Butterfield, Bloomfield, Alan Wilson et Bob Hite du Canned Heat, et la liste serait longue..
Si ça réputation auprès du public blues n’est plus à faire , il reste méconnu du grand public (quel tarte ce grand public quand même..) , en fait Charlie aura toujours le cul entre 2 chaises et 2 handicaps : être blanc –rédhibitoire pour une partie du public blues , (comme quoi y’a pas que le grand public qui est tarte..)– et trop blues pour le public rock. Mais il s’en fout , et trace sa route depuis presque un demi siècle avec un public de fidèles et il aura joué avec Tom Waits, Bonnie Raitt, Ben Harper, John Lee Hooker ou INXS pour ne citer que quelques noms.
-(Voix du rédac chef) Hé Rockin’ , viens en au fait , il est bien cet album ou pas ? tu comptes nous raconter toute sa vie ?
-Patience j’y arrive !
NB .une photo signée Ph Maquet, lire son compte rendu de concert de Charlie ici:(http://philmaq.skyrock.com/2833937066-CHARLIE-MUSSELWHITE-Hasselt-Muziekodroom-8-avril-2010.html)
" The Well " donc, sorti le 24 Aout 2010 (et déjà chroniqué sur le Deblocnot’, en première mondiale !) est un excellent cru , où l’on perçoit tout le parcours de notre vétéran, depuis le country blues aux senteurs de champs de coton en fleurs du Mississippi, en passant par la musique plus soul et funky de Memphis mais l’influence majeure reste ce bon vieux Chicago blues, sans oublier le gospel et le Rock’n’Roll qui font partie de son parcours musical, en effet à Memphis il a pu voir des débutants nommés Jerry Lee Lewis, Johnny Cash ou encore Elvis...
Musselwhite joue toujours de l’harmonica avec dextérité, avec un phrasé élégant, sans en faire trop et sa voix laid-back, un peu traînante est agréable, pas forcée, il n'a jamais cherché à imiter les blacks comme certains de ses collègues mais chante avec sincérité et feeling . Autour de lui on trouve à la guitare Dave Gonzales (The Paladins), à la basse John Bazz (The Blasters), aux drums Stephen Hodges (Tom Waits, Mavis Staples) , et Musselwhite prend la guitare sur 2 titres.
Charlie a écrit tous les textes de ce disque, souvent autobiographiques . Ainsi le premier titre " Rambler’s Blues" dépeint sa vie " On The Road " , dans " Dig The Pain " il se rappelle ses années alcooliques puis " The Well " (le puits) évoque un fait divers qui l’a décidé à s’en sortir. "Where HWY 61 Runs " est une replongée dans sa jeunesse dans le Delta du Mississippi et raconte comment il est tombé dans le blues. "Sad And Beautiful Word" est la chanson la plus triste puisqu’il y parle de l’assassinat de sa mère à Memphis en 2005 , blues poignant chanté en duo avec son amie de longue date, la légendaire Mavis Staples , sans doute le plus beau titre de l'album; "Hoodoo Queen" fait référence à Marie Laveau (prêtresse vaudou de la Nouvelle Orleans , souvent célébrée dans la musique , par DR John par exemple, grand ami de Musselwhite qui fait d’ailleurs allusion à lui dans la chanson) qui l’a toujours fasciné. Vous le voyez Musselwhite a mis beaucoup de lui-même dans ce disque, ses joies, ses peines, sa vie. Oui, Charlie est un vrai de vrai bluesman, comme quoi ce n’est pas la couleur de peau qui compte mais le cœur qui se cache dessous.. .
Musselwhite n’est peut être pas un des géants du blues, mais il en est un fidèle et doué serviteur, et l’un des derniers à avoir fréquenté les Muddy, Wolf, Sonny Boy. Pour un amateur de blues une discothèque sans un CD de lui serait une hérésie et ce dernier en date prend place dans le gratin de sa discographie, discographie de haut niveau d’ailleurs, souvent récompensée par ses pairs (24 blues awards) .
13 titres ; 47:40
"Gone too long", un titre de l'excellent album "Delta hardware" (2006)
La photo de Charlie Musselwhite est une photo que j'ai prise lors d'un concert à Hasselt (B) et qui illustre le billet que j'avais consacré à ce concert sur mon blog :
RépondreSupprimerhttp://philmaq.skyrock.com/2833937066-CHARLIE-MUSSELWHITE-Hasselt-Muziekodroom-8-avril-2010.html
Je n'ai pas de problème fondamental par rapport à une telle pratique (je ne suis pas professionnel), et suis heureux à chaque fois que l'un de mes clichés sert à promouvoir un artiste que j'ai apprécié.
Je souhaite néanmoins que, par correction, la référence à l'adresse d'origine de la photo soit mentionnée.
Merci pour votre compréhension.
merci Phil de votre passage , j'ignorais que la photo était de vous ; vous savez j'ai juste tapé "image de Charlie Musselwhite " sur google et choisi celle ci car elle était trés réussie. nous non plus ne sommes pas professionnels et parler de nos coup de coeur est notre seul but , si j'avais eu connaissance de votre blog et que vous etiez l'auteur de la photo je vous aurai bien sur demandé autorisation préalable de l'utiliser . je mets votre article en lien. merci , au plaisir.
RépondreSupprimerSuper. Merci.
RépondreSupprimerEt bravo pour votre travail.
Tout ce qui touche à la musique, et plus particulièrement au blues, m'intéresse.
Je découvre donc votre blog avec beaucoup de plaisir.
Bonne continuation.