vendredi 6 août 2010

PETER GREEN - " Hot Foot Powder " (2000) par Luc B.





C’est l’été, et son cortège de douces soirées, d’apéros à la fraîche, de moments suspendus de purs bonheurs. Alors la recette est simple. Une bonne sono, un public réceptif (autrement dit, un public restreint, qui sait se taire, et écouter) un verre à portée de main, et ce disque de Peter Green. Il y reprend des thèmes de Robert Johnson. Green et Johnson, arrêtons-nous deux secondes sur le cas de ces gars-là.

Peter Green, est resté un an comme guitariste au sein de BluesBreakers, en 1966, le groupe polymorphe de John Mayall. Il y remplaçait Eric Clapton. En 1967, il crée FLEETWOOD MAC, avec le batteur Mick Fleetwood, et John McVie, lui-même issu de la bande à Mayall. En matière de british blues, rien ne se crée, tout se transforme… Là, on cause du FLEETWOOD MAC première formation, celle qui jouait du blues sous acide, qui enchainait les chorus à rallonge, qui a composé « Black Magic Woman » immortalisé par Santana un peu plus tard. Mais très vite, Green montre des signes de fatigue, de parano, fuit sa notoriété, se refugie dans la religion, la dope, et enchaine les séjours en psychiatrie. Dès qu’il refait surface, c’est pour s’écrouler de nouveau, à la limite de la schizophrénie.

Robert Johnson, lui, n’a pas eu le temps d’avoir des soucis de santé : il est mort jeune. Johnson illustre à lui seul le Blues, celui du Delta, celui de ces musiciens itinérants qui trainent leurs grattes et leurs godasses défoncées sur les rives du Mississippi, à la recherche d’un honky tonk, où, pour quelques pièces et une bombonne d’alcool à brûler, ils joueront toute la nuit. Il apprend à jouer au côté de Charlie Patton, Son House, et s’inscrit dans la légende grâce au pacte du Diable. Mais nous aurons sûrement l’occasion d’y revenir… Robert Johnson grave une trentaine de chansons avant de mourir en 1938, de la syphilis, ou empoisonné par un mari jaloux…





En 1998, Peter Green s’empare une première fois du répertoire de Johnson, et fort de ce succès, remet ça deux ans plus tard avec d’autres titres, sur ce HOT FOOT POWDER. Le résultat est tout bonnement fantastique. Du blues pur et dur, tantôt acoustique ou électrique, mais sans aucune esbroufe, à la cool, du soft blues, avec un son live et dépouillé qui rend hommage aux originaux, respectueux, mais les dépoussiérant au passage. Ces vieux airs n’ont jamais paru aussi contemporains. Peter Green et son acolyte Nigel Watson (et le Splinter Group) ont invité quelques camarades comme Buddy Guy, Dr John, Otis Rush, Joe Louis Walker… C'est dire le niveau de la cour de récré... La voix de Peter Green est douce, veloutée, et peut rappeler Eric Clapton sur certains morceaux comme « Malted Milk » d’ailleurs repris par Clapton sur son UNPLUGGED. « Drunken hearted man » a été repris par The Allman’s Brother sur leur LIVE AT FILLMORE, et « Crossroads » reste un des plus grands classiques du genre (avec « Stormy Monday » de T Bone Walker). Il faut dire que la plupart des morceaux de Robert Johnson sont des classiques intemporels, des tubes "Sweet home Chicago" , "Rambling on my mind" , "Love in vain"...) une matière première qui ne demande que du talent et de la sensibilité, pour renaître, près de 60 ans après leur création. Peter Green possède ce talent, cette intelligence, et nous livre un des plus beaux albums de blues de cette décennie.




Peter Green, de nos jours...



Le soleil disparaît sous la ligne d’horizon, le ciel se teinte de nuances violacées, les glaçons tintent dans le rosé, et Peter Green chante Robert Johnson. Même les martinets qui tournoyaient dans un brouhaha assourdissant, ont arrêté leur cirque, pour écouter. Ce disque est une merveille absolue.



HOT FOOD POWDER, 2000, 13 titres, 42 minutes

3 commentaires:

  1. Aaaah Peter Green... Quel talent gâché... Comme tant d'autres : Mick Taylor, Clapton (ben voui, il est à 20 % de ses capacités depuis 40 ans).
    Faut que j'écoute à nouveau, passque le "Splinter group" m'avait fait beaucoup de peine pour le Dieu de la guitare du Fleetwood Mac période blues.

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  2. Un bon album sympathique avec de très bon moments (notamment grâce aux divers invités), meilleur que celui de Clapton (Me & Mr Johnson), mais qui ne mérite pas les six "double-croches". Bon, peut-être que l'apéro aidant...

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  3. Bruno, je plie (mais ne rompt pas) et retire une double-croche à notre ami Peter. Point de fulgurance dans ce disque, c'est vrai, mais une élégance qui m'avait réellement conquise.

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