Allez, une p’tite chronique pour un p’tit film très sympa, signé Bruno Podalydès, qui comme d’habitude embarque son petit frère Denis Podalydès (2 ans de moins) dans ses aventures loufoques, burlesques et poétiques. Ca s’appelle LA PETITE VADROUILLE, oui oui, en référence à la grande de vadrouille, celle de Gérard Oury. Podalydès expliquait malicieusement que ça pourrait lui faire gagner quelques spectateurs de plus, sur un quiproquo ! Pour le prochain, il pensait à Un p’tit truc en moins !
Les films de Bruno Podalydès laissent toujours une impression de pas fini, un peu cheap. Celui ci ne déroge pas à la règle. Mais c’est sa manière de faire, de tourner, un style et un humour décalé reconnaissables. Comme on attend d'un Hitchcock comment le maître du suspens va apparaître au coin d’un plan, on attend dans un Podalydès comment il va placer le mot glaviotte, terme inventé, qu’il place dans les dialogues de chacune de ses réalisations. Ici, le personnage d’Albin butte sur un truc au sol, manque de trébucher : « - merde, c’est quoi ce truc ? – c’est rien, une glaviotte ».
Je soupçonne l’auteur d’avoir inventé d’autres mots, des termes nautiques, puisque le film se passe sur un bateau, La Penichette.
Franck est chef d’entreprise, vieux beau (Daniel Auteuil) qui demande à une de ses employées, Justine (Sandrine Kiberlain) de lui concocter un weekend en amoureux, un truc original, pour lui et la jeune femme qu’il souhaite séduire. Pour ça, il lui remet une enveloppe de 14000 euros. Justine et son mari Albin cogitent. Première décision, garder la moitié du fric pour eux, utiliser le reste en serrant le budget. Leur choix se porte sur une croisière en péniche sur les canaux de Franche Comté, avec musique et dégustation de produits locaux. Ils embauchent des amis, évidemment une bande de bras cassés. Jocelyn endossera le rôle de capitaine, Albin étant le coordinateur, censé être un freelance renommé dans l’évènementiel.
Podalydès aime naviguer en eaux douces. On se souvient d’un de ses premiers films LIBERTÉ OLÉRON (2001) où il était question d’une famille en voilier, et l'hédoniste COMME UN AVION (2015, un de mes préférés) où le héros descendait rivières et fleuves pour rejoindre l’océan en kayak, et ne dépassait pas Angers ! A chaque fois des moyens de transports lents où on prend le temps d’apprécier le voyage. Les films de Podalydès ne sont pas survoltés. Ici, le huit-clos sur La Penichette est propice au vaudeville nautique.
On se doute que rien ne va se passer comme prévu, à commencer par l’identité de la femme à séduire… C’est donc une réelle petite vadrouille au rythme de 5 nœuds (il ne faut pas abîmer les berges) avec son lot de rebondissements et de quiproquos. Il y a du Jacques Tati chez Podalydès, ici plus encore, avec le capitaine de pacotille qui donne des ordres au micro pour un équipage absent, paternel avec son mousse Ifus, silhouette à la Tex Avery. Daniel Auteuil compose un chef d’industrie engoncé dans son blazer tout droit sorti de MON ONCLE. Comme ce joli plan où la péniche doit éviter une jeune fille qui fait de la balançoire accrochée sous un pont.
Il y a toujours ce regard un peu ironique sur les innovations techniques (on se souvient des drones ou des voitures automatisées dans LES DEUX ALFRED), ici on a une séance de brainstorming Power Point à la noix, avec « une courbe qui monte, et là, une courbe qui descend ». Et avec Rosine (Florence Muller) qui se trimballe avec un écran vert attaché dans le dos pour projeter des spirales mouvantes lors de ses consultations d’hypnose sur Internet à l’attention des insomniaques.
LA PETITE VADROUILLE est un hymne à la lenteur, au bon vivre, à l’amour, à l’amitié, y compris dans le choix de Podalydès de faire tourner la même troupe d’acteurs, comme des rendez-vous entre potes, ils s’amusent visiblement comme des p’tits fous, nous aussi. C’est léger, plein de charme, drôle, poétique sur la fin, sans une once de cynisme. On rêve juste de partager ces moments à bord de la Penichette. Aux antipodes des comédies à la Clavier ou Boon, certes moins sophistiquées et précises que celles de Pierre Salvadori, moins foutraque que Dupieux, on peut songer à du Pascal Thomas qui serait vraiment drôle.
Le film a de bonnes critiques quasiment partout. Il faut dire que le sujet n'est guère clivant. J'ai beaucoup de mal avec Podalydès, pour les raisons que tu donnes. On attend toujours qu'il se passe quelque chose et ça ne décolle jamais, c'est souvent moche. Ce cinéma me fait penser, mutatis mutandis, à des zones périurbaines de villes moyennes.
RépondreSupprimerPlutôt d'accord avec shuffle ... Podalydès, il fait des films sympas ( je me souviens de Liberté-Oléron, Les 2 Alfred, je sais pas si j'en ai vu d'autres), mais ça ronronne, on reste toujours sur le sourire approbateur, comme si ça le gênait de faire rire le spectateur, alors que les situations comiques sont bien amenées et mériteraient de se lâcher devant et derrière la caméra ...
RépondreSupprimerD'accord aussi avec Luc (j'ai parfois un côté Bayrou), y'a un peu de Jacques Tati chez Podalydès ...