Week-end gris et froid, une sortie décommandée par une copine qui a la
grippe, des informations à la télé qui passent de la colère des paysans
français, aux manifestations des écologistes au sujet d’on ne sait plus
quoi en passant par des émeutes en Afrique, Sonia a un petit coup de mou
et dit à Nema qui travaille sur un plan de chantier de pont :
- Ça me saoule ces infos qui tournent en boucle. Tu n’aurais pas une idée pour me changer les idées ?
- Bouquine. Tiens, voilà un roman qui va te faire bouger. Dit Nema en
jetant au hasard un livre pris sur l’étagère au-dessus de sa tête.
- "Océan de vérités" ? C’est sur quel sujet ? demande Sonia.
- Euh… La faim dans le monde…
Palais du Saint-Office à Rome (ex palais de l'inquisition 😲) |
Dis comme ça, le roman est très, très, très résumé.
Lorenzo, le héros raconte ces quelques jours où il devient un aventurier, style Da
Vinci Code…
Par un coup de téléphone
Lorenzo apprend le décès de son
père. Comme ça, à brûle-pourpoint, son frère
Fabio l’appelle et lui dit que
« Papa est mort » et qu’il doit venir le plus vite possible à
Rome. Teo Telamari, éminent épidémiologiste spécialiste du sida, veuf depuis seulement deux
ans et père de Lorenzo et
Fabio, ne présentait aucun signe avant-coureur laissant présumer d’un évènement
aussi rapide. « Infarctus » dit
Fabio. Lorenzo dégage rapidement la
neige et saute dans son pickup pour rejoindre la capitale. Après quelques
années d’enseignement de l’histoire, il a embrassé la carrière de navigateur
et s’est réfugié dans les Apennins pour écrire un livre sur l’histoire des
naufrages. De deux ans son cadet,
Fabio a décidé de s’engager dans
une carrière politique au sein du parti de la
Myrte Démocratique. Carrière qui grimpe en flèche.
Avec cet encombrant pickup Lorenzo a un peu de mal à circuler dans la ville de Rome. D’autant qu’il en a perdu l’habitude. Il arrive à l’appartement de ses parents, il retrouve son frère et sa belle-sœur Nicoletta, quelques amis et collègues de son père, Nadine la secrétaire et maîtresse de son père, d’autres personnes compassées… Il se sent un peu décalé. Les funérailles sont organisées, la famille se retrouve au cimetière et en partant, Lorenzo est accosté discrètement par une jeune femme aux cheveux frisés couleur miel dépassant d’un bonnet de laine. De façon très rapide elle lui dit qu’elle le recontactera. Elle s’appelle Mette.
PickUp (modèle 1990) |
Fabio et
Nicoletta forment le couple
moderne, parfait, reflet de la bonne société romaine. Ils ont un fils,
Tommaso, un adolescent plus passionné par le foot qu’autre chose, des domestiques,
un grand appartement dans une résidence fermée. De l’ambition et un soin du
paraître exorbitant. Nicoletta, toujours impeccablement maquillée et coiffée, avec un sourire
conventionnel œuvre comme présentatrice de documentaires scientifiques à la
télévision, tandis que
Fabio accompagné de son
assistant parlementaire court à droite et à gauche pour se mettre en avant,
répondre à la presse, suivre sur l’un de ses nombreux portables tout ce qui
se passe, tout ce qui se dit à son sujet.
Lorenzo est invité à passer
quelques jours chez eux, dans leur intimité. Ce sera l’occasion pour lui de
voir autrement Nicoletta, et de retrouver (ou pas) dans
Fabio le cadet avec lequel il
était si complice autrefois.
Mette est activiste chez Stopwatch, une organisation de défense de la terre. Elle, et Jorge son fidèle ami et compagnon de longue date dans cette lutte pour la sauvegarde de la planète, dévoilera à Lorenzo l’existence d’un mémorandum écrit par le cardinal Ndionge, religieux sénégalais mort du sida et qui avait été un ami de Teo Telamari. Pour Mette et Jorge, ce manuscrit, ou au moins une copie, est chez le père de Lorenzo. Ils ont connu le secrétaire du cardinal qui a effectué des copies de ce manuscrit au Sénégal.
Port de Bastia par gros temps |
Or ce document est très important au regard de
Stopwatch
qui voudrait pouvoir en organiser une large diffusion. En effet, il met en
évidence le caractère criminel de prêcher contre le préservatif en Afrique,
alors que la population mondiale ne fait que croître et que les ressources
pour nourrir cette population ne seront pas suffisantes.
Lorenzo adhère à leur cause.
Mais il semble que le Vatican et certains partis politique (dont celui de
Fabio ?) ne voient pas du tout les choses de la même façon. Le poids de
l’église traditionnaliste est important et le sujet est totalement tabou.
Alors on plonge dans des évènements graves : cambriolage chez Teo Telamari, puis chez Nadine, disparition du manuscrit, incendie du local de Stopwatch à Rome, morts très suspectes de certaines personnes… Lorenzo se verra remettre par Nadine une photo de son père avec quelques annotations, juste avant que celle-ci ne quitte l’Italie pour rentrer en Suisse son pays d’origine, avec l’amertume de quitter cette Italie qui l’a déçue. La situation s’aggrave très vite et Lorenzo et ses amis de Stopwatch sont poursuivis. Fuite en voiture, avec la Fiat de Nicoletta puis refuge dans une villa de bord de mer là encore grâce à l’aide de Nicoletta. Malgré l’insistance ce celle-ci et de Fabio, Lorenzo ne veut pas abandonner la recherche du manuscrit. Il y aura un voyage en voilier de nuit, dans la tempête pour passer de l’Italie à la Corse. Un épisode stressant avec la gendarmerie et la capitainerie de Bastia, une séparation fortuite, une arrivée quasi clandestine à Marseille pour partir aussitôt au Portugal… Et à la fin, je vous rassure, Lorenzo retrouve Mette. « Happy End ».
Ce roman est très agréable à lire et en même temps très italien. Je vous
préviens, Lorenzo est un bel
italien, donc plutôt sensible à la gent féminine… En plus du suspens genre
thriller, il y a cette description des relations et du fonctionnement du
monde de la politique et des médias qui donne une image assez noire des
petites magouilles autour du pouvoir. Enfin, petites magouilles qui vont
quand même jusqu’au meurtre.
Andrea de Carlo est né à Milan en 1952. Il a été assistant de Fellini, aime le rock et a écrit de nombreux romans… ses ouvrages sont traduits en plusieurs langues. La traduction par Myriam Tanant d’Océan de vérités met bien en relief le caractère fougueux de Lorenzo et de son frère par exemple. Il n’y a plus qu’à imaginer qu’ils parlent aussi avec les mains…
- Grasset
- 345 pages
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