jeudi 18 août 2022

AU POSTE de Quentin Dupieux (2018) – par Nema M.


Sonia repasse une montagne de linge. C’est le retour des vacances. Dur, dur, mais dans la répartition des tâches, il appartient à Sonia de repasser et à Nema de faire les poussières et le lavage des sols du logement partagé (sauf dans la chambre de Sonia évidemment).

Sonia est exaspérée par le regard de Nema un peu narquois :

- Tu veux un coup de fer sur ta tronche ! lui hurle-t-elle…
- Hum, un fer à repasser arme par destination, ça me rappelle un film très marrant. J’ai le DVD, je te le montrerai quand tu auras fini Sonia…
- Cool. OK. Je me dépêche Nema.


Fugain et le commissaire Buron

Pourquoi un chef d’orchestre dirige-t-il en plein air son orchestre symphonique jouant du Mozart, simplement vêtu d’un slip rouge ? Ben, pour se faire embarquer par les flics dans un improbable panier à salade pie des années 80-90…  Changement de décors et nous voici dans le commissariat de police. Assez moderne, impersonnel, murs en béton brut, fenêtres étroites donnant sur une ville dont les tours endormies ne laissent voir que quelques points de lumière.

 

Dans le bureau du commissaire Buron, est assis un suspect : un homme, banal quadra moustachu, cheveux coiffés en arrière, portant une chemise aux dessins bizarres (sorte de feuillage ?). En face de lui, le commissaire Buron devant sa machine à écrire. Il ne s’agit pas d’un ordinateur mais bien d’un engin avec clavier et retour chariot manuel, vous voyez, pas d’hier mais plutôt d’avant-hier, avec une feuille de papier carbone en sandwich entre deux pages blanches. Buron tape avec deux doigts mais vite et consciencieusement tout ce que lui indique Fugain (c’est le nom du suspect). 


Philippe né avec un seul œil !

La pièce est grande, on voit de dos un autre homme installé à un bureau face au mur, à côté d’armoires-vestiaires. Il s’agit de Philippe, un nouveau flic, jeune, borgne (il est né avec un seul œil 😊), qui semble très occupé par un dossier.   

Bon. Suspecté de quoi au fait le Fugain ? Voilà. Dans la nuit, Louis Fugain a appelé police secours car il a découvert un homme mort, baignant dans son sang au pied de son immeuble. Puis il est remonté se coucher avec sa femme. Un peu plus tard, après les constats de police et l’enlèvement du corps pour la morgue, il a été emmené au commissariat. Le commissaire Buron mène l’enquête et essaie de comprendre ce qui s’est passé cette nuit-là. Il n’y a pas de témoin, personne d’autre que ce « découvreur de cadavre », considéré comme principal suspect. Questions minutieuses, demande de détails, Buron veut comprendre tous les faits et gestes de Fugain, l’enchaînement précis des aller-venues de la soirée et de la nuit. Sept au total. Vues par la voisine qui ouvre sa porte à chaque fois que Fugain appelle l’ascenseur. Sept ? mais oui, il y en a qui ont des nuits mouvementées (femme somnambule, cafard à chasser…).

 

Même s'il a faim, il n’y aura pas d’interruption d’interrogatoire pour Fugain sauf le temps pour lui de grignoter un Mars déjà entamé, généreusement offert par le commissaire. De son côté, Buron s’octroie cinq minutes de pause pour voir son fils qui lui dit juste qu’après avoir eu l’idée de se suicider, il a estimé que finalement ce n’était pas la peine, et qui lui a apporté un hot dog. Oups ! aucune réaction particulière du père, comme s’il n’avait rien entendu, focalisé comme il l’est sur son affaire de cadavre de la nuit. C’est la vie. Buron mange le hot dog voracement et remonte interroger son suspect.  


Fiona

Il y avait un fer à repasser à côté du cadavre. Drôle d’arme pour fracasser un crâne. Enfin dans cette histoire, burlesque je vous préviens au cas où vous ne l’auriez pas encore compris, il y a aussi une équerre à dessin qui sera fatale. Une équerre ? Cet objet qui sert à tracer des angles ? Affirmatif, une équerre peut devenir mortelle plantée dans un œil. Et en effet, Philippe qui s’est vu confié la garde de Fugain pendant la pause de Buron, suite à un concours de circonstances malheureuses, se retrouve par terre, mort, tué par l’équerre maladroitement manipulée… Son corps sera caché dans une armoire-vestiaire. Et on laissera croire à sa femme Fiona, flic elle aussi, qu’il est rentré chez lui suite à une indisposition digestive.

 

Cette histoire est complétement déjantée. Ni queue ni tête. Est-ce que l’on va au moins connaître le coupable du meurtre de l’homme retrouvé en bas de l’immeuble de Fugain ? Oui, d’une certaine façon, et ce grâce au collègue de Buron, Champonin. Champonin, un flic bancal que l’on aperçoit au début du film dans un bureau en train d’écouter de la musique, absorbé par un épais dossier : le rapport du légiste. Il en présentera les conclusions devant Fugain qui de suspect deviendra enfin innocent. Au fait, pour votre information, on ne sait pas qui était le chef d’orchestre ni ce qu’il devient. Et le cadavre de Philippe reste au placard.


Quentin Dupieux

Ce huis-clos, cette histoire, n’est-ce pas une pièce de théâtre ? Un rideau se lève : les spectateurs applaudissent. Les personnages se retrouvent autour d’un verre à papoter. Et pour finir le rideau se baissera sur la salle de spectacle.

 

Très bons dialogues. Interprétation excellente de Benoît Poelvoorde dans le rôle de Buron : pince sans rire, concentré de logique pure, gestuelle appuyée juste ce qu’il faut. Les autres acteurs sont également bien imprégnés de cette comédie policière loufoque que ce soit Grégoire Ludig (Fugain), Marc Fraize (Philippe), Philippe Duquesne (Champonin) ou Anaïs Demoustier frisée comme un mouton (Fiona) pour ne citer que les principaux. Et si vous êtes cinéphile, vous verrez des allusions à de nombreux polars des années 70. 

 

À voir !

 

Réalisation Quentin Dupieux

72 minutes 


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