Sonia repasse une montagne de linge. C’est le retour des vacances. Dur,
dur, mais dans la répartition des tâches, il appartient à Sonia de
repasser et à Nema de faire les poussières et le lavage des sols du
logement partagé (sauf dans la chambre de Sonia évidemment).
Sonia est exaspérée par le regard de Nema un peu narquois :
- Tu veux un coup de fer sur ta tronche !
lui hurle-t-elle…
- Hum, un fer à repasser arme par destination, ça me rappelle un film
très marrant. J’ai le DVD, je te le montrerai quand tu auras fini
Sonia…
- Cool. OK. Je me dépêche Nema.
Fugain et le commissaire Buron |
Pourquoi un chef d’orchestre dirige-t-il en plein air son orchestre
symphonique jouant du Mozart, simplement vêtu d’un slip rouge ? Ben, pour se
faire embarquer par les flics dans un improbable panier à salade pie des
années 80-90… Changement de décors et nous voici dans le commissariat
de police. Assez moderne, impersonnel, murs en béton brut, fenêtres étroites
donnant sur une ville dont les tours endormies ne laissent voir que quelques
points de lumière.
Dans le bureau du commissaire Buron, est assis un suspect : un
homme, banal quadra moustachu, cheveux coiffés en arrière, portant une
chemise aux dessins bizarres (sorte de feuillage ?). En face de lui, le
commissaire Buron devant sa machine à écrire. Il ne s’agit pas d’un
ordinateur mais bien d’un engin avec clavier et retour chariot manuel, vous
voyez, pas d’hier mais plutôt d’avant-hier, avec une feuille de papier
carbone en sandwich entre deux pages blanches. Buron tape avec deux
doigts mais vite et consciencieusement tout ce que lui indique
Fugain (c’est le nom du suspect).
Philippe né avec un seul œil ! |
La pièce est grande, on voit de dos un autre homme installé à un bureau
face au mur, à côté d’armoires-vestiaires. Il s’agit de Philippe, un
nouveau flic, jeune, borgne (il est né avec un seul œil 😊), qui semble très
occupé par un dossier.
Bon. Suspecté de quoi au fait le Fugain ? Voilà. Dans la nuit,
Louis Fugain a appelé police secours car il a découvert un homme
mort, baignant dans son sang au pied de son immeuble. Puis il est remonté se
coucher avec sa femme. Un peu plus tard, après les constats de police et
l’enlèvement du corps pour la morgue, il a été emmené au commissariat. Le
commissaire Buron mène l’enquête et essaie de comprendre ce qui s’est
passé cette nuit-là. Il n’y a pas de témoin, personne d’autre que ce «
découvreur de cadavre », considéré comme principal suspect. Questions
minutieuses, demande de détails, Buron veut comprendre tous les faits
et gestes de Fugain, l’enchaînement précis des aller-venues de
la soirée et de la nuit. Sept au total. Vues par
la voisine qui ouvre sa porte à chaque fois que Fugain appelle
l’ascenseur. Sept ? mais oui, il y en a qui ont des nuits mouvementées
(femme somnambule, cafard à chasser…).
Même s'il a faim, il n’y aura pas d’interruption d’interrogatoire pour
Fugain sauf le temps pour lui de grignoter un Mars déjà entamé,
généreusement offert par le commissaire. De son côté, Buron s’octroie
cinq minutes de pause pour voir son fils qui lui dit juste qu’après avoir eu
l’idée de se suicider, il a estimé que finalement ce n’était pas la peine,
et qui lui a apporté un hot dog. Oups ! aucune réaction particulière du
père, comme s’il n’avait rien entendu, focalisé comme il l’est sur son
affaire de cadavre de la nuit. C’est la vie. Buron mange le hot dog
voracement et remonte interroger son suspect.
Fiona |
Il y avait un fer à repasser à côté du cadavre. Drôle d’arme pour fracasser
un crâne. Enfin dans cette histoire, burlesque je vous préviens au cas où
vous ne l’auriez pas encore compris, il y a aussi une équerre à dessin qui
sera fatale. Une équerre ? Cet objet qui sert à tracer des angles ?
Affirmatif, une équerre peut devenir mortelle plantée dans un œil. Et en
effet, Philippe qui s’est vu confié la garde de Fugain pendant
la pause de Buron, suite à un concours de circonstances malheureuses,
se retrouve par terre, mort, tué par l’équerre maladroitement manipulée… Son
corps sera caché dans une armoire-vestiaire. Et on laissera croire à sa
femme Fiona, flic elle aussi, qu’il est rentré chez lui suite à une
indisposition digestive.
Cette histoire est complétement déjantée. Ni queue ni tête. Est-ce que l’on
va au moins connaître le coupable du meurtre de l’homme retrouvé en bas de
l’immeuble de Fugain ? Oui, d’une certaine façon, et ce grâce au
collègue de Buron, Champonin. Champonin, un flic bancal
que l’on aperçoit au début du film dans un bureau en train d’écouter de la
musique, absorbé par un épais dossier : le rapport du légiste. Il en
présentera les conclusions devant Fugain qui de suspect deviendra
enfin innocent. Au fait, pour votre information, on ne sait pas qui était le
chef d’orchestre ni ce qu’il devient. Et le cadavre de Philippe reste
au placard.
Quentin Dupieux |
Ce huis-clos, cette histoire, n’est-ce pas une pièce de théâtre ? Un rideau
se lève : les spectateurs applaudissent. Les personnages se retrouvent
autour d’un verre à papoter. Et pour finir le rideau se baissera sur la
salle de spectacle.
Très bons dialogues. Interprétation excellente de
Benoît Poelvoorde
dans le rôle de Buron : pince sans rire, concentré de logique pure,
gestuelle appuyée juste ce qu’il faut. Les autres acteurs sont également
bien imprégnés de cette comédie policière loufoque que ce soit
Grégoire Ludig
(Fugain),
Marc Fraize
(Philippe),
Philippe Duquesne
(Champonin) ou
Anaïs Demoustier
frisée comme un mouton (Fiona) pour ne citer que les principaux. Et
si vous êtes cinéphile, vous verrez des allusions à de nombreux polars des
années 70.
À voir !
Réalisation Quentin Dupieux
72 minutes
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