- Bartók
cette semaine Claude, ce n'est pas souvent, pas un concerto ni un quatuor qui
font partie de ces œuvres majeures…
- Houlà, t'as
révisé le sujet à mort Sonia… Comme tous les premiers compositeurs modernistes,
Bartók est difficile à commenter…
- Sans doute,
c'est quoi le Prince de bois comme genre ?
- Un ballet
un peu négligé, moins bluffant que le Mandarin merveilleux mais bien vivant
quand dirigé avec dynamisme…
- Et c'est le
cas avec Pierre Boulez à tous les coups…
- Les
gravures sont rares, cette mouture la plus récente a été enregistré avec le
très musclé symphonique de Chicago, un must de ces disques pour DG en
numérique…
Bartók et son enregistreur à rouleau de cire |
Bartók n'aimait
à l'évidence pas les œuvres trop longues, à l'inverse des postromantiques comme
Mahler ou Richard
Strauss. Même son unique Opéra, Le château de Barbe-bleue
ne dure qu'une heure. Côté ballets, contrairement aux grandes partitions de Tchaïkovski (1H30-2H), on ne compte que
deux ouvrages courts : le Mandarin merveilleux dont la
durée et l'argument font songer à Petrouchka de Stravinsky
(Clic),
et le Prince
bois, un conte de fée traité en ballet pantomime en un seul acte
d'une quarantaine de minutes seulement. Certes, la seconde composition n'égale
pas la rigoureuse structure du Mandarin, mais le négliger à ce
point me semble excessif. Les fureurs mélodiques du Mandarin frappent
l'auditeur d'emblée. À l'inverse, la thématique du Prince de bois n'est
peut-être pas aussi imaginative et survoltée mais l'orchestration est très
colorée et comme supposé par Sonia, du talent du chef d'orchestre dépend de
magnifier de belles couleurs orchestrales ; normal pour un conte de fée…
Il ne faut pas oublier que même (et surtout) en cette
période de guerre, Bartók est l'ami de Ravel, lui aussi amateur d'ouvrages sans
note destinée à meubler, et l'admirateur de Debussy
ou encore de Stravinsky, deux
compositeurs de Ballets de 10 à 35 minutes… L'heure n'est plus aux répétitions
héritées de la forme sonate, des arguments s'étirant sur des dizaines de
tableaux répartis en 3 à 4 actes. On pourrait dire que la musique guide la
chorégraphie et non l'inverse comme du temps de Delibes
ou Tchaïkovski et ses valses à répétitions
même si délicieuses. Par ailleurs, avec notamment les ballets russes de Diaghilev, les tutus, pointes et
l'académisme d'un petit pas laissent la place à des styles de danses moins
guindés, des costumes en harmonie avec le statut féérique ou social des
personnages. (Vous avez déjà vu un mandarin chinois en collant moule-bite vous
?) Peintre et costumier d'avant-garde sont sollicités. Malgré un argument digne
d'un conte pour enfant, Bartók
s'affirme résolument moderniste…
Béla Balázs |
Bartók compose
son ballet entre 1914 et 1916 mais il faudra attendre 1917 pour l'achèvement de l'orchestration
plutôt luxuriante. Il fait donc suite à l'écriture en 1911 de l'opéra Le Château de Barbe-Bleue qui n'a
pas encore été créé… La genèse de l'opéra sera complexe et c'est le ballet qui
est créé en premier à l'Opéra de Budapest le 12 mai 1917 sous la direction d'Egisto Tango.
L'argument est l'œuvre du poète Béla
Balázs (également : théoricien du cinéma, cinéaste, écrivain, dramaturge, romancier,
feuilletoniste, auteur de contes et de nouvelles ; il y a des gens comme ça !)
qui avait déjà rédigé le livret pour Le Château de Barbe-Bleue inspiré à
la fois par le conte de Charles Perrault
et le drame de Maeterlinck mis en
musique par Debussy, Schoenberg ou Sibelius…
Béla Balázs choisit une thématique
similaire : celui des amours impossibles contrariés par les mauvaises ondes. En
l'occurrence un conte qu'il avait publié en 1913, Le
prince de bois. Lorsque le comte Banffy directeur de l'opéra de Budapest apprend que Balázs a confié la composition à Bartók, il n'est guère enthousiaste. Le conte
n'a pas envie de la musique d'un ethnologue et d'un chercheur sur une théorie
des sons et harmonies qui semble plus adaptée à l'obtention du prix Nobel de
physique (mécanique ondulatoire) qu'au remplissage d'une salle de concert.
En 1917, Bartók ne s'est pas encore imposé parmi la
nouvelle école musicale hongroise, il ne le fera jamais complètement, refusant
tout académisme. Bartók a déjà exposé à
travers ses premiers
quatuors, entre autres, son désir de révolutionner totalement
son langage : structure saccadée, dissonances des gammes tonales à la Debussy lorgnant vers le dodécaphonisme de
Schoenberg, dislocation mélodique dans la
polyphonie, violence et dramaturgie du propos. En un mot tout ce qui ne plait
pas au public peu friand de nouveautés… Tiens, les six quatuors, six
autres monuments à explorer dans ce blog…
Egisto Tango maestro
d'origine italienne (1873-1951) va
sauver la mise par son intérêt pour l'avant-gardisme et offrir à Bartók son premier succès. Il récidivera
l'année suivant lors de la première du Château de Barbe-Bleue. Bartók n'est plus considéré comme un
théoricien extravagant mais comme un vrai musicien !
L'ouvrage comporte sept danses suivant une courte
introduction orchestrale. Je donnerai un aperçu de cette histoire féérique en
commentant la composition. Même si l'orchestre évite les déchaînements paroxystiques,
l'orchestration est délirante et concurrente de celles de Mahler
ou Strauss : 4 flûtes+ picolo, 4 hautbois +
cor anglais, 4 clarinettes + petite clarinette et clarinette basse, 4 bassons +
contrebasson, 3 saxophones (alto, ténor, baryton – c'est un cas unique), 4
cors, 6 trompettes, 3 trombones, 1 tuba, timbales, grosse caisse, cymbales,
caisse claire, triangle, tam-tam, glockenspiel, xylophone, castagnettes, un célesta, deux harpes, cordes.
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Opéra de Budapest |
[V1-5:15] Danse de la princesse dans la forêt : Début
des amourettes et hostilités suivant un flot mélodique articulé et contrasté à
l'orchestration très colorée et élégiaque. Une musique peut-être difficile à
suivre sans le support visuel de la chorégraphie. Bartók
fait appel à une technique propre au poème symphonique, chaque section souligne
une péripétie, pas de thème ni de leitmotiv. La princesse sort de son ennui pour
danser. Ah, le prince
ouvre la porte (celle du château de droite), voit la princesse
et tombe raide mort, non amoureux. La fée, outrée, oblige la donzelle
à rentrer dans le château (gauche) ; la garce !
Merci à pelodelperro pour la publication You Tube,
mais je trouve les illustrations vraiment laides… affaire de goût J.
[V2-0:0] Danse des
arbres. Bartók compose un passage
empreint de tensions, un flot mélodique tempétueux, un climat de furie scandé
par les percussions et martelé par les timbales et diverses percussions, et
tout cela baignant dans des rugissements de cuivres. Il faut dire que le prince
tente de traverser la forêt pour rejoindre la belle, mais la fée donne vie aux
arbres pour l'en empêcher. Il s'épuise dans sa lutte contre le sortilège, mais
ouiiiii… Ah mince, la fée à transformer le ruisseau qu'enjambe une passerelle ;
pire qu'un orage cévenole…
Il vécurent heureux et... |
[V4 et V5] Danse de la princesse avec la poupée de bois
: Je n'insiste pas sur la richesse de la partition, les conflits concertants au
sein de cet orchestre à l'effectif pléthorique. Une quinzaine de minutes de
danses un peu folles dans laquelle surgissent des motifs folkloriques sans
doute glanés par Bartók pendant ses visites
dans les villages hongrois et roumains… Une partition aux mille couleurs, et
pas très facile pour l'orchestre ; comme équilibrer les niveaux sonores entres
cuivres, timbales, xylophone et glockenspiel [V4 -3:00 à 5:20]. L'affaire se
complique, je résume : Le prince prostrée somnole, désespéré ; la fée (pas
méchante, disons "taquine") s'en attriste et lui offre une couronne
et un manteau de fleurs, il devient le prince de la forêt et la fée le conduit
à sa chérie… (Sonia,
arrêtes de sangloter comme une bécasse).
[V6-1] La princesse
tiraille le prince de bois pour l'obliger à danser : le pantin de
bois a perdu toute énergie : Le prince de bois s'écroule façon püzzle. La
princesse voit le vrai prince et s'en étonne. Bartók
caricature la situation : les motifs extravagants se succèdent, on pense à un
concerto pour orchestre de chambre et percussions illuminé d'une facétieuse
allégresse, un déchaînement cocasse de timbres…
[V6-2 – 1:55] Danse de
séduction de la princesse : La princesse sort de son état hypnotique
et tente de séduire par une danse lascive. Pris de panique, le prince tente de
fuir. La princesse le poursuit mais se heurte à la forêt (comprend qui pourra).
[V6-3 – 3:33] Danse de l'amour : Bartók
développe un passage sombre et dramatique pour souligner la détresse des jeunes
gens. Ah, enfin le prince semble capter. Il s'en retourne et voit la princesse
en larmes, il la prend dans ses bras et le rideau tombe… [8:08] La conclusion
rayonne de bonheur extatique (un peu trop), les saxophones font leur retour en
même temps que le prince s'abandonne à ses sentiments, une scène heureuse baigné par une tendre mélopée des cordes et des cors et le scintillement de la harpe et du Célesta… (Partition).
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Peu de version concurrente : celle de Pierre Boulez dans les années 60 avec la Philharmonie de New-York dans un double
album CBS-Sony est de bon aloi mais
la prise de son est moins transparente.
L'enregistrement de Antal
Dorati de la même époque pour Mercury avec L'orchestre
symphonique de Londres révèle la fureur, les dissonances et le
travail diabolique sur les percussions du compositeur, une autre référence.
Enfin, plus récents, le chef hongrois Ivan Fischer a gravé plusieurs des œuvres de
Bartók pour orchestre avec son orchestre du festival de Budapest. On
appréciera à la fois la célèbre finesse analytique et poétique du chef et la
subtilité de la prise de son. Le prince de bois existait également en album
isolé, mais pour les disques Philips,
il faut savoir fouiner, à part des "occasions" hors de prix…
(5/6 pour chaque album)
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CÉU disse que portugal nao tem trabalhos e tudos muito pobres tambem. Visite meu Blog
RépondreSupprimerO Alentejo Espanhois sempre! !
RépondreSupprimeros portuguesitos não gostam de seu pais
https://www.youtube.com/watch?v=3j1lBCtLy44&feature=youtu.be